« Les violences faites aux femmes, c’est un truc qui t’intéresse ? ». Voilà la question déclencheuse qui va lancer Mathieu Palain dans une enquête pour comprendre le mécanisme qui conduit chaque année en France plus de 100 femmes à la mort et 220 000 à subir des violences au sein de leur couple.


Le bandeau de couverture est catégorique : Mathieu Palain est « le jeune surdoué de la littérature du réel ». Je ne sais pas vous, mais moi ce genre d’affirmation me dispose assez mal en général par rapport au livre que je vais lire. Je n’aime pas qu’on me dise ce que je dois penser de l’auteur ou du récit et j’estime (en toute modestie) être capable de me faire ma propre opinion.


Une fois cela posé, il est indéniable que ce livre possède de nombreuses qualités. Déjà d’accepter ses limites. Non, Mathieu Palain ne va pas nous livrer la solution pour que tout cela s’arrête, ce n’est pas son rôle. Son rôle ici est de nous interroger, d’interroger la société, de s’interroger sur ce qui fait que la violence naît, qu’elle se propage. Que des hommes violents vont répéter ce schéma, que des femmes vont subir, que la justice va parfois faillir à les protéger.


Mathieu Palain ausculte, décortique pour comprendre les mécanismes des agresseurs comme des agressées. Reproduit-on des comportements auxquels on a été confrontés étant enfant, la violence est-elle un sujet de classe sociale, peut-on sortir d’une relation toxique, que transmet-on à nos enfants de cette violence. Autant de questions qu’il explore en participant à des groupes de parole, en écoutant des hommes violents mais aussi des victimes ou des psychologues.


Le livre est aussi intéressant parce qu’il oblige chaque lecteur à se confronter à son propre vécu et Mathieu Palain fait lui aussi cet exercice en tant qu’homme de se demander si, parfois, il n’a pas été un prédateur qui impose et abuse de la faiblesse de la personne qui se trouve face à lui.


A travers ce livre, il interroge une société qui évolue, qui accepte moins, mais sans doute encore trop lentement devant ces chiffres qui restent alarmants. A l’issue de cette lecture, on se dit qu’il reste encore bien du chemin à parcourir car finalement peu d’hommes présentés ici semblent capables de se remettre en cause. Par ailleurs, quel travail est possible sur des hommes qui ne sont pas identifiés car leur compagne ne porte pas plainte ou qu’ils sont protégés par leur statut social.


Il semble qu’il soit bien difficile de sortir d’une sorte d’engrenage dans lequel la violence engendre la violence sans prendre le mal à la source plutôt qu’une fois l’acte accompli.

Christlbouquine
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le 7 mars 2023

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