Pas de jour sans une ligne
Fiche technique
Auteur :
Iouri Karlovitch OlechaGenre : Journal & carnetDate de publication (Russie) : 1965Langue d'origine : RusseTraducteur :
Paul LequesneParution France : 1 février 1995Éditeur :
L'Âge d'hommeISBN : 9782825105849Résumé : Le 5 mai 1930, Iouri Olécha (1899-1960), jeune auteur adulé de la littérature soviétique, dont le premier roman, l'Envie, avait remporté trois ans plus tôt un succès fulgurant, entamait son journal par ces lignes: "Au lieu de commencer un roman, j'ai commencé à tenir un journal... A quoi bon inventer, "composer". Il vaut mieux honnêtement, jour après jour, noter le véritable contenu du vécu, sans chercher à finasser autrement. Puisse tout le monde tenir son journal: employés, ouvriers, écrivains, illettrés hommes, femmes, enfants... Quel trésor ce sera pour le futur! Nous, qui vivons aux premiers jours de fondation d'une nouvelle société humaine, devons en laisser une multitude de témoignages". Vers la même époque, il ajoutait: "J'extrais en ce moment des morceaux de ma mémoire, je les trie et les emmagasine. Il faudra ensuite en confectionner des plaques du genre de celles qu'on glisse dans les lanternes magiques et inventer un appareil qui puisse les illuminer et les projeter". Olécha dut attendre près de vingt-cinq ans pour que, enfin libéré de la terrible menace - menace de silence, menace de mort - qui avait pesé sur lui durant tout ce temps, il entreprît la construction du révolutionnaire appareil au moyen duquel il espérait bien rassembler les morceaux épars de son âme sacrifiée aux appétits des rouages du pouvoir. En quelques lignes tracées obstinément chaque jour, de fragments de mémoire en notes de lecture, d'esquisses d’œuvres perdues en regards émerveillés de vieil homme qui ne peut se résoudre à n'être plus enfant, il amassa, une à une, les pièces toutes uniques de sa machine à images. Point ne lui était besoin pour cela d'être savant mécanicien, il lui suffisait d'être resté, malgré toutes les souffrances, malgré toutes les contraintes et les dangers, le seul vrai roi de la métaphore. Trahi par son cœur, Olécha mourut sans avoir eu le temps de boulonner ensemble les précieux morceaux de sa lanterne magique. L'appareil vit cependant le jour cinq ans plus tard, grâce aux efforts du grand maître et alchimiste de la littérature qu'était Victor Chklovski. Le mystérieux objet se trouva prendre la forme d'un livre, un livre d'images, en cinq parties, un livre-métaphore en mille étonnements et prodiges.