La très belle Tippi Meyer est morte : sa luxueuse berline a quitté la route et a dévalé jusqu'au fond du ravin. Kowalzki, son amant, arrivé très tôt sur les lieux, observe la police et les secouristes s'affairer.
Le mari de Tippi, Salvatore Meyer, débarque à son tour. Il voit, au loin, l'amant au regard perdu.
Cet accident ne l'étonne pas vraiment : sa femme roulait vite, elle aimait foncer sur les routes autour de Santa-Clarica (Californie), les cheveux et le foulard dans le vent, comme une héroïne hitchcockienne. Elle était partie en pleine nuit, sans prévenir personne, sans dire où elle allait et ce qui est bizarre, c'est qu'elle n'a ni freiné ni contrebraqué.
Oui, l'inspecteur Costa Martin Lopez, sur les lieux lui aussi, a remarqué cela et il s'interroge. Suicide ? Meurtre ? Il a appris que Salvatore, le mari, venait de se disputer avec sa femme. C'est ce que lui a dit le père de Tippi, un certain Bruce Cazale, directeur d'une entreprise de démolition industrielle où travaille Salvatore. Le juge risque donc d'ouvrir une instruction. Pourquoi ? demande le mari, surpris. A cause de cette dispute, la veille, lui répond l'inspecteur… Salvatore a l'air perdu, sous le choc. Une dispute, est-ce une preuve ? Il veut voir le corps de sa femme et on le lui interdit. Il a beau supplier, rien n'y fait. Il l'aimait, cette femme, et maintenant, il va devoir continuer sans elle…
Pas facile de parler sans rien dévoiler d'un livre qui s'apparente à un roman policier. Mais, c'est promis, vous ne saurez rien….
Sinon que toute cette histoire est racontée du point de vue de Salvatore, le mari. Ce qui signifie que l'on n'est pas forcément bien placé pour comprendre les tenants et les aboutissants, comme on dit. Il a quelque chose de Meursault, ce type. Il semble complètement étranger à tout ce qui se passe, il comprend mal les nombreux assauts de l'inspecteur Costa qui ne le lâche pas d'une semelle.
A vrai dire, on a comme l'impression que tout le monde s'est un peu moqué de Salvatore, l'a vaguement manipulé, que ce soit sa femme qui rejoignait sans aucune gêne son amant (pour ça, Salvatore n'était pas dupe!) et qui s'était même autorisée à installer son père chez eux pour une sympathique vie à trois ! Tippi l'avait dit très clairement à Salvatore: « le soir même, lors d'une discussion orageuse, Tippi avait répondu que, si son père me traitait comme un moins que rien, c'était parce que je n'étais pas à la hauteur. » Et l'inspecteur, quant à lui, se permet de lui souffler à l'oreille : « vous m'êtes très sympathique, mais je crois percevoir chez vous certaines failles. J'ai quand même le sentiment, passez-moi l'expression, que vous vous êtes fait avoir. » Un pauvre type, ce Salvatore, l'anti-héros par excellence.
Et maintenant, il va devoir supporter les mille questions de l'inspecteur Costa, lui qui ne souhaiterait qu'une seule chose : se retrouver seul avec ses pensées, avec Tippi.
J'ai bien accroché à ce livre lu d'une traite avec ce titre en tête « Pas dupe » qui m'a titillée tout le long de ma lecture. Qui n'est pas dupe ? Le lecteur ? Je crains pourtant d'être bien tombée dans le panneau (pas dans le ravin, c'est déjà ça!). Salvatore, lui-même ? Costa, l'inspecteur ? Kowalski, l'amant ? Cazale, le beau-père ? La voisine ? (oui, oui, il y a une voisine, Gladys Lamarr, qui a des yeux et des oreilles, qui voit tout et qui sait tout… à moins qu'elle n'ait rêvé, ça elle ne sait plus très bien…)
Et cet inspecteur qui revient toujours à l'attaque : je dois avouer que, dès le début, je lui ai collé les traits de Columbo - impossible de faire autrement - avec son carnet, son faux air naïf, ses questions inattendues, apparemment anecdotiques et sa façon d'apparaître là où on ne l'attend pas vraiment. Un inspecteur « incapable de laisser des cases vides dans ses enquêtes... » A-t-il toute sa tête, celui-là ?
Qui est dupe ? Qui se fait gentiment berner ? Qui manipule ? Qui est manipulé ? Qui avait intérêt à ce que Tippy disparaisse ? Tous ? Oui, tous d'une certaine façon, si l'on y réfléchit bien…
Allez, je n'en dis pas plus...
Le problème avec les romans de Ravey, c'est que quand on en a goûté un, il est difficile de résister à ceux qui suivent… Et de ça, je ne suis pas dupe !
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