Ce que je pensais d'abord être un conte sarcastique sur la vision qu'entretiennent perpétuellement les occidentaux sur l'Orient à travers aujourd'hui la figure du migrant s'est progressivement transformé en quelque chose de très différent. J'ai beaucoup aimé le début, où le narrateur, un demandeur d'asile en Angleterre, cultivé et bilingue (mais âgé et jouant l'illettré) s'amuse du regard qu'il voit les occidentaux jeter sur lui. Tantôt le garde frontière, sûr-investi dans sa mission de protection de la nation face aux envahisseurs barbares de son espèce. Ensuite la militante associative d'accueil des migrants , parfois encline à se vivre comme en mission sacrificielle. Jusqu'à la gérante d'un hôtel social, négligente et en décomposition.
Le narrateur observe avec un regard acerbe les rôles que jouent les personnes qui l'entourent en Angleterre, le sarcasme de ce regard moqueur est amplifié par ceux qu'il perçoit en retour, parfois agressifs, parfois emplis de compassion, mais toujours le regard d'un blanc sur le nouvel idiot du village qu'il est bien forcé d'accueillir.
Puis l'histoire du narrateur est rattrapée par une connaissance du passé à Zanzibar qui refait surface. Le reste du livre consiste au déploiement de la vérité du conflit qui les a opposé à travers leurs deux points de vue.
Finalement, le regard que les deux personnages jettent sur leur pays d'origine et leurs proches de cette époque lointaine est encore plus sévère. Ils peignent une société stratifiée, où la bigoterie ne parvient pas à cacher les vices et le goût pour les commérages.
On ressent un besoin d'écrire un roman sans concession sur les individus, de Zanzibar au Royaume-Uni. Mais je ne sais pas bien ce que je retire de ce livre à la fin des fins.