Hop, bienvenue Mesdames et Messieurs, et retour au Club Van Helsing, après Délires d'Orphée de Catherine Dufour (excellent), Mickey Monster de Bretin & Bonzon et Freakshow! de Xavier Mauméjean (très sympas), et Tous ne sont pas des monstres de Maud Tabachnik (à chier). Cette fois-ci, c'est donc du quatrième opus de la première saison, confié à Johan Héliot, que je vais vous causer ; or il s'agit du premier volume de la collection à avoir unanimement rallié les suffrages, après un début oscillant entre catastrophique et vraiment pas top. Reste donc à voir si ce Question de mort mérite tous ces éloges rigolards, ou s'il n'a été loué que par défaut, hein, je vous le demande ?

Déjà, pour l'anecdote, premier point positif : Question de mort se lit effectivement très bien dans un train, comblant pile-poil un trajet Toulouse-Bordeaux, puis Bordeaux-Coutras. Depuis que les fascistes hygiénistes ont prohibé la sucette à cancer dans tous les trains de France et de Navarre, il faut au moins ça pour y survivre (ah, et des Ricola aussi ; moi, j'aime bien les cassis, surtout ; mais fleur de sureau, c'est pas mal, aussi ; n'hésitez pas à me faire part de vos découvertes en la matière, il faut que je renouvelle mon stock, sous peine de bouffer un contrôleur lors de mon prochain trajet ; vous conseillez quoi ?).

Bon, Question de mort peut donc faire office de roman de gare. Maintenant, s'agit-il d'un bon roman de gare ? Hein ? Je vous le demande ? Ben oui.

Décortiquons un brin. Ou, plus exactement, désossons, tronçonnons, étripons, éviscérons, mouhahahahAHAHAHAHAHAHA !!! C'est que l'on nage ici en plein dans la torture ludique qui, après avoir fait les beaux jours d'un certain cinéma de genre dans les années 1970-1980, revient en force ces derniers temps pour le meilleur et pour le pire : Saw, Hostel et compagnie, voire, sous une forme plus traditionnelle, Wolf Creek, The Devil's Rejects, Creep, Severance, et toutes ces sortes de choses. Des films qui ont le bon goût de nous rappeler que rien n'est plus jouissif que de passer ses pulsions sadiques sur un pauv' type attaché sur une chaise, surtout si le pauv' type en question est une femelle dénudée, parce que ça défoule toujours de faire couiner les putes, rhaaaaaa, salopes, uhuhuhuhu, gniiiiaaaaaaahahahahahaHAHAHA !

...

Pardon. Vous me pardonnez ? Bon, bref, l'histoire, donc (parce qu'il en faut bien une, sinon, ça ne s'appelle ni un film, ni un bouquin, mais juste un entretien d'embauche). Nous sommes aux Etats-Unis, of course. Trois maniaques tout de cuir SM vêtus prennent un malin plaisir à kidnapper des gens pour les faire ensuite passer dans une émission de TV sur le ouèbe bien particulière, du nom de « Question de mort », donc, avec un très bon concept que ça m'étonne que TF1 ne l'ait pas encore repris. Alors voilà, le grand type en cuir, là, c'est-à-dire le Sphinx, c'est un peu comme Julien Lepers, mais en plus supportable (et avec une cagoule, donc sans la vilaine trogne de caniche bouffi qui s'est fait passer pour Batman) : il te pose une question, coco ; si tu réponds juste, tu reviens le lendemain (« même si vous le voulez pas bien », aha), et c'est reparti pour un tour ; si tu te plantes, il n'y a pas de public pour faire « Hoooooooooooooooooo... », mais une tronçonneuse qui s'allume pour te couper une jambe, disons, ou bien un COUTEAU DANS L'ŒIL!, ou une autre facétie du genre, jusqu'à ce qu'il soit nécessaire de changer de candidat. Il faut toujours trois candidats, hein. Ce qui, après tout, laisse en principe quelques chances de survivre à l'émission, le marché est honnête, n'est-ce pas ?

Et vous savez quoi ? Ben ce snuff particulièrement ludique s'attire un public régulier. Mais, un beau jour (ou pas, mais on s'en fout), Big B. Biscayne tombe plus ou moins par hasard sur cette émission, ce qui change tout. Car Big B. Biscayne est un chasseur à temps plein, avec sa conception bien à lui de la justice ; et, entre deux contrats, il passe le temps en bossant pour le Club Van Helsing, à chasser du monstre ici ou là. Après avoir vu cette émission, Big B. Biscayne a de suite contacté le club : et si le Sphinx, là, c'était vraiment un sphinx ? Vous savez, la grosse bébête de l'Antiquité égyptienne, mais surtout grecque, qui aimait bien poser des questions aux Œdipe de passage ? Il y a bien, en tout cas, dans « Question de mort », quelque chose de monstrueux ; et les Fédéraux ayant semble-t-il autre chose à foutre, Big B. Biscayne se met donc en chasse, bien confortablement assis dans son gigantesque hummer, et secondé par « Boogle », son fidèle « moteur de recherche très personnel, qui était à Google ce que Wolverine était à l'Homo sapiens : plus rapide, plus résistant, et surtout foutrement plus vicieux » (p. 15).

Pourtant, comme ça, on dirait pas, hein ? Quand on voit Big B., en effet, ce n'est pas le chasseur compétent que l'on distingue en premier lieu, mais le gros tas. Mais alors le vraiment très gros tas, toujours à bouffer de gigantesques hamburgers ou ice-creams, et à jeter les sachets de sauce sur la banquette arrière ; et toujours à suer comme un vilain porc, surtout s'il lui faut marcher. Mais faut pas s'y fier : Big B. lui-même a bien quelque chose d'un monstre. En clair : ça va saigner.

Alors ? Ben chouette ! Si le rattachement au Club Van Helsing peut laisser un brin sceptique (« monstre » si l'on veut, le Club est à peine entraperçu...), le contrat est assurément rempli par Johan Héliot, qui livre un épisode joyeusement débile et gore, hyper-référencé, et tout simplement hilarant ; la caricature est cinglante, la parodie bien vue, et, s'il est vrai que « le calembour est un pet de l'esprit », l'auteur à n'en pas douter souffre d'aérophagie (rendez-vous p. 179...). Et tout ça marche très bien : de la torture, de la tronçonneuse, du plouc ricain, de l'invraisemblable (les révélations en pagaille de la fin sont à tomber par terre) et du coloré (entre rouge et noir), ça sent le vétéran du Vietnam et la sauce barbecue, la bière éventée et le gasoil, le cuir et la consanguinité. Le personnage de Big B. est vraiment très réussi (probablement le chasseur le plus intéressant de la collection avec Senoufo dans Délires d'Orphée), et l'action ininterrompue. Alors oui, effectivement, c'est pas très fin, les énigmes sont mal branlées, et y'a sans doute plein de faux-raccords, mais comme dans une bonne série B. Une très bonne, même. Oui, avec des bières et des chips, bien sûr. On n'en demandait pas plus, mais on l'a amplement, et Question de mort fait bien partie du haut du panier de cette première saison du Club Van Helsing.

Reste une question, une seule : mais putain c'est quoi que j'ai dans ma poche ?

(...bzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzz...)
Nébal
7
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le 23 oct. 2010

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