« Sa préférée » est l’histoire d’une reconstruction, celle de Jeanne, la narratrice, qui a grandi dans une famille dysfonctionnelle où le père avait la main lourde et l’insulte facile. La mère effacée tente d’offrir tout l’amour à ses filles dont une sœur aînée souvent victime des colères du père. Habitant un petit village suisse, tout le monde sait les violences dont le père est l’auteur mais les voisins préfèrent fermer les yeux et se taire.
Par le résumé du livre, le lecteur se rend vite compte qu’il va se trouver face à un récit difficile : celle des violences intra-familiales. Pourtant, son autrice, Sarah Jollien-Fardel, en a tiré une histoire menée par une héroïne forte en apparence mais dont les faiblesses la rattrapent, et ce, même après avoir quitté le domicile familial.
Ce premier roman est bouleversant par la façon dont l’autrice à de conter l’innommable où les gens vont favoriser le silence à l’action et faire comme s’ils ne savaient pas. Même si le roman ne compte que 200 pages, on n’a pas l’impression que des éléments auraient été oubliés et aucune phrase ou passage n’est superflu.
Le livre est narré par l’actrice, Lola Naymark, dont la voix douce apporte une touche solaire à la vie bien sombre de Jeanne. Dès les premiers mots, j’ai été aspirée par le récit et eu l’impression que l’actrice et la narratrice ne faisaient plus qu’une. C’est un peu comme si la lectrice incarnait en lieu et place cette héroïne, Jeanne et qu’elle nous narrait sa propre histoire personnelle. J’ai vraiment été totalement envoûtée par son brin de voix unique.
Au vu des qualités entourant ce livre, il n’est pas étonnant qu’il ait été primé au Prix du Roman Fnac 2022 et du Choix Goncourt de la Suisse 2022.