Une anthologie de quatre discours, écrits et délivrés entre 1972 et 1978, en pleine époque mystique de Dick.
J’imagine la tête de ceux qui ont assisté à ces conférences et qui s’attendaient à un auteur de science-fiction certes génial mais banal et qui se retrouvent face à une graine de prophète.
Ce bouquin prouve une fois de plus que les véritables philosophes du XXème siècle sont les auteurs de science-fiction qui, anticipant des mondes futurs, y apposent des morales nouvelles que nos descendants auront le devoir d’appliquer. Et à ce jeu là Dick est un roi, une sommité de la discipline : il explose un Heidegger, terrasse un Sartre et piétine un Deleuze.
Par l’imaginaire, la prospective, il établit les codes d’une humanité future. Le nouveau Jules Verne sans aucun doute, le mysticisme et le psychédélisme en plus.
Robot, androïde, réplicant ou cyborg, peu importe la terminologie même si chacun répond à une définition bien précise, Dick en livre une réflexion à l’aune de l’humanité. Ces simulacres inquiètent Dick et il en donne les raisons profondes !
Dieu, qu’il appelle le Programmateur-Reprogrammateur, est influence et référence constante dans son discours. L’image du poisson, symbole des premiers chrétiens persécutés par l’empire Romain, est la clef de voûte qui le maintient dans la paranoïa tout en l’en délivrant.
S’excitant sur Nixon qui est pour lui le diable, l’incarnation du mal, une émanation de l’antéchrist qui subit une punition divine par le truchement du Watergate.
Pour conclure, un livre essentiel pour la compréhension globale de l’œuvre de Philip K. Dick, souvent barrée et excessive, mais frappée du sceau de la sincérité.
Sa définition du réel est merveilleuse et implacable : « la réalité c’est ce qui, quand on cesse d’y croire, ne s’en va pas ». Et puis sa blague du patient qui dit à son psychiatre, docteur j’ai l’impression que quelqu’un met un produit dans mes aliments pour me rendre paranoïaque.
Le serpent qui se mord la queue, tout Dick y est résumé.
Samuel d’Halescourt