La rencontre entre un auteur culte et un artiste talentueux ne tient parfois qu'à peu de choses, si ce n'est à un enchevêtrement de situations qui, une fois demêlé, donne un indice sur l'origine d'une telle fusion créatrice. Dans le cas qui nous intéresse, c'est entre Andrzej Sapkowski et Timothée Montaigne que l'alchimie a pris, par le biais d'une version illustrée de la première nouvelle des aventures de Geralt de Riv : Le Sorceleur.
Parue en 1986 dans l'unique magazine de fantasy polonais Fantastyka, cette nouvelle, si elle ne rencontre pas d'emblée le succès international, attire déjà l'œil d'un public alors friand de récits de cette trempe, bien trop rare dans la Pologne soviétique. Ce n'est qu'en 1989, après insistance d'une poignée de fans et la fin du mur de Berlin, qu'une chape de plomb s'envole sur le pays, et que peut alors véritablement commencer la carrière de l'auteur,que l'on connaît désormais comme étant celle d'un homme ayant offert le best-seller de fantasy polonaise à notre monde. Après le passage d'une adaptation en jeu vidéo puis d'une série, il était enfin temps d'offrir un hommage graphique de haute volée au premier récit de notre cher Geralt de Riv, et c'est chez Bragelonne que l'on trouvera cette pépite indispensable dans toute bibliothèque qui se respecte...
L'histoire de ce récit est finalement celui du quotidien de tout sorceleur : errer de villes en village, à la recherche de contrats mis sur la tête de créatures à abbatre. Ici, c'est sur une princesse, transformée en stryge, que le le sorceleur Geralt de Riv jette son dévolu. La rencontre pourrait s'avérer mortelle, d'autant que la lumière mériterait d'être faite sur la véritable nature de ce contrat...
L'univers du Sorceleur prend ici des allures d'estampes colorées du XVème siècle, sous le trait de Timothée Montaigne, dessinateur derrière Le Cinquième Évangile ou Le Prince de la Nuit. Ici, le trait n'est pas fugace, et cherche davantage à poser des ambiances figées qu'à réellement partir dans une adaptation plus dynamique, qui nécessiterait alors le double de pages. Pour autant, cela ne joue aucunement en la défaveur du récit, qui enrobe à merveille les compositions épurées de l'artiste.
Un travail d'orfèvre, présenté dans une édition grand format en reliure solide, agrémentée d'un dos en tissu noir sur lesquel on retrouve le titre de l'œuvre, inscrit en dorure rouge sang. Un ensemble éditorial somptueux, pour un travail soigné, que demander de mieux ?