Un singe en hiver par Dominique Such
Le jeune Fouquet, père d'une petite fille et divorcé, échoue à Tigreville en Normandie. Il loge au Stella, un hôtel tenu par M. & Mme Quentin. Une amitié, qui confine à celle qui unit un père et un fils, se noue entre les deux hommes. Tous deux font des rêves d'ailleurs (la Chine pour l'ancien combattant, l'Espagne pour le jeune homme) : mais si Fouquet aime la boisson, Quentin a juré de n'y plus toucher.
Dans ce cadre spectral d'une station balnéaire normande, Un singe en hiver narre le rapprochement de ces deux êtres ; qui, à leur manière, éprouvent bien du mal à vivre dans ce monde, pétri de douleur et de solitude. Ils trouveront le réconfort, communieront, lors d'une soirée épique, où ayant abjuré, M. Quentin se saoule et entraîne Fouquet dans son délire.
"Ainsi, en Chine, l'hiver, des singes égarés se réfugient dans les villes. Quand ils sont assez nombreux, on chauffe un train pour eux et on les renvoie vers leurs forêts natales.
Le livre est en partie inspiré de la propre vie pour le moins survoltée de l'auteur. La lecture en est aisée, l'écriture limpide, nous plonge dans la période de l'immédiat aprés guerre.
Antoine Blondin, est le fils de la poète Germaine Blondin et d’un père correcteur d’imprimerie, il est un brillant sujet à l'école, collectionnant les prix et les récompenses.
Après des études aux Lycée Louis-le-Grand à Paris et Corneille à Rouen, il obtient à la Sorbonne une licence en lettres1.
Sous l'Occupation, il est envoyé en Allemagne dans le cadre du STO, qui lui inspire L'Europe buissonnière (1949). Avec ce premier roman, il capte l'attention d'auteurs comme Marcel Aymé et Roger Nimier qui lui accordent aussitôt leur amitié. Le livre obtient le Prix des Deux Magots.
D'autres romans suivent (Les Enfants du bon Dieu, L'Humeur vagabonde), qui confirment son talent de plume et la singularité d'un style se situant entre Stendhal et Jules Renard.
Journaliste engagé, il collabore à de nombreux journaux et notamment à la presse de droite et même d'extrême-droite : Aspects de la France, La Nation française et Rivarol. Il est aussi lié au groupe des Hussards : « À côté d'autres manifestations, nous étions quatre à créer une sorte de club Roger Nimier, Jacques Laurent, Michel Déon et moi2 ». Il participe à l'aventure de La Table ronde.
Journaliste sportif également, il est l'auteur de nombreux articles parus notamment dans L'Équipe. Il suivra pour ce journal vingt-sept éditions du Tour de France et sept Jeux olympiques, et obtiendra le Prix Henri Desgrange de l'Académie des sports en 1972. Ses chroniques sur le tour de France ont contribué à forger la légende de l'épreuve phare du sport cycliste.
Buvant souvent plus que de raison, il a évoqué avec des accents céliniens la passion de l'alcool dans Un singe en hiver (1959), que Henri Verneuil a adapté pour le cinéma sous le même titre.
Il a marqué le quartier de Saint-Germain-des-Prés de ses frasques, jouant à la « corrida » avec les voitures, multipliant les visites dans les bars et collectionnant les arrestations dans un état d'ébriété avancée (cf. son roman autobiographique Monsieur Jadis ou L'École du soir). À la fin, il n'avait presque plus d'amis, ni de famille. Christian Millau a raconté que ses amis en étaient venus, lorsqu'ils le croisaient dans la rue, à changer de trottoir de peur que Blondin ne les invite à boire un coup3. Seuls ses amis les plus fidèles comme Denis Lalanne ou Jean Cormier ont accompagné Antoine Blondin dans les dernières années de sa vie et venaient lui rendre visite régulièrement dans son appartement de la rue Mazarine, et au café "Le Rubens", rue Mazarine, aujourd'hui disparu.