Bienvenue chez les damnés qui bon gré mal gré ne font pas partie du "sacro-sanctifié" monde du travail, chez ceux qui bien souvent sont appelés "les assistés". Et quelle assistance ! Celle qui permet tout juste de survivre et non vivre, car quelle vie que celle qui ne consiste qu’à compter chaque franc et chaque sou pour savoir s’il va encore falloir se serrer un peu plus la ceinture le lendemain. Bien que se serrer la ceinture ne soit pas la chose la plus difficile lorsque l’on perd des kgs au fil des semaines… Une lutte du quotidien pour vagabonder jusqu’au prochain pointage, pointage qui offre cette maigre pitance, pitance qui malgré tout tient tout le monde tranquille car la peur de perdre cette denrée devenue tellement nécessaire plane au-dessus de tous, « se faire coffrer et perdre son chômage ? Tout mais pas ça. Et quand on sera cinq millions de chômeurs, on continuera à filer doux. C’est comme j’ai l’honneur de vous le dire, belle maman. Pour se mettre en rogne et passer aux actes, il faut être réduit à la vraie famine. Tant que nous toucherons dix balles, juste assez pour avoir quelque chose à perdre, nous nous tiendrons peinards, et ceux qui comptent sur nous pour faire la révolution se mettent le doigt dans l’œil ». Tel est le constat amer, dont César Fauxbras nous fait part à travers son roman.


La vie de chômeur ne se résume ici qu’à une lutte contre les fléaux que sont la radiation, la maladie, le misérabilisme, le suicide. S’ajoute à cela le mépris. De la part des bourgeois, de la part de l’administration qui rejette la culpabilité sur les chômeurs, et pire encore, le mépris de la plèbe qui mise en compétition par les capitalistes se livre à l’autophagie, « La satisfaction dérisoire de maudire les patrons, les capitalistes, les bourgeois, ennemis du peuple reconnus comme tels, m’est refusée : je suis victime d’un exploité, d’un « frère de misère » ».


Alors lorsque l’on n’a plus rien on rêve, on divague, on s’attelle aux paris hippiques imaginaires, on se promet un eldorado lointain aux îles Kermadec… C’est tout ce qu’il reste quand la promesse d’une meilleure réalité matérielle semble s’évaporer.


Puis finalement la réalité toque à la porte et la machine de destruction des êtres se remet en marche. « un inspecteur me dira que j’abuse, me fera radier, et je me jetterai du haut de la colonne de la Bastille, faute d’un revolver, ou d’un réchaud à charbon de bois. Je voudrais que la prédiction de Chédeau se réalise, qu’une guerre éclate, une bonne guerre, avec beaucoup de gaz et beaucoup de microbes, et que tout ce sale monde soit anéanti. ».


Bien que la situation économique des années 1930 soit différente à celle à laquelle nous sommes confrontés de nos jours, on remarque cependant que le traitement qui est réservé aux chômeurs est quant à lui bien similaire.

racab
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le 7 sept. 2018

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Racab LeRouge

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