Le clair-obscur d’un astre grunge

Depuis la mort de Chris Cornell, la chanson la plus connue de son groupe Soundgarden ne cesse de tourner en boucle dans ma tête.

Mais que cache ce titre mystérieux de Black Hole Sun ?

Sur le titre en lui-même, une première hypothèse vient du nom du groupe. Ce dernier est nommé d'après une sculpture de Seattle intitulée «Soundgarden». Or, sans chercher plus loin, une autre sculpture, située dans la capitale du grunge, s’appelle «Black Sun » (de l'artiste Isamu Noguchi).

Une hypothèse séduisante, mais totalement fausse. En vérité, Chris Cornell a déclaré lors d’interviews en 2014 que le titre provient de quelque chose qu'il a entendu à la télé. Il a cru entendre, à tort, le présentateur évoquer un « black hole sun ». Cornell a commencé à penser à la phrase et a décidé d'écrire une chanson autour de cette idée.

« I wrote it in my head driving home from Bear Creek Studio in Woodinville, a 35-40 minute drive from Seattle. It sparked from something a news anchor said on TV and I heard wrong. I heard 'blah blah blah black hole sun blah blah blah'. I thought that would make an amazing song title, but what would it sound like? It all came together, pretty much the whole arrangement including the guitar solo that's played beneath the riff. I spent a lot of time spinning those melodies in my head so I wouldn't forget them. I got home and whistled it into a Dictaphone. The next day I brought it into the real world, assigning a couple of key changes in the verse to make the melodies more interesting. Then I wrote the lyrics and that was similar,a stream of consciousness based on the feeling I got from the chorus and title. » (Chris Cornell, Uncut magazine d’août 2014)

De cette erreur est né l’un des plus grands hits de l’été 94 aux Etats-Unis. Le single fut vendu à plus de 3 millions d'exemplaires la même année.

« J'ai écrit cette chanson en pensant que le groupe n'en voudrait pas… Elle est devenue le plus grand succès de l'été. » (Chris Cornell, Contactmusic.com)

Le batteur Matt Cameron a qualifié la chanson comme « un départ énorme ». Effectivement, en 1995, elle remporta le Grammy Award de la meilleure performance hard rock.

Chris Cornell a présenté la chanson au groupe tout en utilisant un haut-parleur Leslie. Le guitariste Kim Thayil a déclaré que le haut-parleur Leslie était parfait pour la chanson étant donné qu'« elle est très beatlesque et dispose d'un son distinctif. L'usage de ce haut-parleur a fini par changer le morceau complètement ».

Le sens de la chanson est par contre plus énigmatique. En vérité, le chanteur lui-même explique qu’il n’y en a tout simplement pas.

« Ce n’est qu’une espèce de paysage imaginaire surréaliste, un jeu avec les mots du titre. Ce n’est qu’un jeu avec des mots, des sons. Un tas de gens ont aimé ce travail, mais ne me demandez le début d’un commencement de signification à ces lignes. Il ne faut pas prendre ce texte à la lettre. Les couplets sont beaux et faciles à retenir. A part ça, après l’avoir écrite, je n’avais aucune idée de ce que ça voulait dire. J’étais juste absorbé par la musique et je peignais un tableau avec les mots. Il n’y a aucun message. » (Chris Cornell, propos trouvés chez RTBF)

Tout au plus Cornell a-t-il bien voulu s’expliquer sur le sens d’un passage : « Times are gone for honest men »

« C’est très dur pour chacun de créer sa propre vie et sa propre liberté. Et ça ne va pas s’arranger dans le futur. Les gens seront de plus en plus désabusés, donc ils vont devenir malhonnêtes, en colère, prêts à entuber leurs voisins. » (Chris Cornell, RTBF)

La chanson offre un sentiment contrasté chez l’auditeur. Aux paroles énigmatiques se joignent une mélodie facile à retenir, propice au fredonnement.

« Personne n’a l’air de comprendre ça, mais Black Hole Sun est une chanson triste. Mais comme la mélodie est jolie, tout le monde pense qu’elle est gaie. C’est ridicule. » (Chris Cornell, RTBF)

Toutefois, la force de la chanson vient justement de ce contraste entre joie et tristesse, entre lumière et obscurité.

« What's interesting to me is the combination of a black hole and a sun. A black hole is a billion times larger than a sun, it's a void, a giant circle of nothing, and then you have the sun, the giver of all life. It was this combination of bright and dark, this sense of hope and underlying moodiness. I even liked the way the words looked written down. I liken it to Syd Barrett-era Pink Floyd, where there's a happy veneer over something dark. It's not something I can do on purpose but occasionally it will happen by accident. » (Chris Cornell, Uncut magazine)

Un contraste qui se retrouve dans la démarche même de l’artiste.

« If I write lyrics that are bleak or dark, it usually makes me feel better » (Chris Cornell,
Entertainment Weekly)

Au succès de la chason s’ajoute celui du clip qui a reçu le prix de la meilleure vidéo metal/hard rock aux MTV Video Music Awards de 1994 et le Prix Clio de la meilleure vidéo de musique alternative en 1995.

In my eyes, indisposed

In disguises no one knows

Hides the face, lies the snake

The sun in my disgrace

Boiling heat, summer stench

'Neath the black the sky looks dead

Call my name through the cream

And I'll hear you scream again

Black hole sun

Won't you come

And wash away the rain

Black hole sun

Won't you come

Won't you come

Stuttering, cold and damp

Steal the warm wind tired friend

Times are gone for honest men

And sometimes far too long for snakes

In my shoes, a walking sleep

And my youth I pray to keep

Heaven sent hell away

No one sings like you anymore

Black hole sun

Won't you come

And wash away the rain

Black hole sun

Won't you come

Won't you come

Hang my head, drown my fear

Till you all just disappear

Sources : Wikipédia, RTBF, Song facts