Broken Chairs a pour seul défaut de constituer la marotte de Built To Spill, à savoir le long morceau homérique, bourré de solos de guitare, qui vire au tourbillon électrique, au bordel sonique instable mais hautement jouissif. C'est certainement le morceau le moins surprenant du disque, car ce n'est "qu'une" longue mais imparable progression dans le bruit et la fureur. Le groupe a déjà servi cela sur les disques précédents, notamment sur Perfect From Now On. N'empêche ça envoie du bois, et ça troue le cul. C'est maîtrisé à la perfection, et la progression est fatale, ça monte, ça monte et ça n'arrête plus, entre les guitares plaintives, qui pleurent toutes les larmes de leurs corps, et les notes de piano qui émergent de temps à autre du foutoir, on a droit à un copieux morceau qui achève le disque avec grandeur, sans faiblir, en laissant un goût doux amer dans la bouche. Je n'aime pas employer les termes "épique", "lyrique" et autres trucs dans le genre pour qualifier la musique de Built To Spill, car ces mots sont souvent mal perçus et connotés de manière négative, notamment pour qualifier la musique de groupes pompeux, voire prétentieux (les deux allant souvent de paire). Or, la musique de Built To Spill est tellement brute, sincère et passionnée qu'elle est n'a rien à voir avec tout cela, mais pourtant je ne vois pas d'autres mots, la musique de ce groupe est épique, lyrique, émouvante, tellement elle est belle, intense, et vraie.