Titre en partie tiré d’une citation de Dostoïevsky: "On ne peut aimer ce qu'on ne connaît pas".
On prend plaisir à massacrer Disney, souvent à raison, sur sa vision de l’art et plus particulièrement dans sa manière de se l’approprier. Mais au-delà des 25 % de l’industrie, il ne faudrait pas réduire Disney à un groupe d’entrepreneurs, car ce sont les petits noms discrets de ces réalisateurs comme Wolfgang Reitherman (à qui on doit entre autres "Les Aristochats", "Le Livre de la Jungle","Les 101 Dalmatiens" et "Robins des Bois") qui ont fait le grand Disney. Parmi ces oubliés, il y en a un qui selon moi rayonne plus que les autres : Byron Howard. L’Homme qui a sauvé Disney après sa décennie 2000 désastreuse avec Volt (et qui fera au passage le Disney le mieux noté de la décennie sur SensCritique avec "Zootopie"), mais qu’on retiendra surtout pour son travail sur son film suivant, le premier de la décennie 2010 : "Raiponce". Aux yeux du public, Byron Howard sauve Disney et fait taire ceux qui disaient que ses dessins animés étaient sur le déclin en offrant à la firme aux grandes oreilles son 4eme âge d’or, sans doute le plus lucratif de tous. Avec "moi j’ai un rêve" on prend plaisir à rêver, à rêver d’un avenir radieux pour un des plus grands studios d’animation de l’histoire. Dès lors, toute cette nouvelle équipe devient une espèce de soldat inconnu, ceux qui résonnent à travers le nom de "Raiponce", les vrais héros, ceux qui seront oubliés mais peu importe car leur héritage est infiniment plus grand, plus profond et plus beau que tous ceux que les cinéphiles ont tendance à critiquer.
Et à titre personnel, peu de films ont résonné en moi comme l’a fait Raiponce, je pense que dès que j’ai levé les yeux pour le voir au cinéma à 6 ans j’ai compris que ce film là serait mon Disney, mon classique d’animation, et mes revisionnages ne m’ont jamais lassés où déçus, me renforçant dans cette idée.
Quand on pense à Raiponce, vient de suite à l’esprit sa chanson phare "Moi j’ai un rêve" qui symbolise le coté réellement enfantin de son œuvre, invitant même des spectateurs adultes (symbolisés par les brigands) à revenir vers cet état d’insouciance où le rêve dirigeait nos vies. Même pour moi et pendant longtemps c’était LA musique de Raiponce. Mais si Raiponce nous raconte d’une certaine façon les difficultés pour rentrer dans l’âge adulte, ce n’est pas pour rien. Et si le moi enfant reste un très grand fan des 3 premières chansons, le moi plus mature sait reconnaître qu’une autre chanson se hisse sur le trône, étant infiniment plus puissante et représentative de l’esprit de Raiponce, et ce petit chef d’œuvre oublié se nomme "Je veux y croire". Comme dans la plupart des Disney les musiques se séparent en 2 catégories, celles qui servent à présenter un arc (qu’on retrouve donc au début de l’œuvre) comme "Où est la vraie vie", ou "Libérée Délivrée" (qu’on a analysé dernièrement), souvent les plus présentes, et celles qui concluent les arcs comme "Je veux y croire" ou "Je te cherche", moins présentes et moins connues car souvent plus calmes mais pas moins puissantes (Je précise au cas où c’est une convention inconsciente et pas une règle absolue, il est en effet plus marquant de finir ou commencer un arc en musique pour que le spectateur jeune comprenne et incorpore rapidement les thèmes et grandes idées de l’œuvre. D’ailleurs un nombre non négligeable de musiques s’en détachent comme "Tout réparer" ou "Tout le monde veut devenir un cat"). "Je veux y croire" est comme dit précédemment une chanson de conclusion, c’est même la dernière chanson si on ne compte pas la berceuse de la résurrection, mais c’est paradoxalement aussi une chanson d’ouverture comme toutes les autres centrées sur le futur. Qu’est-ce qui change ? La position des personnages. Là où toutes les autres chansons de Raiponce se portent sur l’avenir sans pour autant s’intéresser au présent (Même "Ou est là vraie vie" n’est finalement qu’un appel à l’aide à un futur plus libre), on fait ici un état des lieux de ce qui a été fait, se fait et se fera. On a pour la première fois du film l’idée d’aller au-delà du rêve. Et peut être que Raiponce est rentrée dans vos cœurs avec ses rêves mais n’oubliez jamais que c’est en les surpassant qu’elle est rentrée dans la légende.
Tout ce temps, cachée dans mes pensées
Tout ce temps sans jamais y croire
Tant d'années si loin de ce monde et de la vérité
Me voilà sous le ciel étoilé
Je suis là et soudain je vois
L'avenir s'est éclairé, ma vie est à l'endroit
Comme d’habitude l’analyse se portera sur 3 points : les paroles (Françaises car je n’ai clairement pas le niveau pour l’anglais, aussi intéressante soit-elle), le clip (ce qu’il se passe durant le film pendant la chanson) et la musique (je ne prétends pas être un fin analyste à ce niveau, j’essaie juste de traduire une idée globale)
J’aime Byron Howard (je me répète beaucoup non ?), sa réalisation est parfaite. Avant même que les paroles arrivent, ils replacent le statu quo de ses personnages avant le chamboulement. On voit donc les deux protagonistes jouer à poser des fleurs sur la rivière, comme des enfants. L’eau, ici omniprésente dans la chanson représente ce monde des rêves, flou et inaccessible qui est le véritable moteur de la chanson. En moins de 5 secondes Byron Howard nous met donc sur la table les 2 piliers de ce qu’il a créé depuis une heure. C’est d’ailleurs pour ça que Raiponce ne réagit qu’après le plan dans la réalité, et non quand elle voit la première lanterne s’élever par le reflet de l’eau. Les paroles elles même commencent bien quand Raiponce voit son rêve (plus précisément quand on la voit lever les yeux vers le ciel, marquant donc l’accomplissement de son rêve) et non quand on voit le dit rêve qui arrive la scène d’après (car on considère que le reflet dans l’eau ne vaut rien, étant la représentation des fantasmes de Raiponce) montrant que cette fête des lumières n’est finalement qu’un prétexte et un décor pour poser une réflexion sur ses deux protagonistes. On peut voir ensuite une réaction tout à fait enfantine de Raiponce, en essayant de s’élever comme si ça allait lui permettre de mieux voir la scène ; on reconnaîtra deux autres utilités à cette action, la première étant de la mettre seule en premier plan entre ciel et mer (ses rêves et sa réalité) là où elle partageait l’image avec Eugène Fitzherbert (Je vois que ça vous énerve, mais c’est son vrai nom mais aller, pour vous faire plaisir je l’appellerai Flynn Rider à l’avenir) et le bateau, et la deuxième, beaucoup plus métaphorique et sujette à interprétation mais c’est le caractère enfantin de Raiponce qui a bousculé la vie de Flynn, comme on le voit déstabilisé et surpris par l’action. J’aime beaucoup le moment qui suit, car la réalisation s’accorde parfaitement avec les paroles : après avoir vu une image lointaine (finalement pas bien différente de ce que voyait Raiponce depuis sa tour), on contemple pour la première les lumières avec "la vérité", où cette simple lumière lointaine est rejointe par toutes les autres, comme pour valider que ce qu’on regarde est bien réel; "me voilà" ramène bien sûr à elle une dernière fois avant une longue scène de contemplation, montrant une fois de plus que ce qu’elle contemple n’est pas que son rêve, mais bien son être; la réalisation revient sur les lanternes quand elle chante "Le ciel étoilé" car à ce moment de la chanson, qui parle de son passé puis de son présent*(dans les 3 derniers vers et la partie suivantes)*, les lanternes agissent comme des étoiles, qui la guident (les étoiles étant des repères notamment en navigation, pas besoin de rappeler qu’elle est sur un bateau et qu’en extrapolant, elle est un peu une explorateur d’un monde dont on l’a isolée, monde qu’elle explorera toujours en se référant aux lanternes, ici donc agissant comme des étoiles); "l’avenir" intervient quand on montre le château (seule scène d’exposition ou les lanternes ne sont pas centrales) comme pour amorcer une fin heureuse au spectateur (alors seul dans la confidence quant au vrai statut de Raiponce); et pour finir si vous regardez bien on ne voit jamais les lanternes (et non leurs reflets dans l’eau) et Raiponce sur le même plan sauf quand elle dit "Ma vie est à l’endroit", ce qui est une annonce d’un retour au calme dans la vie de Raiponce, qui, par la liberté, a enfin trouvé la paix, cet évènement n’étant finalement que le symbole de cette dite liberté mais qui est aussi en total opposition avec l’idée que ce qui se reflète dans l’eau représente ses fantasmes, avec ce plan, Raiponce prouve qu’elle est dans le vraie monde. Vous remarquerez d’ailleurs que dans ces scènes d’expositions des lanternes, la réalisation essaie au maximum de masquer le reflet des lanternes, comme pour montrer qu’on est dans le vrai monde, en se projetant plus sur l’infini du ciel que sur l’infini profondeur de la rivière.
Au niveau des paroles on remarque d’entrée de jeu l’anaphore "Tout ce temps" qui est un élan nostalgique vers le passé du personnage qui s’intensifie passant d’une fuite la réalité dans ses rêves au vers 1 à tout simplement un refus que cette dite réalité existe au vers 2. Étant donné que les paroles de la chanson fonctionnent sont sous forme de base 3, on pourrait s’attendre à la continuité de cette anaphore, sauf que non. A la place le film va augmenter en intensité l’anaphore elle même (on passe d’un temps imprécis à plusieurs années) pour faire une conclusion de ce qui a été dit plus tôt ("vérité" renvoie à sa vision basé sur le rêve et "monde" à son isolement, les deux aussi amplifiés par le "si loin" dans le but d’amplifier encore le tout) mais cette fois-ci cette sur-intensification signifie que ce temps est révolu. Raiponce va justement le prouver en s’affirmant "Me voilà" puis "Je suis là". Comme précédemment, on est sous forme de base 3 vers, avec un ciel éclairé (vers 1) qui lui permet enfin de voir (vers 2) son avenir se dessiner (vers 3). On remarquera aussi l’importance du thème de la vision dans cette chanson. Elle était "cachée", les autres ne la voyait pas mais elle ne voyait pas ce monde non plus, là où dans les 3 vers qui servent de transition vers le présent elle "voit" un avenir "s’éclairer". Attention tout de même, la vision dont on parle n’est pas au sens propre la vue, (même si la réalisation et les paroles jouent clairement sur cette polyvalence de la vision), mais bien le regard biaisé voir enfantin de nos protagonistes sur le réel.
La musique se fait discrète dans cette première partie, le but reste de ne pas cacher la voix de Raiponce ni de diminuer l’envol des lanternes qui se veut doux et majestueux. Les cordes sont très douces car elles représentent l’enfant émerveillé. (Vous savez à quel point c’est compliqué de retrouver les instruments qui composent une musique ? Nan parce que c’est quand même plutôt galère) On va remarquer deux courants principaux dans cette première partie : les cordes pincées (je suis presque sûr qu’il s’agit d’une guitare sèche et peut-être d’une harpe) et les cordes frottées (je suspecte un mélange de violons et de contrebasses), les premières représentes le narrateur (ou dans ce début la narratrice) et les secondes le rêves. Le texte se centrant surtout sur le passé de Raiponce, on va voir une domination des cordes pincées tout du long avec une montée en puissance progressive des cordes frottées ou elle va un peu ressurgir sur certains points : On les perçoit réellement quand Raiponce commence à voir son rêve ; Un espèce d’écho quand Raiponce rejoint maladroitement son observatoire, écho qui ressurgis de façon beaucoup plus visible quand on commence à parler de contemplation ; Il se stoppe quand elle revient sur elle (dernier vers).
Et je suis toute éblouie
Car enfin la brume s'est levée
Et je suis toute éblouie
Les lumières scintillent partout
L'air est doux, je me réjouis
De sentir le monde avancer
Le vers 7 "Et je suis toute éblouie" se juxtapose avec l’aboutissement des scène de contemplation représentées par un plan d’ensemble. On peut alors faire le rapprochement entre la brume et ce qu’elle ne voyait pas depuis sa tour, ainsi qu’entre les lumières qui "scintillent partout" et les personnes lançant des lanternes plus que les lanternes elles mêmes (encore une fois juxtaposé avec les paroles). Je ne pense pas trop me tromper la dessus surtout que c’est une réponse directe au passé du vers 3 "si loin de ce monde et de la vérité", où elle se montre libérée de sa solitude et de sa réalité biaisée. Les deux premier plans de contemplation sont en plus trompeur car au-delà des lanternes qui ont envahit l’espace, ce qu’on nous montre c’est bien le royaume (dans lequel elle est libre : son avenir) puis les gens jusque là absents ou cachés par les lumières. Les 2 scènes suivantes nous présentent une Raiponce heureuse (première fois de la chanson qu’on l’a voit heureuse car elle était jusqu’à présent époustouflée par le spectacle), car on nous fait comprendre qu’elle réalise qu’elle vient d’accomplir son rêve, on le voit d’ailleurs par le prisme fantasmé de la rivière, mais c’est bien vers le ciel que regarde Raiponce. On voit ensuite Pascal dans la même position qu’elle, montrant au spectateur qu’il a lui aussi réalisé son rêve. Mais alors quel était le rêve de Pascal ? Sa posture ne laisse aucun doute : Celui de voir Raiponce heureuse. Pascal a beau oscillé entre présence humaine et présence animale durant tout le film, ça n’en reste pas moins la plus bienveillante du film, voir même de tous les Disney confondus. Et pour finir la dernière scène symbolise d’une certaine façon Raiponce qui s’envole de son nid plus ou moins familiale, à l’instar des lanternes.
On attaque donc ici le vrai présent de Raiponce qui sonne presque comme un refrain car plus cour et plus entraînant (à l’opposé d’un passé calme, qui serait presque triste si non révolu et dans une chanson moins portée sur l’avenir), en témoigne le rythme des paroles en 2 vers (contrairement à la première partie basée en 3 vers). "Éblouie" (définition : Troubler la vue par un éclat, une luminosité insupportables.) peut sembler en opposition avec "la brume s’est levée" (j’y vois plus clair) mais la vision dont on parle bien de l’âme, donc les lumières des lanternes et plus généralement ce décore l’éblouissent, la subjugue ce qui dissipe son avenir troublé, voir le concrétise. Le vers 1 est également une anaphore puisqu’il est répété au vers 9, qui pour le coup reprend vraiment le sens initial du mot "éblouie" en parlant de différents points de lumière ; même si c’est encore une fois un double sens, elle est subjuguée par toutes ces lumières, elle contemple, elle n’est pas aveuglée. J’aime à penser que le termes "éblouie" et "partout" et surtout l’antithèse entre éblouissement et révélation ne sont pas anodins, et résultent plus dans l’idée que même si l’avenir et devenu plus clair et radieux, il n’en est pas moins incertains (dans le sens ou il n’est pas écrit à l’avance) car même plus adulte on ne maîtrise pas tout, et surtout son futur qu’on va devoir construire. Je le répète encore mais cette scène d’exposition ne vise en fait qu’à revenir sur Raiponce, que ce soit par les "Je suis" qui réaffirment sa présence constamment et même au vers 11 ou elle redevient maître du décor, par l’anaphore brisée qui marque la fin de l’éblouissement (elle s’attarde sur un évènement extérieur au spectacle à "l’air" "doux"), de son rêve, réaffirmant sa joie vis à vis de ses nouveaux avenirs qui s’offrent à elle. Ce n’est d’ailleurs pas le monde qui avance mais bien le sien, qui a enfin retrouvé un rythme normal. Et si on utilise le mot "sentir" au lieu de voir (thématique tout du long de la vision) c’est dans un but de mélanger incertitude et espoir : elle ne perçoit pas clairement son futur mais elle sait qu’elle progresse et qu’elle veut continuer dans ce sens.
Je suis toujours autant une quiche approximative en analyse des sons. Mais on peut déjà voir que c’est Raiponce qui dicte la force de la musique par sa voix. Le protagoniste est en quelque sorte le reflet de la musique, qui ne va suivre que ses émotions. Mon analyse a l’air de se confirmer, car les cordes frottées prennent l’ascendant, surtout dans les "Et je suis toute éblouie". On a aussi droit à quelques notes de piano par moments, je ne leurs trouve pas une valeur symbolique particulière, mais j’imagine qu’elles ont été placées ici pour rappeler la douceur de la scène (un peu cassée par les grandes envolées des Cordes Frottées) et ainsi commencer à développer une atmosphère bucolique voir romantique.
Maintenant tout semble différent
Je veux croire en vous
Finalement tout ce qui a été présenté ne sert qu’à mettre ne valeur ces deux lignes, et plus particulièrement la première. Car si on avait une sorte de reniement du rêve ou plutôt du fantasme, on n’en fait pas non plus un réquisitoire, car comme prouvé depuis le début du film suivre ses rêves conduit à un changement individuel bénéfique qui nous conduit à devenir plus adulte, mature. Qu’est-ce que va faire Raiponce maintenant qu’elle a réalisé son rêve ? Voilà pourquoi elle se détourne de sa contemplation de l’accomplissement de son rêve. Le regard qu’elle porte n’est pas triste, mais plein de questionnement, elle se demande vers quoi elle doit tendre pour son avenir, d’où le retour des reflets des lanternes dans l’eau, elle cherche un nouveau rêve. Cette réponse à ce questionnement va venir toute seule, peut importe son avenir, elle veut qu’il se fasse avec Flynn, l’homme qui l’aidera toujours à accomplir ses rêves. Vous remarquerez d’ailleurs que ce moment se termine par un travelling vers Flynn, donc présenter comme la réponse, portant 2 lanternes, leur avenir au moment ou rêve et réalité se mélangent pour devenir flou, son avenir Flynn devient donc la seule chose sûre dans ce futur incertain (toutes les lumières autour sont floues) et non écrit à l’avance. Raiponce ne découvre pas son amour pour Flynn car leur relation se construit depuis leur première rencontre, d’où la phrase de charmeur décalée et comique de Flynn quand il se réveille, Elle va cependant avouer son amour pour Flynn au spectateur.
"Maintenant" pose un ton plus calme car il pose une réflexion sur l’avenir, voilà ce qui a été fait et est fait, que se fera-t-il ? "Tout semble" renvoie encore sur le thème de la vision, mais paradoxalement le mot "tout" ramène à elle sa perception de ce monde et non à celui de son rêve. Au début elle est cachée, elle voit mal son rêve ; elle peut enfin le voir, redonne un sens à sa vie ; la beauté l’éblouie, elle est submergée par son rêve ; maintenant qu’elle a vu son rêve tout semble différent, elle n’a plus une seule étoile à suivre et commence réellement à s’intéresser au monde qui l’entour, et à Flynn. Le "vous" du vers 14 représente autant Flynn que l’avenir dans ce monde qu’elle a découvert au fil des rencontres et des lieux qu’elle a du traverser pour atteindre son rêve."Croire" est ici en opposition au rêve, Raiponce ne veut plus simplement rêver, elle veut croire en un avenir, réaliste dans lequel elle pourra s’épanouir. Elle ne veut plus être portée par son rêve mais bien construire son avenir, avenir qui se fera avec Flynn.
Malgré mon talent toujours aussi peu précis je vais continuer de filer les métaphores. Dans le premier vers de cette troisième partie on retrouve la même disposition que dans la première partie : je pense que ça vient d’une part car Raiponce est à la recherche de son futur (elle se détache du rêve pour réfléchir) et d’autre part car cela crée l’attente d’un resursaut des cordes frottées (du rêve) ; ce nouveau sursaut arrivera, mais tout de même moins puissant, car ce nouveau rêve de Raiponce répond à un contexte beaucoup plus réaliste, elle domine donc son avenir.
-"Oh, J’ai quelque chose pour vous moi aussi
J’aurai du vous le donner plus tôt, mais j’avais peur
Et c’est curieux, mais maintenant je n’ai plus peur, vous comprenez ?"
-"Je commence à comprendre"
Beaucoup d’analystes oublient ce dialogue incrusté alors qu’il n’en reste pas moins essentiel à la compréhension du texte voir central à la chanson et surtout au pourquoi du comment Flynn qui se moquait des chansons et de la poésie dans "J’ai un rêve", refusant même de chanter, en vient à suivre Raiponce dans la chansonnette.
Raiponce va commencer par continuer à agir de façon enfantine quand elle revient vers Flynn, car l’enfant en elle n’est pas mort, sa prise de maturité ne l’a pas transformée, mais juste évoluée vers une forme plus mature, mais de toute façon elle ne pourrait tuer l’enfant en elle car c’est l’un des messages du film évoqué avec "J’ai un rêve" : l’enfant en nous ne meurt jamais, on le cache juste avec nos regrets et nos tristesses. C’est d’ailleurs là que la dualité entre Raiponce et sa fausse mère est la plus forte, car on oppose l’acceptation de la vie, du temps et des rêves qui évoluent à un ersatz de vie, qui n’a pour vocation que d’être même si cela lui vaut d’être caché de la réalité et des autres, une vie qui n’en est pas réellement une. Mais je m’égare, et ce film est tellement bon qu’il est aisé de sortir des sentiers battus pour en explorer les recoin mais si je m’attardais sur chaque détail, non seulement on ferrait une analyse de tout le film et en plus j’en perdrai la moitié dans une critique d’un bon million de caractère (je ne sais même pas si j’arriverai à la finir) alors revenons au sujet.
Cette scène montre une Raiponce toujours enfantine certes mais plus calme et plus mature, en témoigne l’opposition avec la première scène ou elle se déplace n’importe comment sur le bateau ; elle est ici comme un enfant sage attendant de clôturer son rêve. C’est aussi pour ça qu’elle donne la couronne à Flynn maintenant, elle suppose que les 2 vont pouvoir réaliser leur rêve ainsi. On a donc deux invitations : celle de Flynn à Raiponce qui par le prisme des lanternes l’invite à faire partie de ce monde (que Raiponce bien évidemment accepte en le rejoignant) puis celle de Raiponce à Flynn, qu’il refuse, car sa vraie récompense est celle qu’il dévore des yeux, ne daignant pas lâcher un regard (bon d’accord, un petit regard, mais celui-ci est surpris comme si il l’avait oublié, voir triste comme s’il comprenait ça clôturait leur aventure, ce regard s’oppose d’ailleurs à celui de Raiponce qui à l’air de chercher à trouver le bonheur dans les yeux de Flynn), la remettant sagement à sa place. En ne prenant pas la couronne, symbole de son lui passé, il montre qu’il a lui aussi évolué. Ce geste c’est la victoire de l’amour, une des plus belles déclarations, auquel la princesse de son cœur répond par un sourire et un regard qui acquiescent bien plus que des mots.
Ce petit dialogue commence par une Raiponce qui se montre attentionnée, en lui rendant sa sacoche elle essaie de se mettre au même niveau que lui, d’une part en se rabaissant ; elle lui donne de l’attention, tout ne tourne plus autour de son rêve à elle, elle partage le premier rôle. Et de l’autre en s’élevant : tout comme Flynn qui ne la suit plus pour la couronne depuis longtemps, elle ne le suit plus que pour son aide, mais pour lui. Ça lui permet en plus de se dés-infantiliser d’une certaine façon pour devenir son égale, son amante. Elle va ensuite, dans les deux lignes suivantes reconnaître son erreur quant à la lenteur de sa reconnaissance pour lui toute en la justifiant par une tournure enfantine amplifiée par la répétition des termes et la simplicité à comprendre (qui expose un certain manque de vocabulaire, typique de l’enfant qui apprend et non, ça n’a rien a voir avec le fait que je place rêve et avenir dans chacune de mes phrases) "plus tôt j’avais peur"/"maintenant je n’ai plus peur". Cette tournure a l’air très simple, mais l’absence de COD la rend en réalité très complexe et sujette à interprétation. De quoi avait-elle peur ? De lui ? De l’inconnu ? De la liberté ? Elle même ne doit pas en être sûre car elle essaie de lui expliquer ce sentiment toujours de manière enfantine "c’est curieux"/"vous comprenez ?" comme si elle n’était pas maîtresse de sa pensée. L’amour la dépasse. Contre toute attente Flynn utilise le même procédé pour se mettre à son niveau : il se réduit pour comprendre ce que son esprit enfantin essaie de transmettre et ce sans jugement ("commence" montrant qu’il est aussi perdu qu’elle) mais s’élève pour se montrer digne d’être son amant, (il utilise "comprendre" pour lui signifier qu’il est sur la même longueur d’onde qu’elle) il démontre même une certaine admiration. Le ton très sérieux prouve en plus qu’il arrête de se détacher de ce monde, il refuse de rester le voleur libre car ce rôle fait de lui un homme aussi loin du monde et de la réalité que Raiponce. Son amour va l’amener à se projeter avec elle. Si ce dialogue est central, c’est car on comprend ici que le chemin parcouru par Flynn et Raiponce est finalement le même, d’où le parallélisme qui structure la chanson et dont on voit les premiers aperçus dans ce dialogue pourtant à première vue anodin.
C’est rebelote pour la partie avec laquelle j’ai le plus de mal, la musique en elle même. On fait donc ici face à un nouveau genre d’instruments : les vents. Quand on regarde les moments où elle est dominante dans la chanson, on peut supposer que ça représente la relation des deux personnages. Le dialogue va musicalement se séparer en deux : Une première partie dominée par les vents auxquelles vont s’ajouter les cordes frappées, frottées et tapées en fond, c’est donc une discussion mettant en avant leur relation dans un cadre romantique (piano), bercé par le rêve (cordes frottées) mais surtout où ils sont eux-mêmes (guitare sèche), et une deuxième où Flynn et Raiponce se laisse rêver avant que ne commence à chanter Flynn, en quelque sorte ils se laissent rêver tous les deux d’un avenir commun.
Tout ce temps, à rêver jours et nuits
Tout ce temps, à chasser l’ennui
Tant d'années sans voir ni comprendre
Le monde et la vraie vie
Elle est là, sous le ciel étoilé
Je la vois et soudain je sais
L'avenir s'est éclairé, je devine où je vais
Lui qui ne voulait ni chanter ni danser dans "J’ai un rêve" se laisse donc emporté par son amour. En terme de réalisation, on va commencer par l’envol des lanternes de Flynn et Raiponce qui vont se mettre à danser, signifiant un avenir en commun qui les améliore, les porte vers le haut. On peut en plus rajouter que la danse évoquée est une valse (dont voici un extrait pour vous faire plaisir) ce qui est bien entendu un sous-entendu amoureux puissant, s’opposant complètement aux paroles à ce moment là mais nous en reviendront plus tard. L’intérêt de revenir sur Flynn alors qu’est utilisé le pronom "elle" avant de passer sur Raiponce est pour prendre son regard, son point de vue ici descriptif. Comme Raiponce il contemple son rêve, son avenir (Raiponce est la seule chose qui n’apparaît pas floue sur l’image, c’est évidemment un parallélisme avec la scène du "Je veux croire en vous"), qui n’est pas la couronne mais bien la princesse de son cœur, cocasse quand on sait qu’il finira par devenir réellement prince. On peut d’ailleurs voir qu’après avoir admirer leur danse dans le ciel il va lui porter un regard romantique, limite amoureux. La Raiponce qu’il contemple est bien celle enfantine (au vu de la posture qu’elle adopte et de son air rêveur là où Flynn porte un regard passionnel dans sa contemplation) mais aussi mature : elle regarde la réalité, les vrais lanternes, elle porte donc un regard rêveur sur la réalité et non à l’inverse un regard réaliste sur ses fantasmes comme depuis le début du film. On l’observe ensuite, toujours dans une gestuelle enfantine marquée par son excitation et une certaine maladresse (plutôt un maque de droiture) qui lui donne un charme indéniable, sauver une lanterne de l’eau (le fantasme) pour l’élever et donc la rendre réel. Cette lanterne c’est évidemment le symbole de leur amour c’est pour ça que "l’avenir s’est éclairé" car Raiponce accepte cet amour en le rendant réel. On remarquera en plus que ce moment est dominé par les vraies lanternes et non leur reflet, marquant la victoire du réel dans leur relation bien-sûr agrémentée d’un peu de rêve. Et pour finir il devine où il va en prenant la main de Raiponce qu’il invite à prendre part à son présent, et donc à la suite de la chanson et de sa vie. A ce moment, le regard de Raiponce peut laisser perplexe, alors laissez moi décrypter tout ça. Depuis le début on a des preuves d’amour qui ne vont que dans un sens (jeu de regard), ou chacun découvre ses sentiments pour l’autre, puis une espèce de petite déclaration à demi mot lors de la scène de la sacoche. Par ce geste, Flynn concrétise les non dits, ce qui étonne tout d’abord Raiponce ; la scène commence par se centrer sur le geste et non sur elle avant qu’on puisse voir son air étonné, étonnement qui se redirige vers Flynn : elle cherche une réponse (Raiponce cherche une réponse, keskonsmar) à son acte, en voyant son regard amoureux (supposé car le spectateur ne peut le voir) elle comprend ses intentions et l’interrogation laisse place à la joie (elle commence à sourire avant de chanter) ou elle décide donc de le rejoindre pour qu’il puisse chanter ensemble, symbole d’un avenir commun.
Au niveau des paroles on a évidemment un parallélisme avec la première partie de Raiponce, on reprend même cette anaphore qui se casse sur la fin, mais qui est ici contrebalancée avec tout ce qui a été fait et dit avant et bien sûr la réalisation de la métaphore de la danse des protagonistes. On apprend donc que comme Raiponce, Flynn passait son temps à rêver, qu’il était donc déconnecté de la réalité mais pire encore au vers suivant où on comprend que ses rêves ne menaient à rien car sans réels valeurs de progression de la maturité, n’étant créés que pour "chasser l’ennui". On nous révèle pour la première fois une figure plus enfantine d’un personnage qui n’a jamais su être connecté au réel, dans les faits même pire que Raiponce car celui-ci a agis ainsi par choix et non sous la contrainte et aussi car ses rêves à lui n’allait nul part et était de véritables illusions protectrices. Contrairement à Raiponce il ne prend pas le rôle de l’enfant mais celui de l’adolescent refoulé donc dans les faits moins enfantins mais aussi bien moins forts car non assumés. Il admettra lui même que s’il vivait "sans voir" comme Raiponce, il vivait surtout "sans comprendre" le monde. Il parlera de "vraie vie" et non de "vérité" car contrairement à elle il la voyait et la connaissait, il préférait juste se baigner dans une fausse vie qui le protégeait, d’où la distance humoristique qu’il a mis avec le monde qui l’entoure. Le vers 18 (si je ne me trompe pas) est bourré de double sens. Déjà "elle" peur mettre le doute entre la couronne et Raiponce, chose qu’en vérité on devine tous aisément surtout grâce à la réalisation. Mais c’est surtout la possibilité entre la contemplation de Raiponce au milieu de la nuit ou "elle" sous le ciel étoilé, ciel sans étoiles donc on fait référence au lanternes ici symbole de vérité/réalité. "Elle" reste Raiponce mais n’est ici plus passive ni sujette à la contemplation car se positionnant en sauveuse qui a placé ce jeune homme perdu/en détresse sous les lanternes donc la vérité. Raiponce est donc ici à la fois contemplée et salvatrice, à la fois princesse et chevalière, cet amour qu’elle lui offre devient donc l’avenir idéal et le seul bon dans la "vraie vie" qu’il souhaite. Comme nous le montre le vers suivant, ce retour à la réalité est brutal ("soudain") mais certain ("je sais" rentre en opposition avec "sans comprendre"). Au dernier vers de cette partie (il me semble que c’est le 20), on a donc encore une fois un avenir qui s’est éclairé, jeu de mot entre la signification littéral française et le fait que l’avenir, sera dans la vrai vie car se créant autour des lanternes symbole du réel. Le mot "devine" laisse planer son incertitude partielle, parce qu’il n’est sûr que d’une chose, le chemin qu’il prend sera celui de Raiponce. On retrouve encore une fois ici le thème de la vision : Il ne voit pas la vraie vie/la nuit éclairée lui montre la voie/Une fois éclairé il perçoit enfin son avenir.
Au niveau de la musique c’est encore une fois assez élémentaire, la partie est dominée par un mélange de cordes frottées et de vents (de cuivres si mon oreille est bonne) signifiant que Flynn cherche en sa relation avec Raiponce un nouvel avenir, un nouveau rêve.
Et je vois dans ce regard
Que le voile enfin s'est levé
Et je vois dans ce regard
Que les lumières brillent pour nous
Et dans la douceur du soir
Je sens que le monde a changé
Avant même de commencer à chanter, Raiponce donne son autre main à Flynn, comme pour lui signifier que cette amour est réciproque. Le spectateur se fait ensuite éjecter de la scène (il n’a plus un regard de face sur ses personnages), il est obligé de les regarder se regarder, comme pour leur laisser cette scène intime. Encore une fois cette scène mélange lanterne et reflet : C’est un nouveau rêve d’avenir, mais cette fois-ci plus mature car se baignant dans la réalité plus que dans le reflet. Cette idée d’intimité est renforcée par le regard de Raiponce qui ne quitte pas celui de Flynn même dans le dézoome. On va même quitter nos protagonistes pour ne garder d’eux qu’une image symbolique : les 2 lanternes qui dansaient ensemble n’en forment maintenant plus qu’une, comme leur avenir qui décolle pour quitter le reflet de l’eau et ainsi devenir complètement réel (il n’y a plus de reflet à la fin du travelling). Réel encore une fois placé face au château, comme pour prophétiser leur avenir.
En chantant ensemble ils s’avouent ouvertement et oralement leurs sentiments, chacun voit dans le regard de l’autre la preuve irréfutable de son amour, regard que n’est pas permis de voir le spectateur car exclu, renforçant le caractère intime et laissant place à notre imagination hyperbolique quand à la profondeur de leur sentiments. Parler du regard n’est pas anodin, il est le miroir de l’âme et de fait, c’est dans celui si qu’on va chercher les émotions les plus fortes et les plus intimes. Encore une fois on peut faire un parallèle avec la deuxième partie : "éblouie" laisse place à "voir" l’incertitude laisse place à la certitude. Jusque là les phrase était tournée autour du "je" (ce que ressent la personne) et du "il" (valeur de contemplation/description), mais la pluralité des 2 "je" ici unis forment ici un "nous", qui nous est signifié vers 25. Autant le voile n’est pas seulement celui de Raiponce, mais aussi celui de Flynn autant les lumières ne brillent ni pour la première (qui rêvait de les voir) ni pour le deuxième (dont c’était la condition pour récupérer la couronne) mais bien pour leur révéler leur amour. Le but de cette lumière n’était pas tant d’accomplir le rêve de Raiponce que de lui annoncer la réalité par la un avenir éclairé avec celui qu’elle aime. Et on pourra remarquer que les lumières ne brillent plus "partout" mais "pour nous" exposant une fois de plus les retrouvailles avec la réalité et donc l’évidence de leur avenir commun. Pour revenir au thème de la vision comme dit plus tôt "voir" a une valeur de certitude quand à leur amour commun, car le "voile" qui bloquait leur vue, qui les faisait évoluer dans deux mondes différents est ici levé, en opérant un retour vers la réalité ils peuvent enfin communiquer sans filtres. Ces mêmes lumières teintées de réalité qui ont éclairée leur avenir leur font miroiter un avenir commun. Encore une fois toute la structure de la deuxième et de cette partie son miroir (anaphore face au rêve/elle peut enfin voir/anaphore/la réalité brille/recul sur la situation avec un sentiment de douceur/sentiment du monde qui avance). Les deux derniers vers ne dérogent pas à la règle, étant même les plus proches de leurs homologues miroirs. On reprend "doux"/"douceur" mais si c’était pour présenter la complaisance de Raiponce dans son rêve (c’est l’air qui est doux, elle s’en réjouit), c’est ici pour prouver qu’une page se tourne (le "soir", la fin de la journée ou a commencé le film, mais aussi et surtout la fin du rêve de Raiponce et de la fuite de la réalité de Flynn) mais que cette fin est acceptée (d’où l’utilisation du mot "douceur") car elle signifie le passage à une nouvelle page, plus belle. Dans la même idée "le monde" (qui est en réalité leur perception du monde d’où l’importance du ressentiment indiqué ("sens"/"sentir")) qui ne faisait qu’avancer se retrouve ici "changé", car cette nouvelle vision du monde, à deux, brise le statut quo. On peut aussi remarqué que la Raiponce se laissait bercé par son avenir laisse place aux protagonistes agissant sur ce changement, d’où l’utilisation de la première personne du singulier "je".
On retrouve cette idée de refrain (qui va en accord avec l’effet miroir) dans le rythme, et c’est voulu ainsi car c’est comme si cette réalité les éblouissait comme Raiponce devant les lumières. On retrouve d’ailleurs les cordes frottées pour le rêve qui sont si fortes qu’elles cachent tous les autres mouvements.
Maintenant tout semble différent
Je veux croire en vous
Je veux croire en nous
On revient sur le couple, même si on en est encore exclu, ne les percevant que de l’extérieur. Il se rapproche l’un de l’autre encore une fois entre rêve et réalité par la métaphore des lanternes, mais toujours dominé par le réel, car c’est le principe même du "croire" (réaliste mais tout autant plein d’espoir) opposé au "rêve" (qui lui a un pied dans le fantasme). Ce rapprochement de deux personnages s’aimant et annonciateur d’un baisé (annonce aidée par le décor bucolique, romantique), preuve symbolique d’amour ; Pascal, représente l’enfance et même par projection un spectateur enfant, qui subit un paradoxe d’être à la fois extérieur à l’amour romantique (il se cache les yeux, il ne veut pas voir), mais sensible, il comprend et peut le percevoir, d’où le passage au rose. En résulte un mélange de honte, de curiosité et de voyeurisme, comme nous il refuse d’être exclu de la scène, et ne peut s’empêcher de jeter un regard. La réalisation cède donc à nous cacher cette intimité, en décidant de faire le choix intelligent de nous présenter les personnages par leurs regards certains et dénués de signes de leur comportement habituels car uniquement focalisés sur l’être aimé. C’est encore une fois un signe de déclaration amoureuse sans utiliser le lexique de l’amour, que l’on s’amuse depuis le début à représenter sous d’autre formes physiques ou orales mais pas tant pour tourner autour du pot que pour donner un sens naturel et consentit des sentiments (On découvre pourquoi ils s’aiment, cet amour ne sort pas de nul part). Cette démarche a aussi pour vocation d’opposer (ça fait beaucoup de fois que j’utilise ce mot, alors changeons un peu) de confronter la vision de l’enfant (Pascal) à celui de l’adulte/adolescent car ceux-ci n’ont ni peur ni honte de leur sentiment, allant même au-delà de l’acceptation, je pense qu’on peut parler de certitude et d’espoir car l’espace d’un instant (je parle bien uniquement de cet instant) ils s’abandonnent (perte du détachement à la réalité de l’un et du caractère enfantin de l’autre) pour se dévouer corps et âmes à cet amour, démontrant la sincérité de leurs sentiments. La réalisation ne nous laisse cependant admirer qu’un peut car elle nous réexpulse à l’extérieur du bateau (bateau qui peut être métaphore de leur nouvelle histoire ensemble qui se situe dans la réalité mais portée par des rêves). La réalisation va à la toute fin se décaler, masquant le visage de Raiponce. Mais là ou on pourrait penser à un cassage de l’égalité entre les personnages il y a en fait une valeur symbolique. Déjà l’inverse aurait été étrange car il n’y aurait pas de changement (récit focalisé sur Raiponce) alors que là on invite Flynn a devenir également personnage principal. Mais en fait l’idée n’est pas tant de masquer Raiponce que de nous montrer le regard de Flynn : car c’est (aux yeux du spectateur) le plus sensible des deux à tromper (dans le sens mentir à) l’autre, même involontairement, de part ses antécédents. Et si vous regardez bien, il ferme les yeux après Raiponce (si si regardez bien à 3min24) même si je l’accorde ce n’est pas flagrant. (Et si vous venez me dire que je verse dans la sur-analyse et bien...peut-être. Je ne suis malheureusement pas dans la tête de Byron Howard, mais ce genre de détails ne sont pas ici gérés par les acteurs mais bien par les animateurs donc indirectement par le réalisateur. Et je pense que ce n’est pas un hasard non plus car normalement ils auraient du les rendre symétriques lors de l’animation 3D, et cet ultime travelling n’aurait donc eu aucun sens. Et si vous vous demandez combien de fois j’ai vu le clip pour voir ce détail...trop, beaucoup trop de fois). D’une certaine façon elle prouve son amour en lui faisant confiance (se prive de sa vue), et devant elle, il choisit, pour la première fois, d’agir comme un prince charmant. Devenant tout puissant, il ne va ni voler la couronne, ni s’enfuir mais faire ce qu’elle veut, il l’a guide, sans jamais s’opposer à elle, cette main sur son visage (continuité de celle prenant la main de Raiponce plus tôt) est beaucoup trop douce pour venir s’opposer à un refus de Raiponce. La seule chose qui lui vient en tête quand elle s’offre à lui c’est de la contempler, et pour moi c’est l’une des plus belle preuve d’amour à la fois si insignifiante et si puissante du cinéma. Si vous me permettez de rajouter une dernière chose sur la réalisation malgré tout ce que j’ai déjà dit, je finirai par dire que la chanson se termine avant le supposé baiser, au lieu d’en faire le clou du spectacle, étrange non ? Pas tant que ça en réalité. Étant donné qu’on avance dans la chanson avec des non dits de plus en plus explicites il était important qu’il n’y ait aucun geste ou mot propre à la romance. Je ne pense pas que la phrase "ce que le spectateur ne voit pas il l’amplifie" soit universellement vrai car une surutilisation de cette idée à l’effet inverse et l’idée à transmettre doit être perceptible à la base par le spectateur (car tout se base sur son expérience vis à vis d’un ressenti). Je sais, je m’égare dans une critique déjà beaucoup trop longue, mais ce stratagème dans la chanson est diablement efficace car ce qu’on perd en explicite on le gagne en poétique et donc en atmosphère romantique, le spectateur comprend alors tout ce qui se joue sans même trop suivre les paroles, On est ici dans du pur "ne nous explique pas, montre" (laissez moi traduire ce que je veux) démontrant le génie de son réalisateur mais aussi que le film comprend toute l’ampleur de son propos.
"Maintenant" ramène encore une fois à un état des lieux, "tout" ramène au monde mais "semble" lui montre d’une certaine façon que la réalité du monde est inatteignable, ou tout du moins l’idée d’avoir une vision objective dessus, il faut être en paix avec sa vision, mais sans pour autant perdre celles des autres. "différent" démontre que toute la réalité des protagonistes a été modifié à cause de l’amour, ce qui est encore une fois très beau. Cet avant dernier vers est assez poétique et puissant lui aussi, c’est même un remplaçant d’une déclaration plus conventionnelle. Alors pourquoi disent-ils ça et pas simplement "je t’aime" ? Déjà car ils sont tous les deux néophytes (actions enfantines) de la situation en quelque sorte, l’amour les dépasse, ils s’y abandonnent, mais aussi et surtout car ce classique "je t’aime" est l’ami de l’amant et l’ennemi du poète ; dans le sens ou le poète doit faire comprendre ses sentiments sans les dire clairement, pour ainsi démontrer que ses sentiments dépassent les mots, qu’ils son indescriptibles. Et dans le contexte dans lequel est dit ce "je veux croire", je pense que c’est une totale réussite. "Je" ramène à l’affirmation qu’ils sont maître de leurs choix, "veux" est signe d’espoir et d’envie, très fort, limite autoritaire (ce n’est pas un "voudrais" ou un "aimerais"). Et pour finir, le mot "croire" a plusieurs échelles : croire quelqu’un (penser qu’il dit la vérité), à une chose (penser qu’elle est probable) et "croire" tout cours (sens religieux ou d’adhésion à un projet). Le mot "en" va cependant orienté la signification vers le dernier choix le plus fort. Cette déclaration signifie donc que les protagonistes souhaitent très fortement bâtir un avenir ou la chose la plus importante de leur future sera l’être aimé. Les deux derniers vers se ressemblent beaucoup mais en réalité le dernier est une réponse à l’avant dernier : c’est parce que chacun veut faire de l’autre son projet d’avenir qu’il ne forme plus qu’un, un couple, un "nous".
Pour la musique on nous propose quelque chose de plus lent, plus romantique aussi mais plus mature car plus posée. On utilise en premier temps les cordes frottées pour annoncer un rêve, ici un nouveau rêve puis un mélange de cordes frottées, pincées et de vents pour montrer que ce nouveau rêve se fera grâce à leur relation avec acceptation de chacun d’eux.
Et même si j’ai beaucoup mis le nom de Byron Howard en avant (vu que c’était un peu lui qui gérait tout le projet), je n’oublie pas de citer toutes les personnes ayant participées à la chanson mais que je n’ai pas pu placé car ça surchargeait un texte déjà bien compacte. Je tiens donc à remercier Alan Manken qui a composé la chanson, Glenn Slater qui a écrit les paroles anglaises et Houria Belhadji qui les a adaptée (en espérant ne pas trop avoir massacré son travail). Et je n’oublie pas les chanteurs, Raiponce interprétée par Mandy Moore en VO et Maeva Méline en VF et Flynn interprété par Zachary Levi en VO et Emmanuel Dahl qui chante en VF même si les moments parlés sont interprétés par Romain Duris. Et je n’oublie pas le coréalisateur Nathan Greno dont Raiponce reste le seul long-métrage encore à ce jour.
Ah et je le place là car je n’ai juste aucun autres endroits ou le mettre : Si dans le titre il y a "y croire" et non "croire en vous", c’est car on essaie de montrer (surtout aux spectateurs pas très attentifs) que le sujet ne se limite pas à Flynn ni à Raiponce mais bien de leurs avenirs.
Au delà d’être un texte avant-gardiste, voir audacieux, car le fait que les protagonistes se sauvant tout les deux provoque l’absence de chevalier servant, on peut surtout dire de "Je veux y croire" qu’il est la réponse directe à "J’ai un rêve" de par son regard plus adulte, l’idée n’est plus d’avoir un rêve ni d’espérer une vraie vie mais bien de croire en son avenir et de provoquer cette dite vraie vie ; en soi, d’en devenir acteur.
Si on peut penser au début que la prise de maturité des personnages amènera à la mort du rêve il ne fait en réalité que le conforter et le renforcer en y injectant du réel. Oui le rêve de Raiponce s’est réalisé mais ce n’est pas encore la fin de sa vie, son nouveau rêve est d’être heureuse avec Flynn, car "je veux y croire" est une déclaration d’amour. Et il est là le tour de force de la chanson ; "Je veux y croire" c’est la victoire de l’espoir, c’est la victoire de l’amour, c’est la victoire d’un avenir heureux alors que ceux-ci ne sont jamais clairement présents dans la chanson.
"J’ai un rêve" est le moment de danser, "Je veux y croire" celui d’écouter car c’est dans ces trois minutes trente de vraies magies que résonnent toute la grandeur du film. A mon sens avec "Je veux y croire", Byron Howard ne fait pas que signer le retour de Disney, il y marque bel et bien son apothéose.
-Raiponce?
-Oui?
-Tu étais mon nouveau rêve
-Et vous le mien