Legion
7.3
Legion

Série FX (2017)

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[Cet avis est garanti sans spoilers].


Loin des block buster du grand écran auquel nous avons droit, et ce à au moins deux reprises dans l'année à l'heure actuelle, et des séries de la petite lucarne, il est un objet Marvel qui se démarque de tout ce qu'a fait la Maison des Idées jusqu'ici : j'ai nommé Legion.


Série diffusée sur la Fox, Legion, autre bébé de Noah Hawley, à qui l'on doit également l'excellente Fargo, diffusée sur la même chaîne, raconte l'histoire de David, qui se retrouve dans un asile, diagnostiqué comme étant un schizophrène. Seulement voilà, les voix et les choses que croit entendre et voir le protagoniste principal ne sont pas les fruits d'une quelconque maladie : en réalité, David est un mutant, du moins c'est ce qu'on tente de nous faire comprendre (ou de nous faire croire...).


En effet, très vite, le spectateur se rend compte qu'il ne doit pas se fier à tout ce qu'il voit et tout ce qu'il entend (comme David, en somme). La série prend, en règle générale, le point de vue de ce dernier et entremêle réalité, flash back, rêves, séquences dans des espaces astraux et autres délires. Le tout, selon moi, est de se laisser porter sans chercher à tout analyser dans les moindres détails. Les seuls vrais repères à notre disposition sont les personnages et la chronologie (et encore celle-ci est assez trompeuse), si bien qu'on ne sait jamais vraiment ce qu'on s'apprête à regarder lorsqu'on lance un épisode et qu'il est possible de finir son visionnage avec la question "qu'est-ce que je viens de regarder ?" qui glisse entre nos lèvres. C'est justement ce sentiment d'incertitude (et même d'incompréhension) qui m'a tant plu. Ne vous méprenez pas, Legion suit un fil rouge et il y a une cohérence à l'histoire, avec un début, un milieu et une conclusion, mais le visionnage de certains épisodes nécessiterait presque une préparation mentale au préalable tant ils peuvent être déroutants car tout est, littéralement, possible et aucune limite ne semble opérer dans cet univers. Heureusement, Noah Hawley devait avoir une avoir une idée très précise de ce qu'il désirait faire avec cette série et, paradoxalement, cela se ressent en la regardant, y compris lorsqu'on regarde les épisodes les plus wtf, car on comprend vite qu'aucun détail n'est laissé au hasard et apporte quelque chose. Mais c'est avant tout l'implication du casting qui est particulièrement révélatrice ici car l'explication du pitch de base a dû être suffisamment compréhensible pour convaincre les acteurs à s'embarquer dans ce projet (et je n'ose même pas parler du tournage). Du coup, avec Legion, ça passe ou ça casse.


Ce que j'apprécie aussi beaucoup avec cette série c'est que, contrairement aux films Marvel (je fais ici plus allusion aux films X-Men), les protagonistes mutants ont des pouvoirs très originaux et, aux premiers abords, peu attractifs (ou vendeurs, si on parle comme le producteur qui ne veut que se faire du fric et qui cherche à tout prix une idée de franchise). Je trouve que cela est un véritable plus. Sans compter que Noah Hawley réussi à les exploiter, que ce soit les personnages ou leurs pouvoirs, avec brio et originalité. On peut ici faire allusion à l'histoire d'amour entre David et Syd, une mutante qui a la faculté de prendre la place de la personne avec laquelle elle a le moindre contact physique ou la relation de frère et sœur liant Kerry et Cary, la première vivant dans le corps du second tout en ayant la possibilité d'en sortir et d'avoir son propre corps (ça ira mieux avec un gif).


Selon moi, si l'on s'attarde plus en détails aux protagonistes de la série, on peut distinguer trois personnages clés pour chaque saison : la première est, vous l'aurez compris, centrée sur David, la seconde marque l'arrivé du magnifique (en français dans le texte) Amahl Farouk, a.k.a. the Shadow King, et la dernière introduit le personnage de Switch, the tooth fairy. Ces derniers sont, bien entendu, entourés d'une petite galerie de personnages (dont vous avez eu un petit aperçu plus haut) que l'on peut qualifier de secondaires bien que cela ne leur rend pas justice car la relation qu'ils entretiennent avec David est le véritable cœur de la série. Pour présenter les choses autrement, David est au centre de l'intrigue mais le développement des autres personnages est tel qu'il y a comme un basculement, ou du moins une mise à niveau, ce qui a pour effet de brouiller les pistes concernant le sujet même de la série. Pour illustrer ce propos, lors d'un entretien avec Navid Negahban et Rachel Keller, cette dernière révèle que Noah Hawley lui avait confié que son personnage, Syd, était le personnage principal de l'histoire : en entendant cela, son partenaire d'interview est très surpris car Noah lui avait dit la même chose concernant Amahl Farouk. Le créateur de la série s'est donc amusé à tirer les ficelles en semant le doute aussi bien dans l'esprit des spectateurs que dans celui de ses acteurs.


Et puis ce qui est remarquable avec Legion, c'est la régularité dont la série fait preuve car la mise en scène reste la même tout en se réinventant à chaque saison (voire même à chaque épisode). Il y a une véritable patte et c'est à la fois la grande force de la série mais également ce qui la rend si peu accessible (certains diront qu'elle est prétentieuse, d'autres qu'elle est trop barrée...). En tout cas, si vous réussissez à vous familiariser avec cette bizarrerie ambiante, vous ne pourrez qu'être admiratif du travail au niveau de la mise en scène, des décors, des costumes et de la bande son. Je peux même vous garantir que chaque épisode vous marquera : que ce soit par une scène, une chorégraphie, une citation ou une simple musique, il y a toujours quelque chose qui ne laisse pas indifférent le spectateur. Pour ma part, j'avoue avoir tout de suite accroché au délire, la première bande annonce m'ayant hypé au plus haut point (la promo est, au passage, très réussie, particulièrement pour la deuxième saison). Parmi toutes les séries que j'ai pu voir, celle-ci est très certainement celle qui se démarque le plus car elle assume complètement son ton décalé et a su se renouveler dans la durée, tout en conservant sa marque de fabrique.


La première saison a donné lieu à deux saisons qui s'inscrivent parfaitement dans son sillage mais, si je devais m'attarder sur une saison en particulier, je choisirais la deuxième car, en plus d'introduire mon personnage favori, the Shadow King, interprété par un Navid Negahban impérial, la seconde salve d'épisodes enrichit considérablement l'univers de la série, poussant le délire qui l'entoure encore plus loin. La manière dont cette seconde saison prend la balle qu'est le final de la saison précédente au rebond est quelque peu maladroite mais le contexte instauré par les premiers épisodes est propice au basculement mentionné plus haut, basculement qui est amorcé en milieu de saison, qui se veut être, en fin de compte, le milieu de la série. Il s'agit également de la saison la plus ambitieuse et la plus aboutie mais aussi la plus complexe : l'action y est moins compréhensible et le rythme, plus particulier. Cela s'explique, notamment, par l'apparition ponctuelle de séquences que l'on pourrait qualifier de "leçons" qui portent, en règle générale, sur la folie et qui sortent le spectateur de l'arc narratif le temps de quelques minutes. Autrement dit, cette saison prend plus le temps de développer un propos (11 épisodes au compteur, soit la plus longue de la série) ce qui contraste avec le fait qu'elle ait pour objet une course contre la montre opposant David and co et the Shadow King. Enfin, en son sein se trouve ce qui est pour moi le meilleur épisode de la série, le chapitre 12, dans lequel l'esprit humain apparaît comme un véritable rubik's cube, un puzzle qu'il faut résoudre pour s'en échapper (les amateurs d'Inception, dont je fais partie, devront y trouver leur compte). Ma grande frustration réside dans ce qu'il advient de l'admiral Fukiyama, personnage au combien prometteur et intriguant introduit dans cette seconde saison, et de Ptonomy qui passent à la trappe dans le troisième acte. De même pour l'arc du couple Oliver et Melanie qui a eu droit à une conclusion un peu trop abrupte à mon goût.


N'ayant pas lu les comics centrés sur Legion, je ne saurais dire s'il s'agit d'une bonne adaptation ou non. Noah Hawley a dû s'éloigner du matériel de base pour mieux se l'approprier. Dès le premier teaser trailer, je me souviens avoir mis un certain temps avant de me convaincre que ce que je m'apprêtais à découvrir s'inscrivait dans l'univers des X-Men tant ce qui m'était présenté était différent de ce à quoi Marvel nous avait habitué jusqu'ici (au cinéma j'entends). En vérité, si je suis tout à fait honnête, même après trois saisons, j'ai toujours du mal à l'admettre et à le réaliser (et pourtant, la troisième saison nous réserve une agréable surprise qui permettrait, dans une certaine mesure, de faire le lien avec les films). Mais peut être qu'au fond ce postulat n'est pas un mal car de tels projets, à l'instar de l'univers animé inauguré avec Into the Spider-Verse, permettent à la Maison des Idées de proposer des choses complètement nouvelles, fraîches et différentes. On pourrait également se demander si poursuivre la série ou la clôturer dans une dernière saison comptant plus d'épisodes aurait été bénéfique mais, étant donné la tournure prise avec le final de la deuxième saison, je pense que le résultat final ne pouvait pas être mieux (bien que la conclusion de la série m'a paru un peu trop simple par rapport à l'ensemble) et que la série risquait de s’essouffler si elle avait été plus longue.


Vous l'aurez compris, Legion n'est pas une simple série mais plus une expérience à part entière. Le seul conseil que je peux vous donner, encore une fois, c'est de se laisser porter car il m'est permis d'affirmer, sans trop de prétention, que vous ne trouverez pas une série aussi riche et originale ailleurs ! 8/10 !

vic-cobb
8
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Créée

le 1 sept. 2019

Critique lue 1.1K fois

4 j'aime

vic-cobb

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