Une chouette série qui prend les problèmes à bras le corps.

Comme il n'y a qu'une seule fiche, cette critique contiendrait mes avis sur la série, saison par saison.

Une première saison encourageante (Critique du 17 juin 2017)

Les Engagés aborde un genre que les webséries n'avaient jusqu'ici peu abordées : le drama à vocation politique. (Au sens premier du mot "la chose publique.")

Non, parce que malgré le côté "je peux faire ce que je veux, aucune contrainte YOUHOOUUU" force est de remarquer que les plus marquantes sont soit du comique, soit de la SF/Fantasy, soit un mélange des deux. Il faut dire qu'à force de faire 500 vues sur YouTube par beau temps, les envies d'originalités se sont écrasés devant l'impératif de distraire un public très jeune et principalement geek.

Ici, on est dans un sujet plutôt casse-gueule : Les Engagés raconte la vie d'un centre LGBT au coeur de Lyon sous l'angle des histoires de coeur de deux personnages : Thibaut, un militant engagé très dragueur et Hicham un jeune musulman homosexuel qui débarque dans le milieu. Pas vraiment d'humour, pas de SF, pas de fantastiques, pas d'enquête autour d'un mort étrange et des thématiques tournant autour de l'engagement (comme son nom l'indique) des cooptations politiques et des différentes thématiques LGBT ("faut-il outer quelqu'un à son insu ?" "Comment agir en cas après une agression" etc...)

J'ai plutôt eu du mal au début avec la série : les personnages m'apparaissaient un peu cliché (évidemment Thibault se tape deux mecs, évidemment Hicham a des préjugés sur l'homosexualité, on a un politicien de droite réputé comme homophobe qui se révèle être homosexuel, etc...) mais petit à petit, ils prennent de l'épaisseur et commencent à devenir attachant. Même chose avec le jeu des comédiens dont je trouvais qu'il sonnait un petit peu "téléfilm français" au début et avec lequel j'ai fini par m' habituer. Même si l'acteur Jean-Christophe Bouvet est vraiment celui qui se détache le plus du lot dans son rôle de militant transformiste grande gueule, mais celui-ci a nettement plus de bouteille que les autres.

Là où la série m'a surtout parlée c'est dans son traitement de l'associatif et de l'engagement. J'ai retrouvé les différentes prises de becs de ce genre de milieux : les histoires de communications, les différents courant entre ceux qui veulent garder une image propre sur eux et ceux, comme Thibault, qui sont jusqu'au-boutiste, les histoires d'élections, les polémiques internes et externes. C'est de loin ce que j'ai trouvé de mieux écrit et de plus passionnant, les sujets étant traités de manière assez complexe, échappant au manichéisme ou à la tentation de poser un problème de façon bêtement didactique.

Alors certes, même sur la fin, la série n'échappe pas aux scènes que j'ai trouvé personnellement moyennes ou faibles (notamment la partie "sentimentale" que j'ai trouvé parfois prévisible) mais dans l'ensemble ça reste quand même d'un très bon niveau.

Ah, et l'image est particulièrement bien léchées, mais l'esthétique ça a jamais été mon truc. (Je suis pas fan des belles images.)

Au passage, le pari de Studio 4 de mettre en avant des webséries très diverses que ce soit au niveau de la tonalité que de l'écriture, commence à porter ses fruits : Avec un peu plus de 100 000 abonnés, la série réussi à se trouver un terreaux d'abonnés prêt à suivre des webséries assez diverses dans la forme et à leur laisser leur chance.

70 000 vues pour le pilote et 30 000 vues par semaine pour chaque épisode, je trouve que le genre de la websérie remonte la pente, notamment lorsqu'on se souvient qu'il y a un ou deux ans, certaines séries pourtant très bien produites, peinaient à atteindre les 10 000 vues. Oui, vous pourrez m'objecter que votre petit cousin qui fait des Let's play du nouveau Call Of Duty en fait deux fois plus par vidéos... mais entre drainer un public de YouTuber déjà habitués à ce qu'il va voir et drainer un public "de niche" pour regarder un drama, le challenge n'est pas le même.

Du coup, j'en attends assez de la saison 2 pour voir si l'essai va être transformé.

PS: Par soucis d'honnêteté avec le lecteur, je signale que je connais Sullivan Le Postec, c'est un vieux camarade d'internet. On a fait partie de la même association de fans de séries télés par le passé.

La saison du T de LGBT. (14 janvier 2018)

Puisque je viens de faire l'éloge de la mini-série Preview, un petit mot pour la saison 2 des Engagés.

Parce que celle-ci a réellement "transformé l'essai" (pour reprendre le jargon des journalistes amateurs de rugby ) : c'est bien mieux maitrisé au niveau de l'écriture, l'image est toujours niquelle et les personnages ont une vraie évolution. Mais c'est surtout au niveau des thèmes abordés que la série devient hyper intéressante : tout en restant dans le cadre de l'asso LGBT, la série réussi à parler de la situation des migrants, de la mainmise préfectorale sur les manifestations et aborde le sujet de la transphobie au sein des milieux gays. Et le tout, sans perdre de sa pertinence ni sans être moralisateur.

Si les deux personnages principaux prennent vraiment de la consistance cette année (un background plus approfondi, des positions moins caricaturales) il faut dire que le personnage de Claude est l'outsider total de la série dans son rôle de vieux militant droit dans ses bottes. Le mec arrive à rendre émouvante une scène où il chante une vieille chanson paillarde.

Bref, si je regardais la série en saison 1 d'un oeil curieux et en m'y sentant extérieur, j'ai été bien plus happé par cette saison 2.

PS :

Autre truc : le VLOG vidéo de la journaliste qui suivait l'actualité en parrallèle de la série n'existe plus. Il faut dire que si l'idée était chouette en terme de trans-média, cela n'apportait rien au spectateur. On gagne avec un format plus proche d'une série habituelle : des épisodes tournant autour de 10 minutes, par rapport à la première saison où les épisodes étaient toujours trop court.