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SAISON 3


Après la maison hantée puis l’hôpital psychiatrique chapeautée par les religieux, American Horror Story jette son dévolu sur une école de sorcière. Située dans la banlieue de La Nouvelle Orléans en Louisiane, elle doit ré-ouvrir ses portes en ces temps troubles pour la sorcellerie. Comme par le passé où elles étaient pourchassées et brûlées, les sorcières sont aujourd’hui menacées d’extinction. Les différents professeurs et notamment Myrtle Snow (Frances Conroy) retrouvent ces sorcières qui s’ignorent et rappellent à ses devoirs la Suprême actuelle, Fiona Goode (Jessica Lange), qui devra être remplacée au terme de l’enseignement.


Cette saison 3 va au bout de ce que American Horror Story titillait depuis le début. Elle célèbre la morale libertine poussée à son terme. Cynisme, domination, rejet de tout ordre morale s’exprimaient dans les deux premières saisons mais apparaissent désormais de manière très structurée. Au bout de quelques épisodes l’idéologie libertine, avec son cortège de bien-pensance incongrue et de fantaisies progressistes au sens le plus illuminé du terme, s’expose sans entrave.


Ainsi Jessica Lange est le "beau" freaks. Elle est anti-raciste, elle n’aime pas les flics, elle critique ces horribles catholiques réactionnaires qui eux se cachent pour accomplir des horreurs sûrement bien pire que les siennes ! Les auteurs ne ratent jamais une occasion d’en faire un esprit pur, quitte même à la faire approuver Barack Obama. Or les démocrates incarnent plus que tout la puissance publique en mesure de lui nuire ; et c’est d’ailleurs elle qu’elle déteste, pas le principe de l’autorité en soit, dont elle abuse à ses fins égoïstes. Car la Suprême sur le départ est aussi glamour et raffinée que sadique, parfaitement cynique et dominatrice.


D’ailleurs son égal dans la cruauté et le cynisme est un partenaire idéologique et non un opposé. Au fur et à mesure le fossé se comble entre elle et Marie-Delphine Lalaurie (Kathy Bates), l’horrible bourgeoise des années 1830 qui tua des dizaines d’esclaves. Seulement, deux siècles plus tard, la domination a changé de forme, de cible et puis simplement, de logiciel. Elle joue sur la séduction car les illusions doivent être plus vastes et occuper le champ matériel. Elle ne contrarie pas la liberté, l’encourage même, parce que les foules affranchies ne sont plus une menace et peuvent même s’avérer une opportunité de développement.


Pour autant, le Mal n’est pas seul maître dans American Horror Story 3. Cette saison joue sur les fantasmes d’être "élu". La plupart des sorcières sont hostiles à Jessica Lange et toutes le sont à Kathy Bathes. L’appartenance à une maison d’exception et l’affirmation de compétences extraordinaires les stimulent par-dessus tout ; pour certaines (en premier lieu Cordelia Foxx – Sarah Paulson), il y a la transe messianique (et le lot de souffrance et de culpabilité assortis), les opposant carrément à l’apathie générale et à l’opportunisme dans les rangs qui favorisent la gestion despotique et négligente de Jessica Lange.


Curieusement toute cette initiation est entachée par une certaine décadence. Le grotesque est au rendez-vous et lui n’est pas contradictoire : Papa Legba ne fait pas tâche dans ce monde. Mais la fin de la saison en revanche est un revers pour le prestige de l’école et surtout un coup fatal porté à ces philosophies malsaines, comme si leur tentation était finalement réprouvée (tout en étant assumée) ; et cédait maintenant la place à un délire plus bon enfant. Les pouffes semblent avoir une place d’honneur, jusque dans l’esthétique des épreuves et les Enfers personnels.


Le recrutement des nouvelles sorcières est-il une farce démoralisée ? En tout cas le consternant processus de démocratisation et d’ouverture est assumé, bien réel ! Aussi réel que le bizutage de Stevie Nicks, dont l’apparition est indigne d’un cameo beauf dans Absolutely Fabulous (laquelle allait trop loin dans le mauvais goût avec cet aspect). La ploutocratie satanique dans American Horror a soit un sens de l’humour très corrosif, soit un amour du laid dépassant l’entendement, qui ne cadre pas avec une icône sensuelle comme Fiona Goode, mais reste compatible avec la cohorte de sorcières très dogmatiques et plus clémentes, mais aux goûts plus.. vulgaires.


La réception de cette troisième saison est très contrastée. Pour beaucoup c’est un gadin total ; d’ailleurs, il semble que certains ne prennent conscience qu’aujourd’hui de la grossièreté et la dimension racoleuse de cette série. Pour une minorité, c’est au contraire l’accomplissement. La vérité est plutôt là : l’écriture de American Horror Story a toujours été chaotique, elle ne l’est pas davantage cette fois. Par contre, jamais la série n’a été si cohérente et limpide dans ses délires. L’ordre de la sorcellerie et les valeurs de ses personnages ne souffrent d’aucune inconsistance.


Ce n’est pas le cas du scénario, avec lequel tout reste possible : tout le monde peut mourir, un défunt utile reviendra à temps ; tout peut se passer, se remodeler. Cela permet de rebondir en permanence, de rendre le filon inépuisable et de laisser couler l’action avec vigueur et sans trop de contraintes. En négatif, le rôle des personnages et surtout les propriétés précises de leur pouvoir ou de leur place dans la hiérarchie finissent par être indistincts et tous leurs mouvements courts-termistes. Le but final (trouver la relève de la Suprême ou l’anéantir au contraire) agit comme un phare autour duquel pas mal d’éléments peuvent être expérimentés.


La caricature est toujours au rendez-vous, avant d’être chassée par un retour taquin à une définition crue de la réalité et des intentions de chacun. Ainsi le personnage sadien du XIXe, la baronne Lalaurie, passe par une période de rédemption et d’acclimatation ridicule, avant que ne se découvre la vraie nature de son jugement. Et si maléfique soit-elle, Lalaurie a le mérite de la franchise ; et comme toute bonne figure politiquement correcte, on peut lui faire exprimer ce qu’on ne peut tolérer que dans la bouche d’un pantin. Globalement, cette saison 3 est la plus uniforme. Elle a toujours les vices et les vertus propres à la série, avec pour première qualité son inventivité et ses actrices ; quand à ses fixations éthiques douteuses, elles ont le mérite d’être affichées dans toute leur monstruosité, ce qui en fait au moins des sujets divertissants.


http://zogarok.wordpress.com/2014/09/08/american-horror-story-saison-3/ La saison 3


http://zogarok.wordpress.com/2013/06/04/american-horror-story/ La série + les saisons 1 & 2

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le 8 sept. 2014

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Zogarok

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