J'en avais entendu parler... J'en avais lu des commentaires dithyrambiques... A l'unisson, les spectateurs semblaient conquis. Mais quels spectateurs ? Comme beaucoup - enfin, je suppose - j'ai plus eu la sensation d'être un témoin impuissant face à la plus grande catastrophe technologique causée par l'homme, qu'un spectateur placide d'une série quelconque.
Cinq épisodes avalés en enfilade plus tard, j'avais encore des frissons d'incrédulité face à ces enchainements implacables d'irresponsabilité d'un apparatchik avare de son misérable pouvoir, à défaut d'avoir une autorité reconnue.
J'étais en Normandie quand la catastrophe eut lieu. J'étais loin... et en fait, j'étais tout prêt ! Depuis, j'ai travaillé pour l'industrie nucléaire française pendant une dizaine d'années et j'habite depuis 26 ans à moins de 3 kilomètres du plus important site nucléaire français.
Paradoxalement, autant la série m'a permis de comprendre l'enchainement des situations, de mieux percevoir le poids et la puissance de la raison d’État du pouvoir russe de l'époque, d'appréhender avec plus de pertinence les insuffisances humaines de l'industrie nucléaire russe, autant je n'ai pas ressenti monter une méfiance extrême vis-à-vis de notre propre industrie nucléaire. Peut-être parce que je connais de nombreuses personnes qui apportent leur contribution au fonctionnement de cette filière. Peut-être parce que j'ai plongé dans ce monde si particulier... Peut-être...
Toujours est-il que cette série m'a littéralement flanqué une claque... Désormais, je sais ce qui s'est passé (au moins dans les grandes lignes...) et j'ai eu la confirmation que les dictatures policières comme le fut l'ex-URSS sont néfastes, destructrices et absurdes. Car comme le disait Jared Harris (magistral !) à la fin de la série, la vérité est plus forte que le mensonge et elle ne disparaitra pas...
J'ai été stupéfait par la qualité de la réalisation de Johan Renck, par la crédibilité des reconstitutions (en Lituanie), la justesse des acteurs - Stellan Skarsgård, magistral également - l’authenticité des scènes de tous ordres, par cette ambiance poisseuse de fin de civilisation qui trahissait l'ampleur de la catastrophe.
Voici une série qui mérite d'être diffusée au plus grand nombre afin de lever les aveuglements volontaires ou non, et de faire prendre conscience de la responsabilité des politiques comme des techniciens face à la complexité de la nature et de sa capacité à faire ce qu'elle veut si on ne la respecte pas.
A voir. Assurément !