Le retour du fils prodigue
Un fils qui fouille la mémoire et les dossiers de son père à la recherche d'un secret ou d'une révélation, ça n'est pas si original. Et Exile serait pauvre si les seuls obstacles à la quête de vérité du héros principal, Tom, étaient l'amnésie de son père et sa propre difficulté à remettre la main sur des documents datant de vingt ans. Mais les vrais obstacles sont internes, émotionnels, psychologiques. Et c'est ça qui est intéressant.
Tom a peur de ce qu'il va découvrir. Et le père, Sam, résiste aux questions de son fils, autant qu'Alzheimer le lui permet.
Ce que je trouve aussi remarquable, dans Exile, c'est, en particulier dans le premier épisode, l'absence de bavardage. Les personnages parlent par leurs actes, leurs visages, et les dialogues sont crus, brefs et efficaces. Ils ne sont jamais magnifiés, mais traités sans complaisance et sans pitié, et leurs rapports ne sont pas édulcorés. Sam, le père, surtout est montré de façon très crue, comme un vieillard vulnérable et débile (dans le sens premier du terme), dont les relations avec ses enfants demeurent très difficiles. C'est poignant, c'est réaliste, et jamais infesté de misérabilisme ou de guimauve.
D'ailleurs les deux acteurs principaux sont époustouflants. Et si Jim Broadbent (Sam) ne récolte pas un Bafta lors de la prochaine session, je veux bien me faire tatouer le portrait de Carrie Bradshow dans le dos. Alors, évidemment, on me rétorquera que la moitié du temps, on ne voit que le vide dans ses yeux. A quoi je réponds : il faut un grand talent pour pouvoir le faire, et encore plus pour passer brusquement de cet état à la lucidité (vous n'avez qu'à revoir la plupart des épisodes de Friends, et vous constaterez, comme moi, que Matt LeBlanc est un grand acteur).
Il y a quand même des reproches à faire à cette mini-série. Notamment le troisième volet, qui prend pour moi des allures d'enquête plus classique. On tombe dans le policier plus banal, avec une confrontation au méchant, des scènes de fouilles...
Enfin, la fin est vraiment très (trop ?) proche de celle de State of Play. Sam peut être vu comme un Cal Mc Caffrey de quarante ans, usé et aigri. La révélation de la vérité, par voie de presse, coûtera beaucoup, à lui à ses proches. Et la série s'arrête là encore avec l'envoi de l'article. Je ne sais pas si Abbott a une véritable fascination pour la presse, ou s'il a voulu donner, en quelque sorte, une suite à State of Play, mais on peut y voir une redite. Toutefois, là où State of Play parlait de la fin douloureuse et nécessaire des illusions, Exile lui emboîte le pas, et enchaîne, à la fin, sur la reconstruction et la reconnaissance de sa famille.
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