Dans l’ombre, les vampires manigancent. Des armées de goules leur obéissent. Un fléau ancestral arrivé en Angleterre il y a plus d’un siècle et contre lequel la fondation Hellsing s’est juré de combattre. Toute une armée privée aux ordres d’Integra Hellsing, la dernière de son illustre lignée, tout entière au service de la couronne. Et lorsque le danger est trop grand, lorsque les soldats échouent, Hellsing envoie son dernier atout. Un redoutable et très ancien saigneur immortel aux ordres d’Integra et répondant au nom d’Alucard.
Produit par le studio Gonzo, Hellsing est l’adaptation libre du manga éponyme de Kota Hirano publié de 1998 à 2007. Diffusé de 2001 à 2002, alors même que Hirano n’avait pas terminé son histoire et explorait même le passé de la fondation Hellsing dans son manga Hellsing : The Dawn, cet anime destiné à la télévision ne comptera seulement que treize épisodes et nous relatera le combat de l’agence Hellsing face aux hordes de morts-vivants menaçant l’Angleterre, tout cela présenté du point de vue de la jeune Victoria Celas, policière tuée en mission mais changée en vampire par le mystérieux Alucard. Tout en s’adaptant à sa condition d’immortelle, la jeune femme sera enrôlée au sein de l’agence Hellsing et cherchera à en savoir plus sur le lien étrange qui unit son maître, Alucard, à Integra Hellsing, jeune technocrate flegmatique et obstinée, menant une lutte sans merci contre le monde des ténèbres. Comment est-il possible qu’un vampire aussi puissant et ancien qu’Alucard obéisse à Integra et lutte avec elle contre sa propre espèce ? Quels desseins cache en fait le redoutable saigneur de l’ombre ? Et quel passé ont-ils en commun ?
Au vu de son titre, il n’est évidemment pas bien difficile de faire le rapprochement entre l’anime et le célèbre personnage de Van Helsing créé par Bram Stoker. L’intérêt étant ici de garder un certain mystère sur la filiation possible entre l’anime et le roman Dracula. D’autant plus que les plus observateurs auront rapidement remarqué le secret que cache le nom du vampire au centre de la série. Hellsing peut dès lors se voir et s’apprécier comme une suite possible au roman de Stoker, passant sous silence près d’un siècle d’histoire entre les deux oeuvres pour mieux ériger le célèbre vampire en anti-héros moderne.
La série se démarque surtout par son ambiance singulière, à la fois gothique et intemporelle, où l’Angleterre moderne semble plier sous le poids de lois ancestrales et cléricales. La lutte que se livrent la fondation Hellsing et le Vatican, protestants contre catholiques, à travers l’antagonisme Alucard/Anderson (autrement plus développé dans la série d’OAV Hellsing Ultimate) aurait d’ailleurs pu être mieux travaillée si les scénaristes n’avaient pas été pressés de conclure leur histoire par une fin originale opposant Alucard au tout premier immortel, Incognito. Bourré de personnages tous aussi charismatiques que mystérieux (seul le passé d’Integra sera évoqué le temps d’un épisode), traversé par une protagoniste assez archétypale et insignifiante mais servant surtout de ressort scénaristique, Hellsing n’est pas un anime sans défauts et demeure assez frustrant dans sa façon d’effleurer la psychologie de ses personnages. Mais on peut aussi choisir d’apprécier la série pour cette lacune, les nombreuses zones d’ombre cernant les personnages pouvant finalement être appréciées comme sa plus grande qualité.
Le générique est entêtant, la BO d’enfer, et l’anime s’apparente en cela beaucoup à Cowboy Bebop par sa manière de mêler action et musique pop. Et l’animation, bien que moins perfectionnée que celle de l’anime de Watanabe (il est d’ailleurs étonnant de voir que Cowboy Bebop diffusé deux ans avant a, d’un point de vue graphique, bien mieux vieilli), révèle son lot d’images iconiques, sublimant en particulier chaque intervention salvatrice d’Alucard. Dans sa posture tranquille et moqueuse, habillé de son long manteau rouge sang, le vampire reste à ce jour un des personnages les plus classieux de l’animation japonaise. A tel point qu’on voudra suivre plus loin ses aventures dans la série d’OAV Hellsing Ultimate, diffusés de 2007 à 2012, qui adaptaient plus fidèlement les mangas de Hirano tout en bénéficiant d’un format et d’une qualité d’animation autrement plus fluide, détaillée et virtuose. Même si la comparaison reste en défaveur de cette première adaptation télé, celle-ci reste plaisante à revoir et demeure une belle porte d’entrée à l’univers d’Hellsing. D’autant plus que la série s’achève sur une intrigante question laissée en suspens et dont on ne peut que deviner, au sourire d’Integra, quelle en sera la réponse. C’est dans le mystère du devenir, autant que dans le rapport de pouvoir entre ses deux principaux personnages, que cette première adaptation trouve finalement toute sa raison d’être.