Autant commencer par le plus important: j’ai rarement été bouleversé à ce point par une série !
Alors je reste lucide, il y a des choses assez mauvaises dans cette Novela: certaines péripéties secondaires ridicules, réalisation d’un autre âge (zoom insupportables, plans de coupe unique sur 164 épisodes ça en devient drôle ) seconds rôles faibles (le frère en tête ne tient pas la route: il a trois expressions à sa palette !)
Alors comment suis-je arrivé à Kara Para ask ?!
Je venais de voir « Bir Baskadir » petit bijou de bout en bout et souhaitais voir certains de ses comédiens dans d’autres rôles; je constate qu’Oyku Karayel y joue… Et je commence le visionnage de ce que je crois être une mini-série, à l’instar de Bir Baskadir. Mes premières réflexions: « qu’est-ce que c’est que cette bouse !!!! », j’ai failli arrêter de nombreuses fois au cours des premiers épisodes, « trop nul ! » me disais-je. Et je découvre en + qu’il y a 164 épisodes !!!!! Au secours !
MAIS ! Mais je suis resté. J’ai tout vu. Et j’ai pleuré toutes les larmes de mon corps. Eh oui, j’écris cela sans honte, avec toute la conscience des faiblesses de cette série.
Car ils sont parvenus à créer quelque chose de rarissime, une des choses les plus difficiles à montrer au cinéma, tellement facile de s’en moquer: l’histoire d’amour.
On pourrait résumer cette série en quelques mots: comment détruire l’amour entre deux êtres. Tous les moyens pour le détruire y passent ! J’ai souvent eu en tête l’image de Jules Berry dans « Les visiteurs du soir » qui frappent rageusement la statue des amants et leur cœur qu’il entend encore « Il bat, il bat, il bat… »
Cette Novela est portée par les deux acteurs principaux, Tuba Buyukunstun et Engin Akyurek, ils y sont sublimes ! De simplicité, d’engagement.
Leur façon de se regarder, de se toucher, de s’appeler, de dire leur prénom (Élif / Omer) est inoubliable. Des exemples davantage prestigieux me viennent en tête: Romy Schneider disant « David » dans « César et Rosalie », à Margaret Sullivan dans « Trois camarades » de Borzage quand elle voit son amoureux, etc. Je pourrais en citer d’autres, du cinéma mondial, qui m’ont marqués, mais la liste n’est pas infinie. Car c’est une denrée rare.
Je pourrais être intarissable sur ces deux acteurs et leurs deux personnages qu’ils sont parvenus à hisser à la hauteur de d’amants légendaires.
Cf le dialogue hurlé entre elle, derrière les barreaux, et lui trois étages au-dessus, le menottage par le flic après qu’elle lui a annoncé qu’elle le quittait, la veille de la femme au chevet de l’homme, etc.
Mais cette série, comme souvent dans les fictions turques, recèle d’autres surprises qui mettent par terre d'émotion: certaines scènes magnifiques (la déclaration d’amour d’Ahmet Tansu Tasanlar plus qu’émeché, la visite en prison de la tante ignoble pour voir sa nièce et son…craquage inattendu, la sœur Hazel Turesan soudain étonnante de sobriété lorsqu’elle reconnaît le sacrifice de l’heroine, etc).
Alors, oui, c’est ce qu’on appelle une Novela, avec sa qualité esthétique disons… approximative.
Mais mon admiration sans borne pour les deux acteurs principaux, vous l’avez compris, mais également pour d’autres plus secondaires (ah la magnifique mère Güler Okten ) .
Admiration également pour les créateurs (réal, scénariste) qui, malgré tout, sont parvenus à dégager tellement de délicatesse, d’amour et de générosité.