Le Temps est assassin
5.5
Le Temps est assassin

Série TF1 (2019)

Voir la série

Après l’accident de voiture qui a coûté la vie à sa famille, vingt-cinq ans plus tôt, Clothilde n’a plus jamais remis les pieds en Corse… jusqu’à l’accident de sa fille unique, Valentine. De retour sur son île natale, Clothilde fait face à des signes très étranges qui lui laissent penser que… sa mère est vivante ! Décidée à comprendre ce qui s’est passé à l’été 1994, Clothilde commence son enquête, réveillant des démons du passé qu’il aurait mieux fallu laisser dormir.
Michel Bussi est en quelque sorte le Levi du roman policier d’été : ses livres sont simples, faciles à lire et reposants pour le soleil et la plage. Ses mystères n’ont donc pas la complexité d’un Agatha Christie ou Conan Doyle mais restent efficaces. Ici, par exemple, le mystère repose sur une simple question : « est-ce que la mère de Clothilde est vivante ? ». La réponse ne peut qu’être « oui » ou « non », suivie, bien sûr, d’explications. En apparence, ça n’invite pas à trop réfléchir, ce qui est donc parfait en vacances. Personnellement, ça ne me passionne pas car c’est le type de roman policier dont je devine la résolution au bout de quelques chapitres…
Mais j’apprécie quand même de découvrir leurs adaptations cinématographiques à la télé et, après Un Avion sans Elle, j’étais curieuse de découvrir le Temps est Assassin dont le titre me faisait déjà doucement sourire tant il me faisait penser à une de ses phrases pseudo-philosophiques. Et je n’étais pas déçue !
Pour commencer, cette mini-série est beaucoup trop longue, ce qui fait qu’on a le droit à deux ou trois fois la même scène (Paul qui explique pour la énième fois à Salomé que leur relation est terminée et Salomé qui réplique qu’elle ne supporte pas de le savoir avec une autre femme dans la maison où ils devraient vivre actuellement). Six ou sept auraient suffi pour boucler le récit, certainement… A cela, j’ai le regret de vous dire que la réalisation est faite avec les pieds, ce qui fait qu’on oscille entre des plans brusquement bizarres (le réalisateur se rappelant peut-être qu’il devait faire quelque chose pour que ce soit esthétiquement joli, peut-être ?) et un montage qui se voulait intense et épileptique mais qui, s’il reste bien épileptique, fait mou et bancal (pour ne pas dire sans intérêt) tant il n’est pas maitrisé. A croire que le monteur a essayé des trucs par moments (comme le réalisateur, en fait) et que tout d’un coup, il s’est calmé et est revenu à une vitesse de croisière digne d’une série française bien lambda.
Du coup, ce montage a le don de révéler des intrigues trop tôt. Par exemple, au début, on enchaîne entre une tentative de suicide par noyade de Clothilde Idrissi à l’été 1994 et des interrogatoires qui suivent l’accident de voiture où on nous révèle des trucs comme le fait que Palma avait une liaison extra-conjugale. Ça fait bâclé, ça ne nous fait pas accrocher au récit et on se demande sincèrement ce qu’on a sous les yeux : est-ce que la tentative de suicide est liée à l’accident ? (non, puisque cet accident arrive le lendemain) Quel intérêt de nous parler dès le début de la relation entre Natale et Palma ? (aucun) Pourquoi ne pas ouvrir tout simplement le récit sur l’accident de voiture avec Clothilde qui sort de la voiture, blessée et en sang ? (bonne question, surtout que la scène de la noyade ne sera expliquée que… dans le dernier épisode !) Pareil pour Palma, la mère de Clothilde, dont on apprend la survivance… dans le quatrième épisode. A la moitié de la série ! Quel intérêt de montrer la moitié ? Des plans avant révélaient déjà la supercherie de manière grossière AVANT mais on avait encore l’espoir d’un peu de mystère (pour les plus candides d’entre nous) ! Pourquoi tout gâcher à mi-parcours ? Qui fait ça à part les auteurs (ou les réalisateurs, parce que, soyons honnêtes, je ne sais pas si c’est comme ça dans le livre) qui veulent se tirer une balle dans le pied (parce que, pour rappel, le mystère est HYPER simple, il faut donc l’entretenir bien comme il faut, pas le révéler A LA MOITIE DE L’INTRIGUE !!!!!) ?
Ensuite, il y a un point qui me chiffonne car je ne sais pas si c’est ainsi dans le roman… si c’est le cas, je ne peux absolument pas penser/dire que Bussi est un auteur de romans policiers de talent (j’ajouterai même qu’il devrait se spécialiser rapidement ou se reconvertir)… ça concerne les séquelles de Clothilde. Nous le voyons très rapidement (et dans les flash-backs par la suite), elle a reçu de violents coups au crâne (dans la scène de l’hôpital, juste après l’accident, elle a carrément un bandage autour de la tête, en plus de griffures) mais comment fait-elle pour se souvenir de l’accident ? Comprenez-moi bien, le cerveau est un organe assez fragile et très précieux qui se trouve dans notre petite tête, avec une capacité de stockage impressionnante. Lors d’une agression (si des coups sont portés à la tête, bien sûr) ou d’un accident (si la tête a eu un choc), cet organe incroyable est vivement secoué… comme une balle de ping-pong. N’ayant pas la robustesse d’une balle de ping-pong, les dégâts peuvent être considérables, au niveau de la gestuelle, du langage… ou de la mémoire ! Quelque chose qu’on sait quand on est neurologue ou qu’on s’y connaît un peu médecine criminologiste (merci aux Enquêtes Impossibles)… généralement, lorsque la tête est atteinte, c’est la mémoire en premier qui part en sucette et on est incapable de se souvenir des dernières minutes avant l’agression/accident. Je ne dis pas que ça ne peut pas revenir (les voies du cerveau sont impénétrables et uniques) mais, juste, sur le moment du réveil, tu es à peine capable de savoir ce que tu fous à l’hôpital. QUELQU’UN PEUT-IL ALORS M’EXPLIQUER POURQUOI CE N’EST PAS LE CAS DE CLOTHILDE ??????
Certes, on peut argumenter qu’on n’a pas ses résultats détaillés médicaux sous les yeux, donc je ne peux pas dire avec précision qu’elle DEVRAIT être amnésique et à quel degré, elle devrait l’être. Mais j’ai une raison de dire qu’elle devrait l’être pour les besoins du scénario : sinon, c’est incompréhensible qu’avec tout ce dont elle a été témoin à l’été 1994, elle ne se soit pas posée des questions sur la véritable cause de la mort de sa famille plus tôt. Pire que ça ! le fait qu’elle se souvienne aussi bien de l’accident aide à trahir plus rapidement la révélation finale. En effet, comme on voit une femme qui ressemble à sa mère, qui a les vêtements et les bijoux que portait sa mère, ce jour-là, et qu’elle prenait pour sa mère, on se dit : ou c’est bien sa mère et dans ce cas, le twist final est nullissime (je viens de penser que, du coup, on sait de facto que la mère est forcément vivante), ou ce n’est pas sa mère mais une femme qui, pour des raisons inconnues, se faisait passer pour sa mère (et comme rapidement, un personnage féminin, qui ressemble beaucoup à Palma et qui, comme par hasard, a disparu le même été, apparaît dans les flash-backs, on comprend qui c’est dès le premier épisode).
A cela s’ajoute qu’il est incompréhensible que durant vingt-cinq ans, elle est crue à un accident alors que, cet été-là, son père a perdu son boulot en cours (les problèmes financiers de la famille étant importants et liés à la mafia), que sa mère croyait qu’elle et ses enfants étaient menacés de mort, que la maîtresse de son père refaisait surface dans leur vie pour foutre la merde, que Palma rencontrait de son côté son âme sœur, que son frère s’impliquait dans une histoire d’amour à haut risque, etc. Ce n’est pas possible qu’elle se souvienne de tout ça parfaitement bien et que, vingt-cinq ans plus tard, elle se dise « tiens, ça a peut-être un lien avec ce qui nous est arrivé » !
Ça aurait été plus crédible que sa mémoire soit grandement altérée au point qu’elle ne garde que quelques souvenirs de l’été 1994, souvenirs qui, avec le deuil, elle n’a jamais cherché à retrouver et que, de retour en Corse, elle redécouvre en questionnant les gens, lui permettant de remettre en doute la présence de sa mère dans la voiture et de questionner celle d’une inconnue. En plus, ça aurait ajouté du suspens, un manque de confiance en ses proches grandissant, ainsi qu’une plongée dans ses seize ans à travers son journal.
Et parlons-en du journal, c’est toujours très intéressant les flash-backs mais là on a le droit théoriquement au point de vue de la fille… sauf qu’à cela vienne s’ajouter les points de vue de toute sa famille quand c’est nécessaire… et comme en plus, elle note plein de trucs mais ne retient rien et n’a pas son journal les trois quarts du temps pour replonger dans ses souvenirs vingt-cinq ans plus tard, à quoi sert-il ?
Enfin, le scénario a encore des problèmes puisqu’il comporte quelques incohérences comme Clothilde qui reçoit un message de sa mère mais quelques épisodes plus loin, tu te demandes comment et pourquoi la mère aurait envoyé un message via Orsu puisqu’elle ne savait pas que sa fille était vivante et n’avait aucun raison d’essayer de la prévenir de quoi que ce soit (pareil pour les objets qui suivent puisque Palma a l’air de vivre ça comme une surprise lorsqu’Orsu revient avec le collier de sa fille), Palma ne pouvait pas non plus savoir que sa fille était vivante puisqu’Orsu est muet, elle n’a jamais pensé à se défendre de l’accusation de meurtre (je sais qu’elle n’a pas eu beaucoup de visite mais comment, au procès, entre deux pleurs, n'a-t-elle pas pensé à parler ?) et comment César savait-il qu’elle était innocente ? (je veux dire, quelle preuve avait-il recueilli, depuis le temps, qui lui permettait de prouver que Palma n’avait rien fait ?)
Ce qui sauve cette mini-série, ce sont les acteurs, brillants et justes dans l’interprétation (bien que les dialogues ne leur permettent pas d’être toujours bons) et parfois dans des prothèses et un maquillage quelque peu ridicules (rendez-vous compte, ils réussissent à faire oublier ce détail !). Et même à la fin, certaines scènes font mouche et sont bien rythmées…
C’est un exemple assez bon d’à quel point un divertissement d’été peut être bon quand il est maîtrisé, mais aussi franchement nul quand son sujet n’est pas maîtrisé.

Créée

le 27 sept. 2019

Critique lue 912 fois

Critique lue 912 fois

D'autres avis sur Le Temps est assassin

Le Temps est assassin
RaphaëleMartinat
4

La Connerie est-elle assassine ?

Après l’accident de voiture qui a coûté la vie à sa famille, vingt-cinq ans plus tôt, Clothilde n’a plus jamais remis les pieds en Corse… jusqu’à l’accident de sa fille unique, Valentine. De retour...

le 27 sept. 2019

Le Temps est assassin
capitaine89
4

oh my god

bjr... ouf je suis enfin arriver au bout , que ce fut long et pénible ... même la qualité de deux ou trois acteurs et actrices ne sauve pas cette série ... des incohérences .. des erreurs de...

le 16 sept. 2019

Le Temps est assassin
Specliseur
7

Une adaptation nerveuse d’un roman de Michel Bussi

Trois ans après sa sortie, Le Temps est assassin de Michel Bussi, est adapté à la télévision.Une réussite pour son auteur dont la réputation s’est amplifiée après d’autres publications.Le réalisateur...

le 30 août 2019

Du même critique

The Spanish Princess
RaphaëleMartinat
1

Madre mía, que le he hecho a Dios ?

Catherine d'Aragon (pour une fois pas dans un rôle de gourde maniaco-dépressive mais dans celui... d'une chieuse mégalomane) débarque en Angleterre pour épouser son promis, le prince Arthur. Cette...

le 10 juil. 2019

11 j'aime

2

Eiffel
RaphaëleMartinat
5

Tout Ça Pour Ça

Alors que Gustave Eiffel s’intéresse pleinement au futur métro parisien, on lui propose de participer au concours pour l’exposition universelle de 1889. Hésitant, il finit par accepter quand il...

le 21 oct. 2021

9 j'aime

5

Destin : La saga Winx
RaphaëleMartinat
3

Massacre d'une Série Culte

Bloom, ayant tout juste découvert qu’elle était une fée, se rend à l’université d’Alféa, pour apprendre la magie et se faire pleins d’amis… mais un mystérieux secret se cache derrière ses...

le 22 janv. 2021

9 j'aime

6