il sentait bon l'instable show ,mon légionnaire

chais pas vous, mais moi devant un spectacle, j'adore être baladé, désorienté, perdre mes repères, ne pas avoir toutes les clés, d'être mystifié, de n'y comprendre que pouic..et ce n'est pas si fréquent..au cinéma devant Lost Highway ou Mulholland Drive, à la télé devant Leftovers ou Twin Peaks par exemple..Et voila que Legion me redonne ces petits frissons de jouissance, l'impression d'être convié à quelque chose de 'différent' par un créateur à l'imaginaire débridé (en l'occurrence Noah Hawley -déjà auteur de la mémorable anthologie 'Fargo'; A la base Legion, c'est David Haller, personnage peu connu de l'univers X-Men, fils du professeur Xavier et mutant surpuissant mais à la psyché toute tordue..pas très fiable, le mec!Mais la série s'écarte notablement du comics (par ailleurs assez génial) de Cris Claremont et Bill Sinkiewicz pour nous proposer un voyage coloré dans le joli pays de Schizophrénie; coloré mais aussi très sombre car David n'est pas tout seul dans sa tête, on y trouve aussi notamment un bad guy jaunâtre, monstre psychique assez flippant; Ce n'est certes pas une série à bingewatcher comme un goulu, plutôt un grand cru à savourer épisode par épisode, tant on peut passer du thriller horrifique à la pure science fiction, naviguer de la comédie musicale au flowerpower des seventies ou au Maroc d'après guerre..Noah Hawley a reconnu avoir voulu explorer un aspect inédit de l'univers Marvel, pari largement gagné..On est loin ici de la pyrotechnie fatigante des blockbusters crétinoides, mais on n'est pas plus dans la noirceur réaliste et urbaine des (bonnes) séries Netflix, Daredevil ou Jessica Jones, on est simplement..ailleurs! Le concept X-Men n'est d'ailleurs jamais évoqué; de toute façon perso, je suis très peu passionné par les Marvelleries au cinéma (exception faite pour Logan, chef d'oeuvre crépusculaire du sous estimé James Mangold; regardez sa filmographie, il y a quelques pépites); Alors certes Légion ne plaira pas forcément aux ados, ça tombe bien ça ne leur est pas forcément destiné, et ça tombe bien je n'en suis plus un (j'ai 107 ans); bon, je digresse dans tous les sens, mais la série aussi, nous offrant souvent des changements d'époque, de lieu et de points de vue; elle nous narre les mésaventures d'un homme (David donc)qui a passé une bonne partie de sa vie dans un hopital psychiatrique, étiqueté schizo incurable jusqu'à ce qu'il envisage que ses visions démentes pourraient refléter ses propres super pouvoirs; et bingo, il est bien un super héros, télépathe, télékinésique, capable de distordre l'espace temps et autres joyeusetés réjouissantes;du coup il s'échappe, facilement on s'en doute, de sa prison, traqué par une obscure agence gouvernementale, et assailli par ses propres démons intérieurs; et c'est parti pour un tourbillon de rebondissements parfaitement imprévisibles..La mise en scène est ambitieuse et l'esthétique proprement époustouflante, comme si Terry Gilliam et David Lynch avaient fusionné en un seul corps en s'injectant de l'Adn de Salvador Dali et de Timothy Leary (le pape du LSD); hommage revendiqué à Pink Floyd ,un personnage s'appelle d'ailleurs Syd Barrett ,(qui s'était cramé le caisson au LSD); Dan Stevens incarne David comme si lui même avait mariné en HP pendant 25 ans, il y a des androides à moustache, un grand trou dans le désert d'où jaillissent des créatures improbables et Aubrey Plaza..C'est d'une beauté fulgurante, la bande son est ébouriffante, les scènes sont conçues comme des tableaux; et en plus comme la série s'arrête officiellement au bout de la troisième saison, il n'y a pas le risque d'un sabotage de dernière minute comme pour GOT; j'ai été subjugué, scotché, fasciné comme très très rarement à la télé..allez, j'ose le mot : chef d'oeuvre!