Un peu d'originalité dans un genre balisé
Largement au-dessus du lot habituel des séries policières, Les petits meurtres d'Agatha Christie marque ses premiers points avec pour personnages principaux un duo d'acteurs vraiment bons dont les scénaristes ont su tirer partie en les étoffant comme il se doit. L'interaction entre le commissaire Larosière, homme sévère féru de poésie et plus ou moins maniaco-dépressif, et son subalterne Lampion, homosexuel un peu gauche et aimable, forme un contraste bienvenu, avec juste la dose d'humour qu'il faut.
Les personnages secondaires sont parfois assez médiocrement joués, mais cela est compensé d'une part par le duo principal et d'autre part par des répliques bien senties mettant l'accent sur les dysfonctionnements relationnels : mépris ouvert, hypocrisie, amour déçu, etc. Le tout bénéficie du cadre de l'époque (les années 30) et des scénarios librement inspirés des romans d'Agatha Christie : ainsi, si les intrigues ne sont pas toutes extraordinaires, elles sont au moins toutes correctes et savent maintenir l'intérêt. On apprécie bien sûr l'accent mis sur les interactions entre personnages secondaires, tous rassemblés en fin d'épisode pour être confrontés à la vérité - un procédé là encore cher à l'auteure.
Lorsque les acteurs principaux (Antoine Duléry et Marius Colucci) ont décidé de quitter la série, celle-ci a su se renouveler intelligemment en changeant le cadre (place aux années 50) et les protagonistes. On a maintenant affaire à un commissaire misogyne et cynique qui doit composer avec une jeune journaliste culottée et garçon manqué ; le résultat est un peu cliché mais les personnages sont suffisamment hauts en couleur et bons interprètes pour garder l'attention éveillée. Les thématiques abordées ne sont donc plus tout à fait les mêmes (place des femmes sur le marché du travail, etc) bien que la construction des épisodes suive le même schéma qu'auparavant.
Finalement, dans le paysage télévisuel des séries policières, Les petits meurtres d'Agatha Christie ont une saveur que la plupart des autres n'ont pas du fait de leur trop grande ressemblance (dans le genre, on la mettra plutôt aux côtés des Enquêtes de Murdoch) et jouit enfin d'un avantage de taille : les épisodes sont suffisamment espacés et peu nombreux pour que leur réalisation bénéficie d'un minimum de soin. Assurément une œuvre dont il faudra se souvenir.