Cette série animée a eu des prémices. Dans les années 60 on a eu une série TV avec des acteurs en chair et en os mais malgré des qualités, le budget était modéré et quelques défauts empêchaient d'en faire une vraie pépite. En 1986, une autre série Michel Vaillant était en préparation mais ce qui a mis un frein à ce bel élan... Bernie Ecclestone le grand argentier de la F1, qui demandait une montagne de fric pour utiliser la licence F1. Aurevoir. Du coup, on s'est rabattu sur un dessin animé.
Mais comme disent les Inconnus, nous les français, on sait pas dessiner. Les studios d'animations bien de chez nous étaient rares alors, IDDH était tout récent, Ellipse (connu plus tard pour Babar, Tintin, Doug...) est apparu en 1987, C&D qui s'occupera donc de Michel Vaillant également, et les deux devront s'allier les services de studios outre-atlantique notamment au niveau du financement, pour y arriver. Ce qui explique en partie l'échec de cette série, les américains (chez qui cette série s'appellera Heroes on hot wheels) ont de toute évidence imposé des choses.
Finalement en 1990 débarque le dessin animé Michel Vaillant. Je l'admets, je n'ai pas vu les 65 épisodes, ne délirons pas. Mais j'en ai tout de même vu un certain nombre.
Le générique, bien ancré dans son époque, est cool. L'orchestration, les images de moto, de Formule 1, de rallye, ça s'enchaine bien, il y a des accidents... c'est vraiment sympa, on savait faire des génériques à l'époque. Cela dit, ou ils ont mis la musique trop fort, ou le chanteur avait une extinction de voix : Le couplet de départ j'ai du réécouter plusieurs fois pour capter toutes les paroles. Une fois qu'il s'agit de scander “Michel Vaillant” en revanche, ça arrache pas mal. Et comme le voulait la mode de l'époque, c'est assez long : 1 minute 15.
Mais disons-le tout de suite, passé le générique, difficile de trouver quelconque qualité. Le générique justement nous l'avait promis, mais c'était pas forcément la meilleure idée qui soit : Le Leader est là et bien là. Jean Graton avait voulu ce méchant style James Bond dans les albums. Mais au final, l'homme en lui-même n'a d'importance que dans environ 10 albums sur 70. Or ici, il est sur-représenté. Même dans des épisodes où on se dit que le scenar est assez interessant pour s'en dispenser, non, il faut qu'il vienne foutre le bordel. Une course d'Off-Shore sur les canaux de Venise, Michel qui fait des cascades pour le cinéma ou qui teste les voitures volantes du futur (et oui...) ça parait assez cool en soi pour se passer de méchant non ?
Ah oui et puis le Leader a une main mécanique. En fait si on ne voyait pas son visage on pourrait le prendre pour le frère du Docteur Gang dans l'inspecteur Gadget, vu son caractère et son repère. Il a aussi des caméras partout, dès qu'il veut voir quelquechose il tape sur une touche (avec les fameux claviers multicolores vus dans des tonnes de séries) et on dirait qu'il peut voir n'importe quel endroit sur terre. C'est pratique. Et puis que serait un méchant sans ses fameux “Evil Laugh” et les épisodes qui se finissent par ce dernier affirmant “la prochaine fois je vous aurai...” ? Ruth est là elle aussi, mais elle semble avoir perdu tout caractère, tout juste bonne à être le chien-chien du Leader et à faire des boulots improbables. Je me demande aussi pourquoi ils ont changé les couleurs de l'écurie Leader qui passe du rouge flashy au noir et jaune/orange, avec un logo proche de celui de Renault. Là, je ne vois pas ce que ça avait de compliqué de garder l'élément original. Ah et, bien entendu, les pilotes de Leader comme Cramer passent de loosers pathétiques à bons gros clowns.
Bon j'ai parlé des méchants mais les gentils sont là : Michel Vaillant, Henri Vaillant, Steve Warson, Julie Wood, Franck Vaillant... ah oui, des personnages ont été rajoutés ici. Michel a un jeune cousin nommé Franck. C'est une tête à claques. Mais surtout ça fait sauter le personnage de Jean-Pierre. Je suppose qu'ils se sont dit qu'avec Henri Vaillant ils avaient le patron et le vieux à la fois, pas besoin d'un grand-frère à Michel, au contraire, il faut rajeunir tout ça ! Nulle trace aussi de Françoise ou Elisabeth. A la place, Franck a une amie photographe gonflante, Anna. Et puis je n'ai vu La Jonquière, la maison familiale, dans aucun épisode.
Le fan de Michel Vaillant parle ici je l'admets; et peut-être aussi que je le vois trop avec des yeux d'adultes. Mais j'ai du mal avec plein de choses. Comme le fait qu'aucun élément réaliste des courses n'est respecté : Un patron fait une proposition spontanée à un pilote un soir, il se serrent la main, deux minutes plus tard on le présente au staff, le lendemain il est sur la piste alors qu'il a raté les qualifications. Ca pouvait passer dans les années 50 mais plus dans les années 90. Et puis Warson qui fait le boulot des mécanos, car il faut dire qu'aucune écurie n'a l'air d'en avoir plus que 3, ou encore un mécano de chez Vaillante (l'unique mécano de chez Vaillante ?) qui fait voler un petit hélicoptère téléguidé au-dessus de la piste pendant une séance... on y croit.
Malheureusement on touche justement à un problème de la série évident : Pas de licences. On ne parle pas de Formule 1. Pas de vraies marques, pas de vrais pilotes... On se retrouve avec, pour des grands-prix de monoplace, des appellations qui font penser à de l'endurance du genre “Les 400 km de Barcelone...” Bon d'accord, j'aime bien les pastiches de marques qu'on voit sur le bord de la route du genre Toctal ou Cabel, mais ça ne suffit pas. Je dois reconnaitre à la série une certaine variété néanmoins, avec de la moto, du off-shore, de la monoplace, du rallye, du stock-car, des courses de côte, des tests de voitures improbables... toutes ces courses sont souvent peu soucieuses de la réalité comme je l'ai dit, mais passons.
La réalisation des courses est... laide. Des lignes droites à n'en plus finir comme les terrains de foot d'Olive et Tom. Les mêmes images sont souvent reprises, l'animation est très saccadée. Quand les voitures tournent on a l'impression qu'il n'y a qu'une image intermediaire entre le moment où elles vont tourner et le moment où elles ont fini de tourner. C'est vraiment moche. Je parle des courses mais l'animation en général manque totalement de fluidité. Vous pouvez voir à la même époque la différence avec des dessins animés français qui ont du budget et qui ont été soignés. L'ambiance sonore est là par contre, encore heureux.
Et puis bien sûr d'un point de vue scenaristique on a des conduites totalement irresponsables qui n'amènent de problèmes avec les autorités que de manière totalement aléatoire, parfois je me suis dit “mais pourquoi n'est-il pas disqualifié celui-là ?” et rien, parfois je ne voyais pas le problème (du moins comparé à certaines autres fois) et paf : drapeau noir. Les pilotes enlèvent leur casque tout azimut longtemps avant d'être descendu de voiture, on a le sentiment que Leader ne gagnera JAMAIS une course... Et puis il y a des moments du genre Michel Vaillant double un pilote, le regarde longuement alors qu'il est cote à cote, lui fait un signe de la main doublé une réplique ironique (pourquoi se concentrer sur la piste, c'est vrai...) avec la réalisation qui suggère que l'autre pilote l'a entendu... je vous passe les voitures style K-2000 et les robots qui pilotent durant des grands-prix.
Je sais que c'est un dessin animé pour enfants mais ils peuvent avoir bien mieux comme série avec des accidents, des méchants diaboliques et des explosions. Or, d'un autre côté ça ne peut pas satisfaire les fans des albums. C'est donc une série un peu batârde comme il y en a des tas. Certains albums sont déjà assez invraisemblables sans qu'on en rajoute. Les très, très nombreux épisodes qui se finissent sur un rire général pour un réplique pas drôle (même pas censée l'être, Michel qui suggère à toute l'équipe d'aller au restau pour célébrer la victoire qui éclate de rire, où a t-il sorti une blague ?) ce sera sans moi. Et sans vous j'espère.