Nikita
5.7
Nikita

Série The CW (2010)

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"Nikita" est une série au parcours franchement atypique.
D'abord parce que, soyons honnêtes, tout le monde s'en contre-branle, s'en contre-carre et s'en contre-fout.
Cherchez qui, dans votre entourage proche et sans que vous n'ayez vous-même abordé le sujet, vous en a déjà parlé.
Voilà.
Ensuite parce que, soyons honnêtes, la série n'a rien à faire sur la chaîne où elle a été diffusée, entre Supernatural et The Vampire Diaries.
FInalement parce que, soyons honnêtes, elle est CENT FOIS MEILLEURE que la série... dont elle s'inspire.
Car oui, Nikita est une sorte de remake hybride et multipartite d'une autre série, "La femme Nikita". Les producteurs et autres scénaristes ne s'en cachent pas, puisque ce Nikita 2010 multiplie les clins d'oeils au film d'origine, bien sûr, mais aussi à la série canadienne que nous venons d'évoquer.
Personnellement, je situerais "Nikita" (2010) dans une sorte de dimension parallèle au film et à la série, avec autant de libertés prises que d'inspirations assumées. Dans cette version moderne, Nikita a déjà échappé à la fameuse division qui en a fait une tueuse internationale. Pour rappel, elle finit par s'en échapper dans le film et c'est comme ça qu'il se termine. Quant à la série, elle voit sa jeune blonde devenir carrément cheffe de la division, pour que cette organisation secrète devienne probablement plus humaine.
Bref, ici, il s'agit de découvrir une Nikita en fuite, prête à tout pour détruire pièce par pièce la Division.
On ajoute à ce pitch de départ un personnage-clé (en apparence) : Alex, qui va être infiltrée dans l'organisation pour mieux la détruire. On retrouve aussi Michael, le grand amoureux de Nikita, le grand méchant Percy et Amanda, la fameuse "maman" de la Division qui a droit à son équivalent dans toutes les déclinaisons du mythe Nikita.

Sur cette base, quatre saisons vont s'enchaîner, dans un cocktail explosif d'action, de suspens, de rebondissements, d'un peu d'humour et d'émotion. Premier constat : Nikita est une des rares séries à n'avoir que rarement cédé à la tentation du stand-alone. Les épisodes complètement détachés du fil rouge sont assez rares, voire inexistant : c'est un vrai feuilleton, à suivre du début à la fin.
Une fin, oui, parce qu'il y en a une : même si la dernière saison a été largement tronquée (6 épisodes au lieu des 22 habituels), elle a été pensée et calculée pour offrir une vraie conclusion à la série.
Entre le pilote et le sixième épisode de la quatrième saison, il s'en passe des choses, et c'est là sans doute LA plus grande qualité de cette série atypique. "Nikita" ne se repose JAMAIS sur des acquis. D'une saison à l'autre, toutes les cartes peuvent être redistribuées sans état d'âme.

Il n'est pas question de routine dans cette série où tout peut être perpétuellement remis en question, jusqu'au rôle-même des personnages. Certains éléments qu'on pense indestructibles finissent rapidement par tirer leur révérence. Certaines valeurs sûres de l'intrigue volent en éclat pour laisser place à une autre configuration...
Les décors, les habitudes, les relations entre les personnages, les jeux de pouvoir... tout peut changer et se redéfinir sans que jamais les scénaristes ne semblent freiner. Et ça, c'est bon.

Autre point très positif de la série : on ne peut que rarement s'ennuyer. Le rythme est particulièrement soutenu et l'action est suffisamment bien dosée pour tenir le téléspectateur en haleine. Les différents rebondissements s'allient généralement très bien au propos et à la structure de l'ensemble. Une scène de combat en amène une autre, puis débouche sur une scène plus calme sans jamais nous perdre.
La série peut aussi compter sur un scénario solide et complexe, malgré quelques gros raccourcis et quelques éléments capilotractés. La dernière saison fait particulièrement fort en terme de "over-the-top", et on se demande parfois jusqu'à quel point les scénaristes bluffent dans leur maîtrise du fil rouge. Qu'importe, l'ensemble tient quand même bien la route et permet d'exploiter l'idée de Luc Besson forcément beaucoup plus loin que ce qu'il n'aurait jamais imaginé. Je ne sais pas s'ils ont prévu une troisième série sur le sujet, mais si c'est le cas, ils auront du mal à trouver quelque chose de solide. On a fait le tour. On l'a bien fait, mais on l'a fait quand même.

Bref, à la question : "Vais-je trouver en Nikita une série pleine d'action, de suspens, de retournements de situation avec tout de même une certaine intelligence dans le scénario et la construction de l'intrigue ?", la réponse est OUI.
Oui. Mais. "Nikita" n'en reste pas moins une série assez superficielle, souvent trop "propre", qui propose ses développements d'intrigue de manière presque "scientifique", au mépris parfois de la subtilité.
"Nikita" est sexy est à outrance, une série qui joue sur tout un bouquet de codes esthétiques parfois aveuglants qui ont tendance à aseptiser le propos. Sur ce plan, "La femme Nikita", l'autre série sur le même thème, avait réussi à créer une ambiance nettement plus malsaine, dans la tradition des films noirs. Pour cette version 2010, on crée quelque chose de trop convenu dans la forme, de trop carré. La Division, cette usine à tueurs démoniaque, fait nettement moins peur et semble nettement moins étouffante bien que Nikita nous répète que ce sont de gros méchants et qu'ils ont tué son gentil fiancé. Le huis clos de la série canadienne laisse place à une série pleine de voyages un peu en carton, avec des paysages studios dans tous les sens qui brillent mais qui puent un peu trop Hollywood. Ajouez à ça une pop de piètre qualité et une mise en scène relativement convenue : vous obtiendrez une série très, très conventionnelle dans sa forme. On mise tout sur l'action et le scénario, sans trop de souci artistique. C'est dommage.

Sinon, au niveau de l'intrigue, on peut pester sur la gestion assez calamiteuse des différents personnages du show. La fameuse Alexandre Udinov (Alex), présentée au départ comme le nouvel atout féminin de cette version 2010, épuise rapidement ses cartouches et devient au fil du temps un faire-valoir bouche-trou sans grande saveur.
Elle n'aura d'ailleurs jamais été aussi transparente que dans la dernière saison où l'on sent, à part peut-être à la toute fin, que les scénaristes ne savaient plus trop quoi faire d'un personnage qui n'aura jamais été à la hauteur de l'héroïne, ou même de certains autres personnages. À côté d'elle, il y a quelques rôles qui auront gravité autour du show comme des mouches autour d'un lampadaire : un certain Sean qui n'aura jamais vraiment trouvé sa place et qui aura fait des allers-retours irritant pendant deux saisons, un Sam/Owenn particulièrement énervant qui n'aura jamais vraiment servi à grand chose, et un Ryan Fletcher trop lisse auquel on ne s'attache jamais vraiment. Bref, "Nikita" gère assez mal son cast : les personnages viennent, repartent, les contrats semblent se bricoler par groupes d'épisodes et les acteurs font d'étranges slaloms. Finalement, c'est au coeur de la division (Nikita, Birkhoff, Michael, Amanda et Percy) qu'on trouvera les valeurs sûres du show.

Finalement, et celui qui a tout lu l'a peut-être compris, la série aura de temps en temps emprunté des chemins improbables, à grand renfort d'intrigues exagérées et surdimensionnées. "Nikita" aurait parfois gagné à se calmer et à se poser ; les ficelles peuvent s'avérer tellement grosses qu'on à de la peine à y croire. On a de la peine à savoir si les scénaristes avaient une idée, dès le départ, de là où ils allaient en venir. Non qu'il y ait de véritables incohérences, mais le show manque parfois d'homogénéité ; sa grandiloquence éloigne un peu trop souvent la série de son propos initial.

Qu'importe, ça reste un moment très sympa de télévision. Ceux qui ont déjà vu beaucoup de séries du genre (24, Alias, Chuck...) seront peut-être déçus car il n'y a finalement rien de très nouveau sous le soleil mais, si l'on met de côté cette comparaison, "Nikita" tient largement la route. L'ensemble est bien mené, intéressant, captivant parfois, et c'est toujours agréable de pouvoir commencer une série dont l'équipe a écrit la fin.
Vous pesterez parfois contre les scénariste devant telle facilité ou devant telle maladresse, devant tel retour bizarre de personnage ou tel rebondissement outrancier, mais vous ne serez sûrement pas insensible au côté sexy, ravageur, explosif et décoiffant de cette série relativement méconnue.
Botwin
7
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le 16 juin 2014

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