Cantabile ! (Reprise de ma critique pour le site animekun.net)
(Reprise de ma critique pour le site animekun.net)
Le pari de Nodame cantabile pouvait apparaître risqué : mettre au cœur d’un anime la musique classique. Toutefois, du fait du traitement même de ce thème et de son insertion dans une trame narrative certes simple mais efficace, l’anime se révèle vraiment réussi.
I. Le traitement du thème de la musique classique
Tout d’abord, commençons par ce qui m’apparait comme à la fois l’originalité et le grand succès de cet anime : le traitement de la musique classique.
Première question : faut-il être passionné absolu de musique classique avant visionnage ? A mon sens, non. Bien évidemment, si le simple son du piano agit sur vous comme le plus puissant des somnifères, si la notion d’orchestre vous donne des boutons, si en somme, vous détestez la musique classique non pas par préjugé mais par dégout réel, oui, bon, il faut mieux s’abstenir. En dehors de cela : foncez. Pour les néophytes, pour les curieux, pour les "je suis pas contre le classique mais j’ai jamais eu l’occasion" , la série est à mon sens une belle invitation à la musique classique. Les personnages, sous des formes détournées, commentent souvent les morceaux (pour les replacer dans leur contexte, pour expliciter des données techniques, pour juger une interprétation) et permettent ainsi de guider, très naturellement, le lecteur dans un univers que peut être il ne connait pas. L’anime use bien sûr parfois du charme de la complexité des termes techniques, pour mettre en valeur la virtuosité d’un personnage, mais sans perdre le spectateur inutilement. Les amateurs de musiques apprécieront cet hommage à la musique classique (et au musicien).
Nodame cantabile nous plonge vraiment dans un univers, à la fois à travers les œuvres mais également à travers la vie quotidienne du musicien. Le spectateur est invité à entrer dans l’envers du décor pour découvrir le monde de l’orchestre, l’extrême exigence du virtuose, la nécessité du travail acharné, l’ambivalence de compétition et d’entraides entre les musiciens, la délicate question de l’orgueil, le rapport des musiciens aux œuvres.
Autre point très positif : les morceaux sont véritablement mis en valeur : ils sont préparés par l’arrière plan de l’histoire (pendant l’interprétation d’un morceau, beaucoup de choses se jouent : une réussite, l’avancement d’un personnage etc.), ils occupent une vraie place dans l’action. Le morceau est joué assez longtemps pour être apprécié du spectateur, pour imprégner le spectateur. C’est la vraie force de cet anime, tout particulièrement dans la première saison : on a le temps d’écouter un morceau, sur plusieurs minutes. L’animation est d’ailleurs souvent en harmonie avec la musique – et on en vient même à accepter certaines extravagances (les fleurs qui viennent, grossièrement, entourer l’écran pour signifier une interprétation « fleurie » était-ce vraiment nécessaire ?).
Dernière chose sur le traitement de la musique classique : le choix des morceaux. Ici, on ne tombe pas dans la facilité d’une interprétation bancale de la Lettre à Elise et du Boléro de Ravel. Les morceaux choisis le sont pour leur concordance avec l’histoire, ce n’est pas une suite de morceaux archi-connus : le spectateur est amené à découvrir des univers très différents, des compositeurs très différents (et parfois peu connus, je pense à Rachmaninov par exemple). Les morceaux plus connus sont très bien traités et retrouvent leur saveur dans cet environnement propice.
II. Les personnages
L’anime nous présente donc deux personnages principaux, Chiaki et Megumi Nodame, deux génies de la musique aux caractères (caricaturalement) opposés. On retrouve ici une configuration extrêmement classique, pas une once d’originalité de ce côté-là. Le côté caricatural dans le traitement des personnages m’a dérangée au début, notamment avec le personnage de Nodame mais je trouve que de ce côté l’anime s’améliore dans la durée. Par exemple, l’extravagance de Nodame gagne en profondeur et parvient mieux à atteindre son but principal : nous faire rire, nous attacher à elle. Le traitement de la relation entre les deux personnages principaux, dans son évolution, est très subtil. Les personnages secondaires sont quant à eux très inégaux. Dans l’ensemble, je trouve que de ce point de vue également, l’anime s’améliore dans la durée.
III. Remarques diverses
Je trouve que le rythme de l’anime est bien géré, à l’intérieur d’un épisode et au niveau de la saison entière : on ne s’ennuie pas du tout mais on ne courre pas non plus après l’action et les rebondissements à tout prix, ce qui laisse le temps à l’écoute des morceaux et à une évolution en douceur des personnages.
L’une des composantes de cette série est l’humour, ce dont j’ai peu parlé, principalement par ce que c’est le genre d’humour qui me fait sourire, qui s’inscrit dans une certaine tradition de la japanimation mais ce n’est pas vraiment l’un des arguments forts qui me font apprécier la série. Cela apporte une légèreté appréciable qui participe à créer une atmosphère d’ensemble.
L’opening et l’ending – et ce pour toutes les saisons – sont mauvais. En tout cas, je n’ai pas DU TOUT accroché, et pour une série censée célébrer la musique, je ne comprends pas vraiment le pourquoi du comment. Il y avait moyen de faire quelque chose de sympa avec une reprise, même actualisée, d’un beau morceau mais non.
Les saisons suivantes sont de bonne facture (même si le premier épisode de la deuxième saison m’avait fait une très mauvaise impression) : proportionnellement, la place accordée à l’écoute des morceaux se réduit, ce qui est un peu dommage, mais au profit d’un approfondissement dans le traitement de la psychologie des personnages et de leurs relations (ce qui est vraiment une bonne chose).