Occupation
7.1
Occupation

Série BBC One (2009)

Bah voila, nous on a Joséphine, ange gardien, Plus belle la vie et Le repaire de la vouivre et les anglais - eux - ils ont Occupation... Quand la télé française de service public aura les couilles et le talent de pondre des téléfilms si beaux qu'il devraient sortir au cinoche... bah, on sera morts, sans doute...

Et l'on est même bien loin ici également des séries estampillées Canal + toujours sur-vendues et très souvent surestimées.
Il y a depuis lurette en Angleterre des liens étroits entre cinéma et télévision qui ne datent pas d'hier et nombre d'auteurs reconnus sont d'abord passés là-bas par la case TV avec des téléfilms qui sont chez nous sortis directement au cinoche... L'exemple le plus fameux étant le merveilleux My Beautiful laundrette de Stephen Frears il y a plus de... 35 ans...

Occupation est ce qu'on appelle un peu bêtement chez nous une mini-série... En réalité, il s'agit plutôt d'un long film découpé en deux segment (3 sur la BBC) pour en faciliter la diffusion télévisuelle.

Et, rendons à César ce qui appartient à César: le film - s'il s'inscrit dans une lignée télévisuelle toute anglaise - est bel et bien irlandais, ce point a son importance dans le récit et dans "l'esprit" du métrage.

Le film démarre par de l'action pure et nous laisse penser que l'on risque de se taper un de ces pensums de plus sur la dureté de la guerre et de nos pauvres soldats, ces types "comme nous" qui se retrouvent à souffrir et mourir sur les champs de bataille pour des causes plus que discutables puisqu'il s'agit ici de la deuxième guerre d'Irak...

Mais en trois minutes chrono de pré-générique, l'affaire est pliée et nos braves soldats rentrent à la maison...

Tout semble alors balisé pour nous refourguer une énième variation sur le retour difficile et l'inadaptation de ces hommes abimés à la vie "normale"... Ce qui est d'ailleurs le cas le temps de quelques scènes très sensibles et beaucoup plus subtiles que le tout venant cinématographique.

Mais très vite on pressent que le film n'est pas là et que son sujet est bel et bien là-bas, en Irak, dans l'après-guerre et la reconstruction d'un pays qui s'ouvre à la liberté et à la démocratie...

Et tous nos héros valeureux, encore gorgés de leurs beaux idéaux de libérateurs et de leur aura triomphale semblent vouloir pour des raisons plus ou moins louables retourner sur les lieux et participer à "l'accompagnement" d'un pays en reconstruction, ou - au pire - de profiter du système pour s'en mettre plein les fouilles...

Il ne savent alors pas qu'ils s'engagent tous dans un autre type de bourbier où les vieux relents colonialistes des uns se confrontent à l'islamisme montant des autres et où les coups de fric opportunistes vont faire le lit du terrorisme et des extrémismes plutôt que de la démocratie et de la liberté.

Les dommages collatéraux seront alors bien plus destructeurs peut-être que la guerre elle-même et les hommes (et femmes) que nous suivons dans cette descente aux enfers paierons tous la facture au prix le plus fort, en Angleterre comme en Irak.

Ce film m'a totalement captivé et il faut bien dire qu'il traite avec beaucoup de subtilité et en évitant toutes lourdeurs et manichéisme d'un sujet totalement inédit à ma connaissance.
Il parvient avec beaucoup d'intelligence et de trouvailles scénaristiques à rendre ce sujet très complexe absolument lisible même pour des néophytes de la question comme moi et sa mise en scène a l'intuition de rester sobre et classique et d'éviter le spectaculaire qui aurait pu nuire au récit.

Les personnages ont tous une belle épaisseur et ne sont jamais d'un seul bloc, pas de gentils (excepté le couple Sadiq/Aliyah de médecins irakiens dont le métier et l'engagement auprès du peuple irakien induisent forcément une empathie totale) ou de méchants... les choses sont toujours plus complexes que cela... des deux cotés...


Pas plus de bourreaux que de victimes, non plus, ce qui en troublera sans doute certains...


Et point de final rédempteur ici pour remettre tout le désordre en place... au terme de ces trois heures captivantes, aucun personnage ne trouvera de véritable salut et il n'y aura guère de place pour une salvatrice rédemption...
Juste pour le silence après le chaos et le temps d'un deuil qui s'annonce long et difficile.

Dont le spectateur sort aussi groggy que les protagonistes...
Foxart
8
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le 12 août 2014

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