J'ai adoré la première saison de Rick and Morty. C'était la série innovante, drôle, violente, couillue qu'on attendait. Celle qui donnait un coup de pied bienvenu dans la fourmilière - quelle expression affreuse pour les fourmis.
Les saisons 2 et 3 continuaient à surfer sur le cool, mais avec un petit quelque chose qui me gênait sans parvenir vraiment à mettre le doigt dessus.
Avec la saison 4, c'est devenu flagrant. Rick and Morty a tout tenté, et tout perdu.
D'abord parce qu'elle tourne en rond. Les personnages n'ont pas évolué, malgré les changements dans la sécurité scénaristique des deux premières saisons. Rick est toujours abusif et malheureux, et comme un House of Cards, on ne risque pas d'y toucher : pourquoi mettre en danger une formule qui marche ? Pour se renouveler et éviter de tourner en rond ? Quand on est une série qui tape allègrement sur la fixité des autres medium, il serait effectivement logique d'éviter de tomber dans le piège de la sécurité-facilité... mais faites ce que je dis, pas ce que je fais, c'est encore la meilleure façon de vendre des BD et des goodies.
Deuxième problème, ce qui faisait l'intérêt de la série, son intelligence, son auto-dérision et sa capacité à briser le 4e mur, sont devenus des ficelles utilisées systématiquement, sans révolution. En plus de donner l'impression que la série est plus intelligente qu'elle ne l'est vraiment, elle se garantie ainsi une place d'ovni inatteignable, au-dessus du panier. Le problème, quand on se croit trop intelligent, c'est qu'on voit rarement quand on commence à marcher dans sa propre merde. Par exemple en ne construisant tous ses premiers épisodes de la saison 4 que sur un système de parodie de ce qui existe déjà (une oeuvre, un genre), pour critiquer, mais sans rien apporter au-delà de la critique. C'est rigolo, mais si ça ne mène pas plus loin, on devient juste, à force de vouloir faire croire qu'on est meilleur que les autres, une caricature de soi-même.
Et enfin, ce qui me paraît le plus triste et le plus impardonnable, c'est finalement ce que j'appelle le "syndrôme South Park". Qui consiste en quelques mots à taper indistinctement sur tout le monde, au même niveau. Résultat, pour South Park, des années à se foutre de la gueule d'un Al Gore par exemple, mis au même niveau qu'un Bush ou qu'un Trump. En ressortent des séries avec un regard critique sur l'actualité ou sur le monde de la création, mais aussi des séries qui mettent tout le monde au même niveau, sans avoir ni la subtilité de faire des nuances, ni les couilles de soutenir une idée parmi d'autres. Un exemple : le dernier épisode de R&M que j'ai regardé ce matin, probablement le dernier que je verrai de la série, celui dans un train (S4E06 je crois). Y trouver au même niveau une critique de la consommation capitaliste effrénée et une critique des discours féministes dans les mediums artistiques contemporains (quoi qu'on pense du test de Bechdel), franchement, moi ça me fout en rogne.
Et je ne peux pas m'empêcher de comparer R&M avec une série comme Steven Universe, qui n'a pas fait son succès, son talent et sa réputation sur sa prétendue intelligence, sa critique automatique de tout ce qu'elle aborde et sa pseudo-neutralité cynique. Non, Steven Universe est une bien meilleure série parce qu'elle ne transforme pas en merde tout ce qu'elle touche, mais au contraire parce qu'elle choisit de toucher moins de sujets, mais de les toucher avec sensibilité pour informer le spectateur et le rendre plus tolérant.
On finit une saison de Rick and Morty en étant certes plus critique, mais surtout en étant plus cynique.
On finit une saison de Steven Universe en étant une meilleure personne.
Perso, j'ai fait mon choix.