Rivière illusoire

Comme beaucoup de gens, j'aurais pu complètement passer à côté de cette série qui d’apparence peut faire penser à un ersatz de Luther, un Luther proche de la retraire et un peu moins costaud mais tout aussi déprimé (si ce n'est pas pire)
Mais là n'est pas la question car River n'est pas Luther. Il est bien mieux que ça.

River , c'est déjà un personnage principal frappant d'humanité.
Interprété par Stellan Skarsgård, John River est un flic usé ( oui les anglais aime bien usé leurs flics ) qui se retrouve à enquêter sur

Rien d'original, me direz vous, sauf que l'inspecteur , depuis sa plus tendre jeunesse, est frappé d'hallucinations et se retrouve à parler à des visions qu'il est le seul à voir.
Solitaire, froid aux premiers abords (et aux seconds aussi), il surprend par des petits moments de joie toute simple soutenue par une musique qui enrobe le tout à merveille (les seuls moments vraiment entraînants de la série).
Ce qui est fort, c'est qu'au début on est un peu comme tout le monde. On le trouve agaçant voire carrément frappé quand ses délires prennent le pas sur le réel. Et puis petit à petit, on s’attache au bonhomme, on commence à le comprendre et plus on en apprendra sur lui et sur ceux qui l'entourent plus on le trouvera attachant.
Car il n'est pas comme il est pour rien. Il est le fruit d'une histoire complexe et lourde qui ne lui a jamais permis de se construire réellement ( on y retrouve d'ailleurs des réminiscences dans son enquête ).

L'intrigue, plutôt classique n'en est pas moins passionnante.
On rentre très vite dans l'histoire ( d'où mon spoiler pour ceux qui aurait envie de regarder cette série sans ne rien savoir sur celle-ci ), les pistes se multiplient allant de la plus simple à la plus tordue.
De ce point de vue , même si la conclusion est glaçante , je l'ai trouvé un peu moins surprenante.
J'avais assez vite penché pour cette hypothèse en pensant qu'il n'oserait pas aller jusque là et au final si, ils vont jusque là.
D'ailleurs, certains pourront reprocher à l'ensemble d'être assez déprimant. Les personnages s'en prennent plein la gueule et River n'est pas le seul à morfler.
Mais c'est aussi cette atmosphère lourde qui rend les rares moments de joie quasi intemporels ( comme la danse du dernier épisode ).
D'ailleurs , on ne peut pas faire une critique de cette série sans parler de l'importance du sous texte.
Il y en a un assez simple et qui lie le tout , c'est celui de la solitude. La solitude d'un homme qui n'arrive pas à avouer ses sentiments, la solitude du couple marié qui se côtoie mais ne vit plus vraiment ensemble et surtout la solitude du migrant qui arrive dans un pays qu'il ne connait pas et qui ne l'accepte pas.
Cette thématique s'accorde d'ailleurs beaucoup avec le seconde qui est celle de l'abandon et une vision de la structure familiale assez sombre mais là je ne peux trop rien en dire sans en dévoiler plus sur la série.

Au final, River s'avère être la petite surprise de cette fin d'année en terme de série.
Solide à tout point de vue ( écriture, acteur, réalisation ), elle réussit à nous faire aimer un personnage en marge qui a tout pour être détesté.
Intelligente, émouvante et forcement attachante, River nous donne encore un aperçu ( s'il en fallait un ) que les anglais ont un vrai talent pour les séries policières et les drames sociaux.
On ressort un peu diffèrent à la fin du dernier épisode de River et ça, ça n'arrive pas souvent.