L'autre jour je fûte chez ma gynécologue dans la situation délicate appropriée quand soudain à la radio les infos se sont mises à cracher sur Trump. Une de ses anciennes relation extra-conjugale tarifée l'accusait publiquement de l'avoir quasi abusée, ce qui à la rigueur ne porte pas atteinte à son image auprès de ses fans. Puis surtout elle parlait de ses « poils pubiens de yéti » et de son petit sexe non-impressionnant ressemblant à « un champignon de Mario ». Malgré toute ma bienveillance et ma circonspection naturelles je n'ai pu m'empêcher de rire – oh mais que la gêne fut intense ! Ce moment que je vivais, à titre individuel et en tant que spectatrice des affaires du monde, semblait tout droit sorti de South Park. En même temps je le savais normal. Et c'est tout notre drame aujourd'hui : nous sommes dans South Park voire au-delà !
Et cette série, si elle n'a pas contribué à ce pourrissement, en est au moins un parfait emblème. À l'exception paraît-il d'un épisode sur l'alcoolisme de Stan devenu blasé (ce qui va encore flatter le chaland se croyant plus malin que les autres et trouvant alors une légitimité à sa dépression et à ses faiblesses d'esprit), tout n'y est que cynisme et ironie. L'humour enragé et les saillies péremptoires dissimulent une incapacité à s'engager, à faire l'effort de comprendre et d'accepter les gens autour de soi. On ne voit que de la bêtise en l'Homme car ça nous convient bien ! Si tous les autres sont des débiles, alors moi qui en ait conscience, je dois bien naturellement me situer un peu au-dessus ! Et quand bien même je ne peux rien fournir de supérieur ou seulement d'un peu valable, c'est sans importance – de toutes façons tout est sale et bête alors pourquoi s'en faire ? Qu'il est intelligent de patauger dans son marécage et se moquer des humains quand soi-même on ne vit que de cette moquerie, donc qu'on est et choisit la médiocrité.
Au moins cette série a le mérite de taper effectivement sur l'ensemble des tabous. Contrairement aux programmes de dérision à complaisance 'saturday night show' et gauchiste, qui restent les plus répandus, elle ne s'en prend pas qu'à des cadavres, des valeurs en berne ou des gens à terre. Le 'politiquement correct' trinque, oui, mais c'est encore l'occasion de rabaisser l'Humanité. De même les prétendus côté conservateurs, peut-être réels, ne surgissent qu'au service de happening immondes ; qu'on me dise ce qu'il y a de drôle dans ces running gag autour des fœtus avortés ?!
Prise de tous les côtés cette série n'a rien de bon. Elle s'adresse aux publics nihilistes et cartonne chez les mous parmi eux, qui profitent de la permissivité de la société pour baver sur ceux qui en profitent ou la dépassent. Ça fait maintenant plus de 20 ans que cette série pollue la tête de la génération XYZalphaducentaure, pourtant elle avait déjà plus que sa dose ! Vivement la fin, qui devrait être proche, en tout cas la fin du prestige et de la cohérence. En effet, avec Trump South Park est désormais dépassée – dépassée par un concurrent : car ces deux monstres n'auraient pas voie de cité sans la dégringolade morale que nous connaissons. Aussi voir South Park vomir Trump est insupportable ! C'est le comble de la stupidité et de l'ignominie de la part de cette série. Si seulement elle et ses fans acceptaient de porter un peu du poids des responsabilités de ce qu'est le monde au lieu de se cacher derrière les postures désabusées (et se rattraper en jouant les sous-intelligents raisonnables qui ne succombent pas aux « memberries » et à la beauferie trumpienne) !