South Park
7.7
South Park

Dessin animé (cartoons) Comedy Central (US) (1997)

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Ce soir, je voulais me divertir devant un standard de goût, un kiff de tout temps, une bonne base, en bref. Et comme il y a des choses immuables, j'ai décidé de re-regarder (les ayant sûrement déjà tous vus) un épisode de South Park. Après cet épisode (L'inqualifiable crime de haine de Cartman, premier épisode de la saison quatre, pour être précis) j'ai décidé d'être un exemple d'altruisme, et de gratter un article sur la série plutôt que d'en regarder un autre. Suis-je abnégationnesque, tout de même, si, si. Mais avant tout, vous aurez compris que je suis un fan (peut-être pas THE fan incontestable et incontesté, mais presque) de la série, mon avis sur la chose sera donc totalement subjectif. Allez, nous sommes partis.


South Park est une série pensée et écrite par Matt Stone et Trey Parker, dont la première saison a été diffusée en 1997 à la télévision américaine. Cette série d'animation est une de celles qui ont le mieux marché aux States, car elle a pratiquement bâti la réputation de la chaîne de télé la diffusant, Comedy Central. Il faut dire qu'en excluant les Simpson qui sont aux origines de ce type de série d'animation parodiant la société américaine, il n'y a guère d'autres séries de ce genre égalant South Park. Certes, du point de vue des gags, on peut citer American Dad ou d'autres, mais en plus de cela, il y a une profondeur dans le scénario et le message délivré par South Park qu'on ne retrouverait pas dans Family Guy, par exemple. Les personnages principaux, qui sont quatre gamins typiquement américains vivant dans la petite ville éponyme du Colorado, où on penserait qu'il n'arrive rien, vivent en fait plein d'aventures mindfuck pour notre plus grand bonheur. Le retournement de situation et la parodie sont à la base des scénarios des épisodes de South Park, et Stan, Kyle, Cartman et Kenny sauvent bien souvent les adultes de leur ville, toujours prêts à se jeter dans n'importe quelles excentricités. Les enfants sauvent toujours leur ville de catastrophes, volontairement ou non. En plus des fous rires qu'ils nous apportent par des situations absurdes ou déstabilisantes, les épisodes nous procurent des enseignements, la rumeur voulant qu'une morale soit cachée dans chaque épisode de la série. Beaucoup d'épisodes, à titre informatif, reposent sur la relation de meilleurs potes entre Stan et Kyle, les rivalités entre Kyle et Cartman et les blagues ignobles que ce-dernier fait subir à Butters (voire les personnages présentés plus bas). Les aléas de la vie amoureuse de Stan et sa copine Wendy et toutes les morts de Kenny (qui meurt à chaque épisode jusqu'à la saison cinq, environ) sont aussi des lietmotivs sur lesquels il faut compter. Une histoire complexe vient ensuite généralement se superposer à ces éléments, ce qui fait toute la particularité de South Park.


Du point de vue de l'animation, c'est spécial et particulier à la série : une technique proche de celle du dessin animé, avec du papier découpé, mais réalisé à l'ordinateur pour un gain de temps précieux et une qualité adéquate. Ça peut paraître étrange au début, mais on se fait au style d'animation très rapidement, car il est en évolution perpétuelle depuis la première saison. Personnellement, j'ai accroché tout de suite : c'est simple, coloré, sympa à regarder. D'ailleurs, regardez un épisode de la saison dix-huit puis un autre de la première saison à la suite, vous observerez la différence et l'évolution des techniques de réalisation par ordinateur. La musique a également une place importante dans la série, en raison de son pouvoir comique et parodique (voir le personnage de Chef). De plus, en VO ou en VF, (regarder South Park en VO ou VOSTFR, c'est quand même mieux) je trouve que le générique claque, et sous toutes ses formes, représente bien la série. Voilà, c'était un petit topo sur le visuel de la série, même si ce n'est pas ce qui m'intéresse le plus ici.


Il faut dire que de nombreuses personnes ne connaissant pas bien l'univers de la série se la représentent comme scato, puérile et à la fois provocante. Et bien, il serait dommage de s'arrêter à ces à prioris, ou encore au personnage de Cartman harcelant Kyle avec ses "Ta gueule, connard de Juif!..." et autres répliques controversées, lorsque perçues hors contexte. Bien sur, les insultes antisémites de Cartman, running gag permanent, sont importantes à la série et sont une sorte d'image de marque qui lui collent à la peau. Mais il ne faut pas en être courroucé, et juger la série intolérante pour autant, car elle ne s'arrête pas à ça. Bien sur, le vulgaire, le scato et le sanglant symbolisent la série, et c'est ce que Parker et Stone ont toujours voulu : de par le langage des gamins, ils souhaitent montrer à la société américaine comment parlent les enfants qui la constituent, mais ils veulent aussi rappeler au public adulte (pour lequel la série est officiellement réservée) "comment c'était d'avoir huit ans" du moins selon eux. Pour ma part, l'aspect grossier des dialogues m'a toujours fait rire, car c'est vulgaire sans être lourd, et sachant la finesse des sujets abordés par la série, ça pourrait d'autant plus déborder. En ce qui concerne la provocation, je juge qu'elle est intelligente et rondement menée : les réalisateurs de South Park s'acharnent sur tous les sujets et ne respectent rien, ce qui nous apporte un bonheur jouissif, et à la fois, il ne franchissent jamais (selon moi) la barrière de l'intolérance et de la sale blague facile, même si la série fait un éloge total de l'irrespect. En gros, le côté "provoc" de la série est plutôt satirique et joyeusement cynique, et met en valeur avec talent toutes les tares de la société américaine. On peut avancer que les personnalités publiques ne sont pas épargnées, mais il me semble que primo, en mettant leur vie sur le devant de la scène, elles doivent assumer leurs convictions au grand jour, et secondo, elles le méritent. Comme on est heureux de voir Paris Hilton remise à sa place par la série... Le scénario de South Park ne dévoile jamais rien de trop personnel concernant les personnalités représentées, car pour que ça soit drôle, il faut qu'il y aie au pire une rumeur et au mieux un fait reconnu que la star essaie vainement de cacher (Tom Cruise et son rapport à la scientologie, par exemple). On parle ici des acteurs et des chanteurs parodiés dans la série, mais ça ne s'arrête pas là : Jésus a son propre personnage (sacrément badass d'ailleurs, car avec ses lunettes noires, il règle autant ses problèmes à coups de paraboles que de mitraillettes) qui a une grande importance dans les débuts de la série, car il a sa propre émission de télé nommée "Jesus et ses potes" où il répond aux questions de foi des personnages de la série. Il aide Stan et Kyle à maints reprises, et tout en étant relativement soft, il a quand même réussi à faire gueuler beaucoup de catholiques. Cependant, Satan et Saddam Hussein sont également de la partie et très proches l'un de l'autre, sans compter Mahomet qui apparaît brouillé suite à des menaces et des polémiques, mais qui est bien présent quand même. Ce qui me fait rire, c'est que si un des réalisateurs de la série n'était pas Juif, vu comment South Park pousse l'autodérision et la représentation de l'antisémitisme dans ses extrêmes retranchements, j'imagine que le show se traînerait des procès au derrière.


Pour conclure sur cet aspect de la série et quoiqu'en disent les critiques, South Park me paraît utiliser, malgré des apparences trompeuses, une vulgarité habile et recherchée et affirmer une provocation qui en fait un des rares programmes regardables où aucune limite n'est apparente, parce que le choquant choque précisément là ou il le faut. Sincèrement, cette série est selon moi basée sur une alchimie brillante et difficilement reproductible : un mélange à la fois fin et populaire, un alliage d'esprit critique et d'incorrect, un cocktail défendu mais sans danger.


Sinon, tout comme les Simpson, la série doit une belle part de son succès à ses nombreux personnages secondaires. On peut les voir (presque) tous en arrière plan sur le poster du début de l'article. Il faut dire qu'il sont plutôt savoureux : M. Garrison, professeur inconséquent et pervers de la classe des enfants, qui tire toutes ses leçons de séries télévisées. Il a été consécutivement homosexuel, hétéro, lesbienne (il change de sexe deux fois dans la série) et paraît d'autant plus perdu et déphasé avec la réalité que ses élèves eux-mêmes. Il s'encanaille de temps en temps avec M. Esclave, autre homosexuel tordant qui ne fait que prononcer son éternelle réplique "Seigneur Dieu!' sur un ton efféminé. Garrison est caustique et accumule toutes les tares, ce qui fait de lui un caractère jouissif et immanquable de la série. Par ailleurs, il y a bien évidemment l'ineffable M. Mackey, conseiller pédagogique de l'école qui n'a jamais vraiment aidé personne, possédant une tête énorme due à une cravate trop serrée, il ponctue ses phrases de "m'kay", tic langagier légendaire du comique de répétition. Randy Marsh, père de Stan, est excellent aussi : il est normalement un géologue très sérieux, mais il se laisse toujours entraîner dans des lubies qui menacent l'ordre de la famille. De même, Butters, personnages faire-valoir devant l'éternel, est aussi très important à la série. C'est le seul enfant qui soit encore véritablement un enfant : il est naïf, poli, possède des parents tyranniques, (son père le punit tout le temps, avec sa célèbre réplique "Butters ! You are grounded, young man!...") se fait constamment charrier par ses camarades et Cartman en particulier, enfoiré intemporel avec lui. Un personnage capital au début de la série était Chef : cet afro-américain cuisinier de l'école aidait toujours les enfants avec ses musiques en improvisation. Mais il ne faut pas non plus oublier Jimbo & Ned, caricatures de rednecks notoires, Madame le maire et ses mœurs étranges, ou la mère de Cartman, nymphomane de renom. Vous pouvez donc remarquer la diversité des personnages et leur hilarant potentiel.


Et bien, je crois avoir dit le principal sur la série en elle-même. C'est donc à vous de vous envoyer quelques épisodes si vous en avez envie. Je pense que vous ne le regretterez pas. Et si vous n'aimez pas, c'est vous qui voyez, en sachant que "tous les personnages et les événements de ce dessin animé, même ceux basés sur des faits réels, sont totalement fictifs. Les voix des personnes célèbres que vous pourriez entendre sont des imitations (pitoyables). Les dialogues de ce programme sont d'une parfaite vulgarité, et pour cette raison il devrait être interdit à tout public." J'adore cette phrase. Vraiment. Et la mettre au début de chaque épisode pour décrédibiliser sa propre création est un sommet d'auto-dérision. C'est vous qui voyez !

Lefuneste
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le 23 janv. 2016

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