impressionnant
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le 8 mai 2019
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J'analyse le contenu du documentaire, donc il se peut que des éléments que je cite soient considérés comme des spoilers.
Je suis très remontée et en colère, après avoir visionné le documentaire Netflix sur Ted Bundy.
J'estime qu'en plus de n'avoir pas tenu sa promesse (le titre est très trompeur), le documentaire n'apporte rien et pire - par sa forme et son fond lacunaires et même superficiels - délivre un message qui peut s'avérer pernicieux, voire pervers.
1 - La faiblesse du matériau : Le documentaire affiche la couleur avec son titre alléchant, mais finalement racoleur : "Conversations with a Killer : The Ted Bundy Tapes". La promesse est de s'appuyer sur des cassettes enregistrées en 1980 dans le couloir de la mort, des confessions faites au journaliste américain Stephen Michaud, qui nous permettraient de pénétrer l'intimité de la pensée de ce tristement célèbre serial killer.
Mais très vite, dès le premier épisode, il apparaît que le matériau est loin d'être suffisant, consistant. Pas surprenant, quand on sait que le propre d'un psychopathe manipulateur est de mentir, travestir la vérité, déformer les faits, prendre au piège son interlocuteur (et éprouver une grande jouissance à le faire). En réalité, pour l'essentiel de ce que l'on entend, il ne s'agit que d'un simulacre de confessions.
Le résultat ? 100 heures d'enregistrements de cet homme narcissique, extrêmement dangereux, qui adore s'écouter parler, transpire le sentiment de toute-puissance, n'éprouve aucune émotion, aucun remords, joue perpétuellement la partition de la victime (alors qu'il a massacré a minima une trentaine de jeunes femmes et même une jeune adolescente).
Alors, que faire, puisque tout cela manque de substance ? Netflix a la solution ! Des images-chocs au grain vintage, montées et présentées en rafale, parfois en boucle, pour donner un semblant de profondeur à cette enquête, une cadence, de l'épaisseur dans le propos. Sauf, qu'en ce qui me concerne, ce procédé m'a donné le tournis et a fini par m'écoeurer.
2 - Une froideur clinique qui passe à côté de l'essentiel : J'ai eu une impression étrange, inhabituelle et dérangeante, que je n'ai pas ressentie devant d'autres True Crime bien plus finement présentés, avec un vrai travail d'analyse.
Ce documentaire m'a donné le sentiment qu'il n'y avait rien de plus qu'une énumération clinique des faits, avec une forme de froideur quasi-fictionnelle. Pourtant, on n'est pas en train de regarder une petite série télé. Non, ici il est question de crimes abjects, insoutenables, perpétrés par un seul et même homme.
Pendant les 4 h de visionnage - et bien que le dernier épisode distille quelques clés en ce sens - cette "enquête" passe selon moi à côté de l'essentiel : prendre le temps de dresser un portrait psychologique de cet effroyable monstre, expliquer en quoi sa psychologie, son comportement, ses mots, ses gestes lors de ses procès, son sentiment d'humiliation, son absence d'empathie et ... son glaçant sourire sont tout autant d'éléments qui signent une personnalité psychopathologique.
Pourquoi cela me semble-t-il essentiel ?
3 - Glaçante fascination : En s'affranchissant de cet indispensable travail d'analyse psychologique, qui donne du sens et de la valeur aux mots "psychopathe", "serial killer", "personnalité narcissique" ; en faisant l'économie de ce travail pédagogique / instructif, cette production Netflix a visiblement rouvert la boîte de Pandore et conduit certain.e.s à ressentir une fascination à l'égard de Ted Bundy.
Physique avantageux et charmeur, homme-caméléon aux mille visages qui sait se jouer des autorités (évasions spectaculaires, comédie outrancière et sens de la mise en scène lors de ses procès), beau parleur qui use de son intelligence perverse pour attirer les projecteurs sur lui ... D'aucuns y ont vu de belles qualités enviables, désirables même.
Et c'est ici que j'estime que la paresse et la faiblesse dont a fait preuve ce documentaire a produit un grave effet délétère, irresponsable, induisant une forme de fascination. Et plutôt que de se fendre d'un tweet pour remettre les pendules à l'heure, Netflix aurait mieux fait de se pencher à deux fois sur la qualité intrinsèque de son documentaire.
4 - Mindhunter, c'est beaucoup mieux : A titre de comparaison, l'excellente série Mindhunter, qui raconte l'histoire vraie d'une équipe de consultants au FBI ayant formalisé le concept de serial killer est bien plus subtile. Grâce à elle, on en apprend plus sur les mécanismes qui régissent ce type de personnalité hors du commun, loin de la représentation manichéenne et caricaturale des assassins de masse, que l'on a pu voir fleurir sur nos écrans, grands et petits.
Car, oui. Derrière un visage affable, de beaux yeux bleus, un sourire ravageur, peut se cacher une personne extrêmement dangereuse, qui n'aspire qu'à une chose : tuer.
Créée
le 4 avr. 2019
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