C'est forcément avec un peu de méfiance que l'on accueille un projet comme "The Boys : Diabolical" qui, en plus d'un autre spin-off en cours de développement sur des jeunes super-héros du même univers, a tout d'un simple appendice animé uniquement conçu pour faire perdurer le succès de sa série-mère durant le (long) temps d'attente entre deux saisons. Et, dans le fond, "Diabolical" n'est bien sûr que ça, un amuse-gueule avant le retour de Homelander et sa clique en live action mais on ne peut être que très agréablement surpris par la qualité de cette salve de petits fours qui reprend tous les ingrédients les plus savoureux de l'esprit trash de son modèle pour aller s'éclater dans le champ inédit de liberté offert par l'animation.
Le ton est d'ailleurs tout de suite donné avec "Laser Baby's Day Out", écrit par le duo de producteurs derrière de "The Boys": Seth Rogen et Evan Goldberg ! Grâce à ce scientifique tentant par tous les moyens de sauver un super-bébé des griffes de Vought, le tandem réussit brillamment à mêler la mythologie de "The Boys" (avec les dérives autour du fameux composant V) et son ADN de violence explicite au sein du délire d'un bon vieux cartoon de Looney Tunes. Mieux, alors que les geysers d'organes et les corps découpés côtoient désormais les gags les plus absurdes typiques de ce genre de dessin animé, ce premier épisode parvient à en conserver l'innocence avec les contours naïfs de ses personnages pris au piège du contexte des agissements les plus malsains de Vought, le tout au rythme d'une course-poursuite on ne peut plus dynamique et fort amusante à suivre.
L'enfance et le composant V se retrouvent à nouveau au coeur de "An Animated Short Where Pissed-Off Supes Kill Their Parents" scénarisé par Justin Roiland ("Rick et Morty") pour une vengeance mettant en scène une galerie de personnages brisés absolument géniaux, aux pouvoirs tous plus barrés les uns que les autres dans un épisode qui ne cesse d'impressionner par son inventivité délirante ! On n'en dira pas plus, le titre le fait pour nous, mais c'est un de nos chouchous de la saison.
Avec Garth Ennis à l'écriture (l'auteur de "The Boys"), "I'm Your Pusher" est un petit événement en soi et voir certains protagonistes emblématiques prendre enfin vie avec leurs traits des comics fait forcément son effet. Si l'animation correspond plus à ce que l'on attend habituellement d'une série de super-héros animée, le mauvais tour concocté par Butcher -et donc Ennis- envers les Supes vaut vraiment le coup d'oeil, surtout dans la montée en puissance de folie et de gore qui gicle bien aux quatre coins de l'écran lors de son final jouissif.
Vivre une histoire d'amour dans le monde de "The Boys" n'est pas une chose aisée, surtout lorsque le composant V est de la partie. "Boyd in 3D" en apporte une nouvelle fois la preuve avec une crème très spéciale qui va emmener la romance de deux personnes très ordinaires vers les sommets puis les fosses sceptiques de la gloire virtuelle, agrémenté du cynisme désormais incontournable de ce monde super-héroïque. Une prenante descente aux enfers romantique imaginée par Eliot et Ilana Glazer.
Alors là, chapeau Awkwafina qui signe (et interprète) probablement l'épisode le plus WTF de cette saison ! On ne pensait pas écrire ça un jour -on ne pensait même pas le voir un jour à vrai dire- mais le trip kawaïopoopesque de "BFFs" atteint une espèce de firmament de n'importe quoi assez dingue et, il faut le reconnaître, très drôle dans son détournement de dessin animé japonais tout choupi-mignon vers la trashitude la plus complète des égouts de "The Boys". On se doute que les partis pris de non-sens de cet épisode cliveront mais, dans le genre dingue et inattendu, cette histoire d'Awkwafina se pose là !
Aïe, il fallait un vilain petit canard, voici le faiblard "Nubian vs Nubian" scénarisé par Aisha Tyler, l'animatrice des coulisses de "The Boys" sur Amazon Prime Video. L'histoire de cette petite fille tentant d'empêcher le divorce de ses parents supes ne vaut hélas que pour le mauvais esprit bien pensé de sa conclusion, le reste est aussi classique que son animation.
D'Andy Samberg, on espérait bien entendu quelque chose de totalement déjanté mais le scénariste de "John and Sun-Hee" déjoue nos attentes en allant jouer sur le terrain de l'animation asiatique (avec l'aide de Steve Ahn) pour une histoire à la charge émotionnelle étonnante, où un vieil homme en arrive aux pires extrémités dans le but de guérir le cancer de sa femme. Aussi violent que bouleversant, la densité tragique apportée par cet épisode sur l'acceptation de l'inéluctable prouve que la richesse de cet univers peut encore l'amener à s'essayer avec talent à des registres inexplorés.
Enfin, "One Plus One Equals Two" conclut cette première fournée animée de "Diabolical" et nous fait en plus la surprise de se concentrer sur le passé d'un des piliers de la série-mère. Forcément, avec un tel personnage en vedette et un nouvel éclairage apporté à ses premières aventures, "Diabolical" ne peut que nous laisser sur une bonne note (les voix des acteurs sont aussi de la partie).
Bref, vous l'aurez compris, "Diabolical" est un palliatif animé plus que recommandable aux crises de manque provoquées par l'absence temporaire de "The Boys". Non seulement ce spin-off est d'une fidélité exemplaire à la violence et aux déviances de son modèle mais il trouve le moyen d'en dévoiler de nouvelles ramifications jubilatoires en utilisant l'animation comme un jouet à toute l'expression de sa folie. Il est même possible qu'une saison 2 frappe encore bien plus fort à l'avenir après ce galop d'essai. Diabolical qu'on vous dit !