Hantise familiale

https://www.senscritique.com/liste/Mon_top_personnel_horreur_fantastique_2018/2301572

(Vukekpar/leweb) La magistrale chronique d'une hantise familiale (sur quasiment 10h!).

Mike Flanagan, que je n'attendais pas à pareille fête, parvient à la fois à être fidèle au matériau original (le livre de Shirley Jackson de 1959, mais aussi le célèbre film de Robert Wise de 1963) tout en y intégrant, notamment afin de tenir la longueur sur l'intégralité d'une saison, le meilleur du cinéma de Takashi Shimizu, dont l'influence m'a ici sauté aux yeux (les entrecroisements temporels ; la maison maudite qui étend son emprise sur tous ceux qui sont passés par ses murs, même une fois partis ; la "femme au cou brisé" qui reprend quasiment telle quelle une idée aussi brillante que terrifiante de Ju-On The Grudge 2, etc.). Le tout s'inscrit tout du long sur deux périodes temporelles distinctes (bah oui, True Detective est passé par là!), même si des parallèles et des liens vont bien entendu être tissés entre les deux; la série mixe ainsi récit de maison(s) hantée(s) et chronique familiale à l'américaine (du style Six Feet Under, autre influence qui saute un peu aux yeux), avec, of course, tout son lot attendu de lourds passifs psychologiques et de grands secrets familiaux dissimulés.

La mise en scène est d'une belle sobriété, et sait bien doser ses effets horrifiques (et pourrait même être considérée comme assez timide en la matière, la série fascinant plus in fine pour sa brillante construction scénaristique et ses personnages accrocheurs que pour son potentiel horrifique en lui-même).

Les acteurs sont franchement quasiment tous excellents: mention spéciale en particulier pour la mère de famille (la superbe Carla Gugino)

J'en suis venu à me dire que Mike Flanagan avait sans doute réussi avec cette série là où Guillermo Del Toro s'était quelque peu planté avec son Crimson Peak.

Si l'on devait trouver quelques menus défauts à l'ensemble (qui reste un véritable sommet horrifique de l'année 2018), on pourrait sans doute lui reprocher quelques longueurs ; le tout aurait je pense pu largement être emballé en 8 épisodes plutôt qu'en 10. Par ailleurs, le passif de la maison peut sembler sans doute insuffisamment développé, ou alors trop tardivement. Enfin, si la série réussit très très bien tout ce qu'elle entreprend, il faut cependant souligner que, dans l'absolu, elle n'invente rien. Il s'agit sans aucun doute d'un futur classique, mais qui n'a pas cet aspect révolutionnaire à même d'ouvrir vraiment de nouveaux champs horrifiques à défricher pour les productions à venir (classique donc, dans tous les sens du terme).

Mais ne crachons pas dans la soupe, la série est d'une telle richesse qu'elle supportera tout à fait, je pense, un second visionnage, ce qui en dit déjà long sur la qualité de l'ensemble...