Let the Sunshine In
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En 2008, le réalisateur Guillermo del Toro propose à l'écrivain Chuck Hogan (futur scénariste de 13 heures, réalisé par Michael Bay, entre autres) une collaboration pour écrire une trilogie de romans dont le premier s'intitulera The Strain (La Lignée en VF). L'objectif du cinéaste était bel et bien d'enchaîner tout de suite sur une adaptation en série télé. Il en réalise le pilote et la chaîne FX commande une première saison de 13 épisodes, qui sera suivie de trois autres.
The Strain nous promet une belle rencontre : celle d'un récit apocalyptique et d'une série sur les vampires, le tout sous la houlette du réalisateur du Labyrinthe de Pan. Mais force est de constater qu'après les trois premiers épisodes, qui parviennent à conserver une certaine part de mystère, la série tombe vite à plat.
D'abord, Guillermo del Toro (qui pourtant nous avait signé un joli Blade 2) ne semble pas avoir quoi que ce soit de nouveau à apporter au récit de vampires, ni sur le plan du scénario, ni sur le plan esthétique (à part cet énorme dard qu'ils projettent). Pire : lorsque l'on voit le Maître, il est franchement plus ridicule qu'effrayant (sans compter qu'on le voit sûrement trop tôt, et que le Maître était plus intéressant lorsqu'il était une énigme).
Les personnages, quant à eux, sont totalement stéréotypés. Déjà, la série se contente de respecter la stricte division manichéenne entre bons et méchants, et il faudra attendre le milieu de la saison 2 pour qu'apparaisse enfin un personnage intéressant, Quinlan. Sinon, les « gentils » docteurs Ephraïm et Nora sont si totalement dénués de profondeur psychologique qu'ils en deviennent des caricatures. Seul Vassily Fet (Kevin Durand) se fait remarquer par son humour et son aspect bourru. Finalement, il n'est pas surprenant que ce soit du côté des « méchants » que l'on trouve les personnages les plus intéressants, que ce soit l'Allemand Thomas Eichhorst (Richard Sammel, vraiment inquiétant) ou les enfants vampires renifleurs.
Sur le plan de l'histoire, The Strain donne trop souvent l'impression d'être statique. Les nombreux flashbacks, censés nous plonger dans le passé pour mieux expliquer la situation présente, ralentissent le rythme et leur utilité est plus que contestable (sans compter que la reconstitution de l'Europe de l'Est à l'époque du Rideau de Fer est souvent fort risible). Les innombrables histoires familiales semblent servir bien souvent à combler les vides pour permettre aux épisodes d'avoir la bonne durée.
Pire encore : la série n'hésite pas à faire à de multiples reprises l'assimilation vampires = nazis et vampires = terroristes (les « strigoïs » transformés en bombes humaines, les immeubles de New-York en flammes, la menace nucléaire, etc.). Ces facilités scénaristiques ne nous aident pas à prendre la série au sérieux.
Del Toro et Hogan cèdent même à un défaut qui se multiplient de nos jours aussi bien au cinéma qu'à la télévision : le citationnisme. Mais il ne suffit pas de multiplier les références et les clins d'oeil (pour n'en citer qu'un : Eldritch Palmer, qui renvoie au roman de Philip K. Dick Dieu venu du Centaure) pour faire un scénario intelligent.
Pourtant, on sent que des efforts sont faits en multipliant les pistes scénaristiques. Ainsi, dans la saison trois (de très loin la meilleure, la plus sombre et la plus mouvementée), l'action part dans trois directions différentes : la chasse aux vampires avec Fet, la recherche scientifique (le vampirisme étant, dans la série, une maladie qui se transmet grâce à un ver) et le mysticisme avec un obscur livre qui provient des temps les plus reculés, l'Occido Lumen. Cette division permet à la saison de couvrir un champ plus large, depuis le suspens médical jusqu'à l'horreur gothique.
Mais, hélas, cette bonne volonté ne se maintient pas et la quatrième (et ultime) saison s'enfonce dans le ridicule en s'aventurant dans un domaine qui aurait pu être prometteur s'il avait été mieux traité : la politique. Faire de l'apocalypse vampire une métaphore des dangers qui menacent toute démocratie et qui pourraient la transformer en dictature est une excellente idée. Le personnage de Justine Feraldo, la conseillère municipale de New-York chargée de la sécurité et donc, par voie de conséquence, de la chasse aux vampires, est en cela intéressant, par les interrogations qu'il apporte concernant l'équilibre entre sécurité et liberté. Mais hélas, là aussi, le sujet n'est que frôlé avant de sombrer dans le néant et la caricature. Les autres pistes scénaristiques sont abandonnées sans crier gare (le Lumen, qui avait un caractère essentiel dans les saisons précédentes, n'apparaît quasiment plus), au profit d'une description post-apocalyptique ridicule des USA transformés en une sorte de IVème Reich vampire.
En bref, The Strain est une série décevante par rapport au potentiel qu'elle avait : de bons acteurs (Jonathan Hyde, David Bradley), des réalisateurs réputés (ainsi, certains épisodes sont signés Vincenzo Natali, le réalisateur de Cube), pour un résultat très inégal qui manque furieusement d'ampleur et d'audace visuelle ou scénaristique.
Créée
le 17 oct. 2017
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