This is England, c’est un peu comme se prendre un coup de poing dans le ventre en pleine banlieue britannique, mais réalisé avec tant de sincérité que tu ne peux pas détourner les yeux. La série te plonge dans une époque pas si lointaine, celle des années 80, où la jeunesse anglaise est paumée, enragée et en quête d'identité. C'est du brut, du sale, du réaliste, et pourtant, derrière chaque coup de gueule et chaque cicatrice, il y a une tendresse désarmante qui t’accroche à chaque personnage, même si tu ne les aurais jamais choisis comme potes.
L’histoire, suite directe du film éponyme de Shane Meadows, suit une bande de jeunes au cœur de l’Angleterre post-industrielle. Le racisme, le chômage, le néonazisme… Tout y est, et ça frappe fort. Mais ce n’est pas juste une série sur des skins-heads et des marginaux. Non, c’est beaucoup plus que ça. C’est une plongée dans les recoins les plus sombres de l'Angleterre, là où la colère, la violence, mais aussi l'amitié et l'amour, cohabitent dans un équilibre fragile. This is England ne fait jamais dans la demi-mesure, chaque scène est une explosion d’émotions, un mélange d’espoir et de désespoir qui te laisse parfois à bout de souffle.
Les personnages sont le véritable cœur de cette série. Shaun, le gamin que tu avais déjà rencontré dans le film, grandit dans cette Angleterre déchirée par ses contradictions. Mais au lieu de suivre un héros tout droit sorti d’un conte social, tu suis un gamin perdu, balancé entre deux mondes : celui de ses amis paumés et celui de sa propre quête de sens. Et là où beaucoup de séries auraient fait de lui un stéréotype, This is England le traite avec une telle humanité qu’il en devient bouleversant. Ce n’est pas juste un ado, c’est l’incarnation de toute une génération qui galère, qui se bat, et qui, parfois, ne sait même pas pourquoi elle se bat.
Mais ce n’est pas seulement Shaun qui brille. Chaque personnage, du plus discret au plus extravagant, est écrit avec une finesse rare. Combo, ce skinhead repenti qui cherche à se racheter, est un personnage aussi fascinant qu’ambigu. Tu veux le détester pour ce qu’il a fait, mais en même temps, tu te surprends à espérer qu’il trouve enfin la paix. Woody, Lol, Smell… Tous ont leurs failles, leurs cicatrices, et c’est justement dans ces imperfections que la série trouve sa plus grande force. Tu les suis, tu les juges parfois, mais surtout, tu les comprends. This is England ne te demande pas d’aimer tout le monde, mais elle te force à ressentir, et c’est là qu’elle te cueille.
Le cadre de la série est un autre personnage à part entière. Ce n’est pas le Londres touristique et scintillant, c’est l’Angleterre des banlieues, avec ses bâtiments en briques rouges, ses terrains vagues et ses pubs aux néons fatigués. Chaque décor respire l’authenticité, et tu sens presque l’odeur des fish and chips mêlée à celle de la bière tiède. Les années 80 sont là, bien présentes, mais sans jamais tomber dans le cliché nostalgique. La musique, omniprésente, n’est pas seulement là pour te rappeler l’époque, mais pour te faire ressentir cette époque : les Clash, les Specials, tous ces groupes qui donnaient une voix à une génération en colère.
Ce qui frappe aussi dans This is England, c’est sa capacité à traiter de sujets lourds sans jamais tomber dans le pathos. La série parle de violence, de racisme, de dépression, mais elle le fait toujours avec une honnêteté brute. Les scènes les plus dures ne cherchent pas à te faire pleurer, elles te laissent juste face à la réalité, aussi crue soit-elle. Et pourtant, malgré toute cette noirceur, il y a une lumière qui brille dans l’amitié, dans ces moments de joie partagée, aussi éphémères soient-ils. C’est un peu comme si la série te disait : "Oui, la vie est dure, mais il y a toujours quelque chose à sauver, même dans les pires situations."
Mais soyons honnêtes, This is England n’est pas une série facile à regarder. Son réalisme peut être étouffant, et certains épisodes te laissent avec un sentiment de malaise. Les personnages que tu apprends à aimer prennent des décisions destructrices, et la série ne te ménage jamais. Si tu cherches une série qui te caresse dans le sens du poil, passe ton chemin. Ici, on te balance dans le vif du sujet, sans filtres, sans artifices. C’est une immersion totale dans une Angleterre qui saigne et qui hurle, mais qui, quelque part, trouve encore la force de danser et de chanter.
En résumé, This is England est une série qui te prend aux tripes, te plonge dans une époque et un milieu souvent oubliés, et te montre la beauté dans la douleur, la lumière dans l’obscurité. C’est une série qui ne te fait pas seulement réfléchir sur les autres, mais aussi sur toi-même, sur les choix que l’on fait, sur les erreurs que l’on commet. Une série qui, malgré toute sa dureté, te rappelle qu’il y a toujours quelque chose à sauver, même dans les moments les plus sombres.