"Haut comme trois pommes..." Un générique qu'on a pas oublié suffit-il à justifier une quelconque nostalgie ? Mis à part quelques scènes marquantes et le plaisir de se replonger quelques décennies en arrière, l'enfance nous laisse parfois des souvenirs aussi trompeurs que savoureux. Et seules les qualités intrinsèques d'une œuvre peuvent lui permettre de durer dans le temps. Ce qui est évidemment le cas de cette adaptation des péripéties du jeune Thomas Sawyer né de l'imagination du malicieux Mark Twain.
Et c'est d'ailleurs en étant fidèle à l'esprit de l'auteur et de son personnage que les créateurs de l'anime ont réussi à créer une série qui, aujourd'hui encore, est capable d'embarquer les petits en devenir et ceux qui ont fini de grandir dans une aventure fleuve. Si l'animation accuse un peu son âge et ses procédés, le soin tout particulier apporté à la musique (la partition inoubliable et foisonnante de Katsuhisa Hattori), au scénario (des arcs narratifs longs et courts rythment avec intelligence les 50 épisodes) et aux personnages (comment ne pas s'attacher au héros, à son frère Sid ou à l'intrépide et touchant Huckleberry Finn ?) portent toujours, et avec quelle vigueur, une histoire aussi irrésistible que les courants du Mississipi.
Les tribulations et les fantaisies de l'enfant terrible à l'inoubliable voix (un doublage français de qualité) ne doivent cependant pas éclipser toute la profondeur de champ qu'offre le roman et qui se trouve ici retranscrite sans beaucoup de concessions au politiquement correct. Malgré son bon cœur et bien loin d'une figure dont on aurait gommé tous les défauts, Tom se montre parfois cruel ou égoïste. C'est donc le portrait plus vrai que nature d'un tout jeune Américain de la fin du XIXe siècle (confronté entre autres à l'injustice, à la violence ainsi qu'à l'esclavagisme) que nous offre Hiroshi Saito. Une peinture initiatique, généreuse, juste et sincère, coiffée d'un éternel chapeau de paille.