Bon Dieu, cette série annonçait bien plus que la caricature grotesque du Sud américain qu'elle nous a offerte.
Une ambiance marécageuse, sombre et voilée, une bande-son impeccable et techniquement (quand bien même je ne n'y connaît rien du tout) c'est parfaitement bien filmé, on se croirait dans un film à gros budget.
Tout semble concorder pour nous offrir une excellente série basée sur un scénario des plus banals et puis ça s’embourbe, l'enquête n'est pas si importante que ça en soit. Même si elle est au centre de la série, ce qui nous importe le plus est l'évolution des personnages entre 1995 et 2012, leurs relations, leur monde, leur caractère, comment s'y prennent-ils pour résoudre cette affaire quelconque. Parce que -à mon avis- c'est bien de là d'où part le problème : un scénar bien trop lisse.
Une fille violée, torturée, étranglée sauvagement au beau milieu des champs de canne à sucre, une enquête qui patauge pour se dénouer sur un final à deux balles, anticipé dès les premiers épisodes.
Cet assassinat sacralisé, ritualisé à la manière de grands auteurs de polars (d'ailleurs, j'apprécie beaucoup les clins d’œil livrés à Chambers, Lovecraft, King, Ligotti ; références que je tiens à découvrir d'un peu plus près !) commençait à devenir intéressant, mais les preuves bien trop évidentes à mon goût puis ces indices clairsemés ça et là, ces interrogatoires bien trop faciles, ce coupable bien trop reconnaissable... C'est bien ça le problème. Ça tombe sous le sens. C'est évident.
Et puis il y a toute cette gêne autour des personnages de Rust et Marty. Deux stéréotypes d'enquêteurs rongés par une vie à demie écorchée, balancée entre adultères, mensonges et traumatismes. Rust, le mec blasé, avachi devant Gilbough et Papania (qui se contentent de hocher la tête, poser des questions stupides, émettre des supputations sans considérer d'autres options) fumant clopes sur clopes, bière à la main... Ce nihiliste doté d'un charisme à vous faire tomber les ovaires... Certes, ses discours valent la peine de s'y pencher dessus (cf. cet article : http://www.vulture.com/2014/02/philosopher-assesses-true-detective-characters-rust-cohle-marty-hart.html)
Mais le gars antisocial, rongé par les vices, érodé par le passé qui s'attache à cette vieille affaire en la ruminant comme une vieux loup solitaire... on nous a sorti ce schéma à toutes les sauces.
C'est du réchauffé, c'en est humiliant.
Bon après y'a Marty.
Marty paraît correct, droit dans ses bottes et pas farouche pour un sou. Or, dès qu'on retire la poussière de sa veste, on s'aperçoit que c'est un mec qui peut pas s'empêcher de fourrer sa queue n'importe où et de tout faire foirer comme un grand. (D'ailleurs, c'est vraiment dommage que les personnages féminins soient si peu creusés. Elles servent juste de défouloir et permettent aux spectateurs de se rincer gentiment l’œil, voilà tout)
Donc, Marty le mec sanguin avec sa gueule de travers, il sert juste de paravent. Son personnage est intéressant, il met un peu de piquant dans l'affaire.
Mais franchement, les scénaristes ont un peu trop concédé à la facilité : Les retrouvailles dociles entre Rust & Cohle, l'indice complètement tiré par les cheveux de la peinture verte, le shérif qui se laisse avoir comme un bleu, la brigade policière qui intervient pile poile au bon moment dans le dernier épisode etc. Ils auraient peut-être dû creuser la piste du complot échafaudé par Cohle, ça aurait été plus sympa.
Bon, alors pourquoi avoir mis 6 ?
Ben parce que j'ai quand même bien aimé. J'aime quand ça traîne, quand on me laisse le temps d'apprécier le travail, l'image, les dialogues... Ces splendides étendues de Louisiane, ça me donne envie.