La Tendresse Sans Ordonnances

Bah merde !! Juste deux toutes petites notes pour cette série documentaire c'est vraiment pas cher payé. Même si ce n'est objectivement pas le documentaire du siècle cette série en quatre épisodes qui nous raconte une belle expérience de vie mérite beaucoup mieux que ce triste et sinistre anonymat.

Une Vie d'écart est une courte série documentaire en quatre épisodes inspirée d'un format anglais et qui propose de suivre durant plusieurs semaines la rencontre entre plusieurs personnes âgés d'un Ehpad et des enfants d'une classe de grande section de maternelle. Divers spécialistes suivent les répercutions de cette drôle de rencontre entre des anciens de plus de 90 ans et des gamins dont la moyenne d'âge ne dépasse pas les cinq ans.

Même si la série ronronne parfois et aurait peut être gagné à se retrouver un peu plus concentrer sur un format peut être plus court cela n'entame en rien ses merveilleuses et touchantes qualités. J'ai tout bonnement adoré cette rencontre et l'immense tendresse qui déborde des images de cette très belle expérience de vie. Car c'est un un très bel échange intergénérationnel que la série nous invite à découvrir nous faisant témoin d'une fort belle démonstration de vases communiquant avec ces gosses turbulents qui viennent insuffler de la vie à ses anciens et ses vieilles personnes qui leur apporte tendresse, expérience et déjà une forme diffuse de maturité. C'est tout simplement magique de voir ses vieilles dames et ce vieux monsieur retrouver de la joie et du bonheur de vivre par la simple présence d'un enfant, de son sourire, de sa vitalité, de sa candeur et de sa tendresse. Forcément quelques personnages vont sortir du lot et finir par crever l'écran comme Robert l'unique homme parmi les résidents de l'Ehpad à s'être prêté au jeu et qui se découvre une passion pour les enfants lui qui ne s'est jamais occupé des siens. Impossible également d'oublier la tendresse infinie que témoigne Seydoux un petit garçon noir pour une vieille dame qu'il couvre de cadeaux et de douces attentions. Et puis il y-a au cœur d'Une Vie d'Ecart une formidable et bouleversante histoire d'amitié et de tendresse entre Olive, une petite fille super craquante et Jacqueline une vieille mamie pied noire à l'exubérante chaleur humaine. Il y-a des moments purement magiques comme lorsque la petite Olive découvre que sa mamie d'adoption lui ressemblait comme une sœur quand elle était encore une petite fille. La série est d'ailleurs bourré de moments de poésie, de tendresse, d'humour et de complicité entre ses deux générations que plusieurs vies séparent, des moments qui font sourire et parfois pleurer.

Au delà de cette expérience Une vie d'écart met aussi en lumière le profond désespoir des personnes âgées en Ehpad dont le mal le plus profond et le plus dévastateur reste la solitude, une solitude d'autant plus cruelle qu'elle est celle dans laquelle elles ont tout le temps de penser à la mort. Car tous savent très bien qu'ils ne ressortiront plus jamais vivants, tous savent qu'ils sont là souvent oubliés de tous avec derrières eux leurs souvenirs à ressasser et devant l'abîme à apprivoiser. Comme le dit Jacqueline avec émotion la tendresse ça vaut bien tous les médicaments, et plus encore rien n'est plus puissant que la vie surtout lorsque qu'elle s'invite à réveiller ainsi les corps et les esprits flétris qui doivent se résoudre à la quitter bientôt. Ce n'est pas Une Vie d'Ecart qui existe entre ces enfants et ses vieux, ce sont mille vies, dix mille vies, c'est la multitude de la vie toute entière qui vient ici s'embrasser sous nos yeux émus comme lorsque une gamine de cinq ans qui doit encore tout découvrir serre tendrement une mamie qui a parfois déjà trop vécue. Il n-y a rien de plus beau que la vie, rien de plus puissant que le rapport humain et la superbe tendresse dont les êtres humains sont capables de se témoigner parfois quand ils oublient leurs préjugés et leurs craintes stupides et qu'ils s'affairent enfin à être un peu moins cons. Ces deux extrêmes de la vie l'enfance et la vieillesse qui se tiennent ici par la main le temps de faire un bout de chemin nous rappelle avec force notre besoin profond de rapports humains, de sourires, de gestes délicats, de caresses, de transmissions de cette foutue tendresse que Bourvil chantait si magnifiquement.

Ces gosses sont merveilleux, ces vieux sont magnifiques et la carapace du cynisme qui peut être parfois la mienne s'est fendue en deux sous les coups de boutoirs de la gentillesse de ses mômes et la bienveillance de ses anciens. Une vie d'écart est un documentaire qui fait du bien et peut être plus encore en cette période de distanciation sociale qui nous ferait presque oublier qu'il nous faudra nous étreindre bien plus fort avant de s'éteindre encore.