L'histoire dans l'histoire

Pour le héros (Kang Cheol) et l'héroïne (Oh Yeon Ju), l'objectif est de vivre leur amour dans un monde plus juste où l'assassin de la famille de Kang Cheol serait puni par la loi. Mais les méchants s'en mêlent et essayent eux aussi de détourner l'intrigue à leur profit. On observe avec une fascination horrifiée la transformation d'Han Cheol-ho qui de simple policier malhonnête, devient au fil des épisodes un politicien assoiffé de pouvoir et de vengeance n'hésitant pas à torturer et à assassiner des innocents. Quant au double personnage de l'auteur/tueur, il est terrifiant de réalisme, passant du personnage de père à celui de meurtrier en un clignement d'oeil. La complexité de son caractère et son évolution dans la série en fait pour moi un 3e personnage principal au côté de Kang Cheol et Oh Yeon Ju.

Au début, seuls les créateurs (l'auteur et sa fille) semblent avoir le pouvoir de passer d'un monde à l'autre et les règles de passage semblent assez claires. Mais peu à peu, d'autres personnages comprennent les règles et se mettent à les utiliser à leur profit. Elles transforment ainsi Kang Cheol qui passe d'un monde à l'autre avec une grande maîtrise en une sorte de super héros au pouvoir magique, c'est ainsi qu'il va par exemple brillamment faire arrêter le tueur (épisode 12) ou faire rendre la tablette à l'auteur par Han Cheol-ho (épisode 14).

Mais souvent, les règles de passage s'imposent aux personnages sans qu'ils s'y attendent et elles ajoutent alors du suspens et de l'émotion. C'est Oh Yeon Ju qui en fait le plus souvent les frais comme à l'épisode 10 où elle se retrouve piégée dans le monde hostile de la bande dessinée où elle a été effacée de la mémoire de Kang Cheol et où elle se retrouve quasiment SDF dans un monde où elle n'a pas d'identité. De même à l'épisode 16 où elle trouve le corps de Kang Cheol à l'arrêt de bus mais ne pourra pas réussir à l'atteindre.

Son rôle est majeur, elle est l'incarnation du pouvoir de l'auteur sur son oeuvre, c'est l'objet magique qui permet les retournements de situation les plus extravagants. L'auteur et sa fille en font un usage plus ou moins maîtrisé et modéré, s'efforçant de suivre une trame narrative logique mais lorsque les méchants s'en emparent, les situations les plus inattendues peuvent alors se produire en toute crédibilité (ex : l'assassinat de l'ami policier de Kang Cheol à l'hôpital et les preuves qui accusent celui-ci et l'oblige à s'enfuir).

Le médecin professeur d'Oh Yeon Ju à l'hôpital, son ami interne ou l'assistant de son père sont les 3 personnages secondaires les plus représentatifs de ce jeu comico-dramatique. Tous les 3 sont des personnages légers destinés à nous faire rire (ex : les crises de colère exagérée du professeur) mais ils peuvent également parfois se retrouver être les outils de la tragédie (ex : quand, dans le monde réel, le professeur se moque d'Oh Yeon Ju en disant qu'elle n'aura jamais de petit ami alors que celle-ci vient de perdre Kang Cheol qui vient de se suicider dans la bande dessinée).

Outre l'alcoolisme de l'auteur ou le divorce difficile des parents d'Oh Yeon Ju quand elle était petite, un thème qui me semble récurrent est celui du deuil. W est une série où les morts sont nombreux et si Kang Cheol doit supporter une fois la mort d'Oh Yeon Ju, assassinée par balles, Oh Yeon Ju, elle, devra faire 3 fois le deuil de Kang Cheol (1, il se suicide, 2, il l'oublie, 3, il meurt par balles). Ce sont à chaque fois des scènes déchirantes et rendues parfaitement crédibles par le talent des acteurs. Et bien sûr il y a le désespoir de Kang Cheol lorsqu'il comprend qu'il n'est qu'un personnage de bande dessinée, emprisonné dans un rôle de héros maudit malgré lui.