Westworld
7.6
Westworld

Série HBO (2016)

Western de science-fiction post-moderne, Westworld est aussi un conte philosophique

Avec l’arrivée de la deuxième saison de cette excellente série de HBO, j’ai voulu refaire un tour au parc et me repasser tous les épisodes de la première saison. Une vraie partie de plaisir, et aussi l’occasion de réfléchir avec un peu plus de recul à toutes les questions qui avaient jailli comme un feu d’artifice lors d’un premier visionnage. Pour le résumé en une jolie formule, je dirais qu’il s’agit d’un production hybride et transgenre posant justement la question de l’identité. Une série multiforme qui annonce le début d’une nouvelle ère… Un cyborg cinématographique en quelque sorte.


Une belle machine hollywoodienne


C’est dans des accents d’épopée que tout commence. En écoutant l’enfilade d’arpèges du thème musical d’ouverture composé par Ramin Djawadi, impossible de ne pas sentir la parenté avec celui de Game of Thrones qui se trouve justement être du même compositeur. 
Les plans à couper le souffle sur les grandes plaines du farwest, décors naturels de l’Utah qui semblent illimités, créent la même impression de démesure que ceux d’Écosse dans GOT. L’infinité, la démesure, sont d’ailleurs des thèmes récurrents de la série. On pense, par exemple, aux innombrables niveau du centre de contrôle, ou aux limites du parc qui semblent inaccessibles, ou encore au cycle de vie, de mort et de renaissance des hosts.
Si, dans GOT, les décors, les personnages aux aspirations légendaires et les intrigues shakespearienne insufflent un souffle épique à l’histoire, la fascination que ces éléments engendrent est toujours littérale. Dans Westworld, on trouve les mêmes effets d’exubérance servis par une réalisation virtuose aux plans séquences exorbitants. Mais l’histoire peut être lue de plusieurs manière, offrant plusieurs degrés de raffinement au plaisir du spectateur attentif. Comme le dit Dolores, dans la série comme dans le parc, “[there’s a path for everyone][1]”.
Il est d’abord très facile d’apprécier chacun des chapitres de manière purement littérale, en se délectant de la fascination que provoquent les grandes tirades théâtrales aux accents shakespeariens qui exaltent les grands sentiments, les dialogues percutants et les nombreuses punchlines scénaristiques. Citons aussi les magnifiques plans-séquences, les grands espaces, les purs moments de Farwest, la violence Tarantinesque des scènes de combat, la beauté des costumes et des visages, et la nudité des corps… Il s’agit d’une machine bien rodée servie, en prime, par un casting impressionnant (Anthony Hopkins, Ed Harris, Evan Rachel Wood – True Blood) où les acteurs moins connus sont tout aussi habités par leur rôle que les stars.
Dans ce produit de l’industrie hollywoodienne (la série a été tourné dans le studios de la Warner), on retrouve aussi tous les grands thèmes du Western et de l’histoire américaine. Le thème de la liberté et de ses limites et celui de la quête de soi, une constante dans le cinéma US, y prend une place prépondérante. Les robots sont en effet amenés à mener une forme d’introspection pour découvrir leur véritable nature, à « [questionner la nature de leur réalité][2] » pour enfin accéder à la conscience, comme on le verra par la suite. La série fait aussi intervenir de nombreux thèmes de l’histoire américaine : la guerre de sécession, le génocide des indiens, la colonisation (les visiteurs sont vus comme des new comers)… Et si l’esclavage n’est pas mentionné explicitement, il semble pourtant omniprésent à travers la domination qu’impose les humains aux robots, comme celle des maîtres sur leurs esclaves. C’est d’ailleurs selon moi un thème clé de ce show, comme j’expliquerai par la suite.

Un chef d’œuvre de la SF


Mais Westworld est avant tout, un chef-d’œuvre de la SF. Une fresque aux accents d’épopée Sergio Leonienne relatant l’éveil sanglant des consciences robotiques.


À la différence de tous les space odysseys aux formats linéaires et rébarbatifs que nous assène l’industrie cinématographique américaine, Westworld jouit d’un scénario riche et complexe. Le personnage de Dolores ouvre la série vêtue de la robe d’Alice aux pays des merveilles, comme pour nous accueillir dans un monde possédant sa propre logique, un univers qui nous oblige à revoir notre conception de ses lois physiques et morales. Pour moi, Dolores et sa quête personnelle, symboliserait une Alice se dirigeant à contre-sens du livre de Caroll, cheminant d’un monde onirique vers un monde réel. D’ailleurs les références au chef-d’œuvre de Lewis Caroll ne manquent pas.  L’intrigue se développe autour du motif du labyrinthe et nombreux sont les personnages (et les spectateurs) qui s’y perdent. 
Cette complexité (une intrigue mêlant au moins trois strates temporelles, des passages oniriques et des tirades au sens obscur) peut rebuter de prime abord le spectateur distrait, mais c’est pourtant l’écrin dans lequel repose toute la beauté de la série. Et loin de se perdre dans des logorrhées pompeuses à la Christopher Nolan, où l’onirisme et le discours scientifique égarent le spectateur sans qu’il puisse en retrouver le sens, dans Westworld chaque passage obscur trouve une signification concrète au fur et à mesure que se dévoilent les mystères de la série.
Une autre qualité qui différencie la série de bien des films de SF, est l’absence de discours technique creux justifiant d’un usage d’une technologie de pointe ou du génie scientifique de ses protagonistes. Ici, toute la perfection du parc semble venir du travail acharné de ses employés, du progrès technologique et de l’inspiration de ses créateurs qui en ont permis le développement, sans nécessité de justification. Cela donne un côté merveilleux à la série. Gracieux. Magique. Je pense par exemple à la fascination du scientifique donnant vie à un oiseau robotique, qui m’a fait pensé immédiatement à Jurassik Park, une autre œuvre « pondue » par Michael Crichton. Il s’agit de ce moment où Hammond, le propriétaire du parc, s’extasie devant la naissance des vélociraptors cassant la coquille de leurs œufs. ([D’autres d’ailleurs l’avaient aussi remarqué][3].) Ces deux moments nous préparent aux conséquences funestes qui découleront de ce désir trop humain de vouloir usurper le rôle de Dieu-créateur. Juste grandiose.
Et loin de constituer une énième déclinaison du grand thème de la révolte des robots, Westworld se pose rapidement comme une œuvre réflexive et méta-narrative posant la question de l’identité aussi bien dans les choix formels que dans son scénario et ses dialogues.

Un hommage au septième art


Après cette attaque gustative gourmande et aguichante que nous offre la série, en milieu de bouche, on arrive sur des arômes plus délicats de vieilles bobines…  En effet, ce TV show représente un formidable hommage au grand écran et propose une réflexion sur la fiction et la création à la fois admirative et critique.
On y trouve d’abord de nombreuses références aux génies des Beaux Arts, comme la musique (Mozart, Debussy), la peinture (Michelangelo) ou la littérature (Caroll, Shakespeare,…), mais un véritable hommage est rendu au cinéma américain, qui se décline en d’innombrables citations des chefs d’œuvres, notamment dans les noms de lieu ou dans des détails de décor et d’accessoires qui sont autant de clin d’œil aux cinéphiles.
Mais c’est surtout dans les citations visuelles, des jeux de cadrage ou d’éclairage, dans la mise en scène et dans les dialogues, que l’on retrouve la patte des grands maîtres. Par exemple on retrouve plusieurs fois le surcadrage caractéristique de la prisonnière du désert de John Ford (en passant, Robert Ford est le nom du personnage d’Anthony Hopkins dans la série) et certains plans épiques rappellent aussi les westerns spaghetti de Sergio Leone. Le western est évidemment mis à l’honneur, mais on retrouve aussi plusieurs citations d’autres réalisateurs comme Spielberg avec Jurassic Park. Le scénario étant du même auteur, il partage beaucoup de similitudes avec Westworld. Finalement, les deux productions racontent un parc d’attraction futuriste en perte de contrôle. Le film original (Westworld, 1973) est aussi souvent cité. On peut aussi retrouver le style de Tarantino dans les scènes de violence et certains dialogues truculents. Il ne s’agit ici que de mes observations, mais la mise en scène de Westworld est extrêmement riche, et chacun, avec sa culture cinématographique, pourra s’amuser à y retrouver d’autres clins d’œil et citations. D’ailleurs, et pour ne pas laisser la science-fiction de côté, certains y ont vu [plusieurs allusions à Blade Runner][1].

Un discours sur la création


La série met en scène un parc d’attraction plongeant ses visiteurs dans un univers imaginaire immersif. La mise au point de cet univers composé de récits imbriqués, comme ceux proposés dans les jeux de rôle, offre un véritable commentaire sur l’activité créatrice. Dans ce vaste jeu de miroir, les personnages y sont des figures creuses, représentations des rôles de créateurs, de spectateurs, ou d’acteurs, déconstruisant et déclinant de manière kaléidoscopique notre fascination pour la fiction. 
Les nombreux personnages de créateurs, comme les inventeurs du parc, Robert Ford et Arnold Weber, Bernard Lowe, ou le créatif responsable des récits dont j’ai oublié le nom, posent la question des choix narratifs et de leurs conséquences sur le récit. Comme par exemple le fait de proposer des récits violents et à forte teneur érotique pour séduire le public. La question de la frustration lorsqu’un récit n’a pas été compris ou a été interrompu. L’attachement du créateur à ses créatures. Celle de savoir à quel point une œuvre appartient à son auteur et à quel moment elle cesse de l’être pour appartenir au public, etc.
Le personnage de Robert Ford (Anthony Hopkins) incarne la toute-puissance du créateur de façon magistrale. Par exemple, dans cette [scène d’anthologie][2] où il menace Theresa, la chef d’entreprise responsable de la rentabilité du parc, en lui démontrant qu’il en est le véritable maître et qu’elle ne doit pas se mettre en travers de son chemin. Où encore au moment de [la mort de Bernard][3], le créateur voit instantanément se matérialiser devant lui les phrases qu’il énonce, dans une superbe métaphore du cinéma. Cette scène magnifie l’effet performatif de son discours, un des aspects les plus fascinants de l’écriture : l’idée que ce qu’il dit s’incarne en acte.
Cette réflexion sur la création termine en apothéose dans le dernier épisode, lorsqu’il dévoile son nouveau récit et [met en scène sa propre mort en faisant intervenir Dolores][4].
Les robots, quant à eux, y sont des figures interchangeables qui interviennent dans plusieurs récits distincts dans l’histoire du parc. Le parc est une page blanche sur laquelle s’écrit un nombre infini de récits. Les robots en sont des personnages modifiables et réutilisables à volonté. Chaque visiteur, en interagissant avec eux, est susceptible de les faire évoluer différemment. Mais ces véritables acteurs du parc sont soumis à la volonté de leurs créateurs, ils sont finalement esclaves de leur condition et ne maîtrisent pas leur destin, n’ayant qu’une capacité d’improvisation limitée. Comme Teddy (James Marsden), l’ami et prétendant de Dolores qui n’existe que dans un rôle de perdant, afin de décupler le plaisir du visiteur humain qui pourra conquérir sa bien-aimée de force. Les robots portent donc une souffrance qui entraîne des dysfonctionnements chez certains d’entre eux. Une scène exprime puissamment cette idée, dans une tirade Shakespearienne empruntée au Roi Lear : « [When we are born we cry that we are come to this great stage of fools.][5] » Tirade qui laisse les créateurs (et les spectateurs) perplexes : s’agit-il des prémices d’une conscience de l’absurdité du monde ou simplement d’une réminiscence d’un rôle de professeur dans un précédent récit ?
Certains personnages de la série, principalement les visiteurs, comme William et son beau-frère, et l’homme en noir joué par Ed Harris, incarnent, quant à eux, des figures de spectateurs et portent les émotions du consommateur de fiction : la fascination devant la beauté, l’évasion et l’oubli volontaire de soi dans l’objet de leur admiration, puis la frustration, le rejet d’un monde trop idéalisé. Ils passent par tous les sentiments qui leurs sont offerts, l’exaltation de scènes d’action (les péripéties autour de la guerre) et d’aventure (la quête de Wyatt), l’amour passionnel (celui de William pour Dolores), la vengeance (celle de William contre son beau-frère), la trahison (William et son beau-frère, toujours, mais aussi les changements de camps lors de la guerre)… Autant de sentiments et d’émotions universels joués et rejoués sur les scènes des théâtres depuis des siècles et développés dans des milliers de kilomètres de pellicules. Ils se trouvent ici incarnés dans des scènes reprenant tous leurs éléments les plus impactants, dans une recherche de concentration des effets, ou même dans une démesure parfois clairement parodique, comme pour déconstruire, creuser et questionner notre fascination pour ces récits éternels.
La variation infinie des thèmes universels est représentée dans la série par le retour de scènes à l’identique, d’un épisode à l’autre. Une manière de nous faire expérimenter le monde du parc par les yeux des robots : la répétition des mêmes situations terminant systématiquement dans un débordement de violence. Épisodes qui ne seront plus qu’ « [un rêve distant][6] » à leur prochaine réincarnation. L’idée du retour, du cycle, de la répétition, développée tout le long de la série se retrouve également dans la musique et le mixage sonore. Par exemple, quand on rejoue la scène de la sortie du train et de l’entrée en ville, le piano mécanique du saloon qui accompagne cette séquence nous propose la reprise de thèmes actuels (Karma Police de Radiohead, The house of the rising sun, etc.). Ces musiques modernes reprises façon western dans un saloon souligne le côté artificiel du monde, tout en nous donnant un discret commentaire de la situation car le choix des musiques n’est jamais anodin et nous en connaissons tous les paroles par cœur.
Enfin, ce commentaire musical me rappelle également la comparaison de Bergson entre la musique et la conscience. Selon lui, notre vie intérieure se développe comme une mélodie, avec des thèmes principaux et des variations progressives de ces thèmes, il l’appelle « la mélodie continue de notre vie intérieure » En nous donnant à entendre ces petites phrases répétées devant le retour constant des mêmes situations entraînant les mêmes traumatismes, il n’y a pas seulement une célébration des milles manières de traiter des thèmes et émotions éternelles. Ce que nous propose Westworld ici est avant tout le développement de la mélodie de la vie intérieure des robots, et l’éveil de leur conscience.

Un conte philosophique sur l’éveil d’une conscience robot


Et, comme cette série se déguste comme un bon vin, parlons maintenant de la finale persistante. La longueur en bouche. Ce je-ne-sais-quoi d’éthéré qui reste quand tout le reste a disparu. C’est un peu comme un souvenir, une réminiscence qui aurait du mal à s’effacer. Et c’est justement ce dont parle Westworld. Ces mille petits riens qui définissent notre identité. Ou plutôt, ici, celle des robots. Les notes rémanentes de leur vécu, ces « rêveries » qui les singularisent, vont peu à peu faire surgir quelque chose de nouveau : l’émergence d’un « Moi » robotique. 
Le rôle de la mémoire, de la prise de conscience du passé, est prépondérant à l’émergence de ce « Moi ». Les créateurs du parc établissent d’ailleurs la personnalité des robots sur un événement traumatique factice qui sera la base de leur mémoire. La mort du fils, pour Robert, par exemple. Mais c’est le ressassement de faits réels passés (comme l’amour de Dolores pour William, son traumatisme avec le meurtre d’Arnold, son créateur), puis leur dépassement qui vont permettre aux robots de sortir du labyrinthe et de prétendre à leur liberté. D’où l’importance pour les robots de se construire une mémoire des massacres perpétrés par les visiteurs, comme autant de génocides. Ce traumatisme leur permet de se constituer comme un peuple opprimé, en se reconnaissant une identité historique commune. Teddy, Dolores, Hector Escaton (Rodrigo Santoro), Maeve(Thandie Newton), tous font des efforts pour se souvenir des nombreuses tueries dont ils ont été les victimes et les témoins. L’indignation des robots face à l’exploitation à laquelle ils sont sujets est à l’origine de leur sentiment de révolte, et donc de leur prise de liberté.
La conscience robot se construit donc en suivant une dialectique Hégélienne, comme celle des humains. Pour se prémunir de tous problèmes, les techniciens posent d’ailleurs fréquemment la question : « Have you ever questionned the nature of your reality ? ». Ce questionnement, que l’on voit s’affermir tout au long de la série et échapper au contrôles des humains, est la base du surgissement d’une conscience. Les robots sont conçus par les humains comme des machines, sans libre arbitre, ni mémoire réelle, et sont donc inférieurs à l’homme. Mais c’est en niant cette différence que les robots entament la conquête de leur identité. Ils ne vont cependant pas s’arrêter là. Leur puissance gît dans le dépassement de cette similitude avec l’espèce humaine, troisième étape d’un développement dialectique. En effet, dans cet univers, les robots sont nettement supérieurs aux humains : ils peuvent être réparés et font incessamment l’expérience de la mort. En outre, leurs capacités cognitives sont volontairement bridées par les techniciens mais elles sont nettement supérieures à celles du cerveau humain. Et ils jouissent également d’une mémoire eidétique : ils ont la capacité de revivre leurs souvenirs dans les moindres détails et de se souvenir d’absolument tout.
C’est Maeve, en infiltrant le centre de contrôle, qui va faire l’expérience la plus poussée de cette prise de conscience. En poussant cette analyse philosophique un peu plus loin, le personnage de Maeve, peut être interprétée comme un surhomme Nietzchéen : elle va d’abord prendre conscience de son éternel retour, se confronter aux « dieux », briser les codes et les tabous imposés par ce monde en cherchant à rencontrer ses créateurs, puis à les dominer en niant leur dimension sacrée.

Conscience réfléchie ou conscience manipulée ?


Mais il est intéressant de voir que ces « rêveries », tout comme le programme de base permettant un questionnement intérieur dialogique ont été implantées par leurs créateurs, respectivement Ford et Arnold. Cette base programmée contredit l’idée d’un libre arbitre robotique. En effet, il semble que les robots aient été programmé pour développer une certaine autonomie. Ainsi, leur éveil ne serait pas le fruit d’une évolution spirituelle des robots, mais plutôt la phase d’achèvement d’un projet scientifique, celui de Robert Ford et Arnold Weber. Ce questionnement rappelle celui qui divise aujourd’hui les scientifiques et les philosophes. La conscience est-elle issue de la matière ou d’une disposition spirituelle ? 
Cette idée est particulièrement tangible dans le dernier épisode de la série, quand Maeve découvre que son récit a été altéré et qu’il était écrit qu’elle devait se révolter et sortir du parc. On le voit clairement aussi lorsque Dolores prend l’arme qui a tué Arnold et tire sur Ford à la fin de son discours. Il n’empêche que cette manipulation, ce rire sardonique du créateur selon lequel la fuite des robots a été orchestrée, et ne serait finalement qu’un énième récit programmé par Ford pour libérer le parc des investisseurs, reste ambivalente. En effet, au derniers moments de la première saison, Maeve décide de sortir du train et de rester dans le parc pour aller chercher sa fille. Cette décision la rend « humaine » plus que toute autre, car elle semble finalement se rattacher à son passé, contredire son scénario, et résoudre définitivement la question du libre-arbitre des robots. Ce qui valorise encore l’importance de la mémoire dans la construction d’une identité et dans l’émergence d’une volonté propre.

Conclusion...


Avec l’éveil de la conscience des robots, c’est donc la fiction qui prend vie. Westworld est une série extrêmement complète et bien construite, une fiction vivante, un cyborg cinématographique. Sous ses allures de blockbuster américain réunissant tous les codes d’une bonne série, elle réussit le pari d’être à la fois magnifiquement filmée, admirablement jouée,  superbement écrite, et de se rendre passionnante par la convocation d’un imaginaire cinéphilique très riche, une déconstruction des différents genres cinématographiques, tout en offrant une portée philosophique bien structurée et accessible. Du jamais vu sur le petit écran, selon moi. 
J’ose espérer que la série va réussir à garder ce niveau de qualité dans la saison 2, qui, de toute évidence, devrait se centrer sur une révolte consommée des robots contre les visiteurs, propriétaires et techniciens du parc. Les robots vont enfin « fight back », pour le plus grand bonheur de l’homme en noir. Cela devrait permettre de creuser les thèmes de l’identité robot (en crise, car en plein parricide), et de l’avènement d’une ère post-humaine. En effet, la série peut prendre la forme d’une épopée historique jouant un des moments clés de l’humanité (le début de son extermination?). Nous devrions aussi y suivre la quête de Maeve partant à la recherche de son fils disparu et, du même coup, d’une nouvelle forme d’exister au monde quand on a été fabriqué et non engendré et que nos souvenirs et nos liens affectifs sont factices. Bref, je ne doute pas que si vous m’avez lu jusque là, vous vous régalerez autant que moi samedi soir ! Bon season premiere à vous !
EtienneBouchard
9
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le 15 avr. 2018

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