Xanadu aurait pu être une bonne série. Beaucoup d'éléments sont là : le concept est original et intéressant, le script n'est pas dénué d'idées même s'il paraît un peu forcé, un peu anachronique par endroits, et au niveau de l'image, des plans, la réalisation est vraiment bonne.
Seulement voilà, une bonne photographie ne fait pas tout. J'apprécie franchement les tentatives récentes d'Arte de promouvoir une fiction française différente dans un océan de Joséphine l'ange gardien ou de Louis la brocante ; malheureusement l'essai n'est à mon avis pas vraiment transformé, que ce soit ici ou ailleurs (Les Invincibles...). On retrouve toujours un très bon sens de la composition, une image qui en devient d'ailleurs tristement "typée" Arte (voire typée "création originale Canal+"), typée "regardez les mecs, je fais une série d'auteur" mais les errances typiques de la production française restent (par exemple, le fait que, et c'est triste à dire, la grande majorité de nos acteurs... jouent mal).
Tous les efforts déployés dans Xanadu sont démolis en premier lieu par un casting qui dans son ensemble, en fait des caisses. A la limite, les plus jeunes s'en tirent plutôt bien ; mais le patriarche Valadine surjoue en permanence et ses réactions manquent complètement de fluidité, son fils ainé ne paraît jamais impliqué dans son personnage tandis que le plus jeune, éternel porteur de lunettes de soleil, est un vrai robot sans émotions (c'est sans doute "fait exprès" - mais désolé, ça ne marche pas). Le pompon reviendrait néanmoins sans doute à l'actrice qui campe Elise Jess et son absence totale de naturel. Elle énonce chaque phrase sur un ton qui se veut sensuel, mais la lenteur de son jeu horripile plus qu'autre chose ; non, un être humain n'a en général pas besoin de 15 secondes pour répondre à une question.
Je regrette aussi - mais c'est sans doute assez partial de ma part - un manque notoire de sexe dans la série. Pour une série sur le monde du porno, les séquences sulfureuses sont rares et les plans de nu assez prudes : des séries américaines comme Californication, pourtant plus enjouée voire "familiale" (si, si) et critiquée pour son parfum pseudo-scandaleux très formaté (je dis ça alors que j'adore cette série, notez bien) ou pire, Nip/Tuck, enchaînent davantage les scènes polémiques alors que tout le monde connaît le penchant US pour le puritanisme. La réalisatrice de Xanadu a beau s'en défendre, mais ça sent quelque peu l'auto-censure...
Dommage également que le décor soit complètement impersonnel, froid et que l'on paraisse se trouver dans une France déconnectée du réel, difficilement reconnaissable. L'atmosphère a un petit quelque chose de passéiste, un côté années 80-90 qui tient peut-être des tendances de la photographie à pencher vers le sépia ou le verdâtre (Derrick, m'entends-tu ?). Rien de spécialement grave mais l'impression donnée est un peu étrange.
Que reste-t-il alors à Xanadu ? Quelques plans assez fameux, notamment. La fin du premier épisode, malgré ses faux airs d'Elephant et le fait qu'elle me semble complètement irréaliste ("mais si voyons, les tueries façon Columbine ça arrive tout le temps chez nous !"), est très bien filmée, tout comme - je dois bien l'avouer - l'essentiel de la série. C'est juste parfois un peu facile (les plans sur femmes battues / assiette grouillant de vers) et souvent ouvertement inspiré des séries anglo-saxonnes (le coma de Laurent et son petit monde entre la vie et la mort, du déjà vu et revu, par exemple dans Life on Mars).
Encore un petit effort et peut-être qu'on parviendra à produire des séries dignes de ce nom, voire - oh là là - des séries que l'on pourrait exporter. J'attends encore le Skins, le Misfits, le The Office français...