Les meilleurs films des années 1920 selon Mayeul TheLink

Annotation :

Bon, les 7 heures de film, faut se les farcir, on va pas se mentir. La seconde partie est bien moins prenante que la première, et le rythme a forcément des hauts et des bas.
Ceci étant dit, non seulement ce film me semble techniquement en avance sur son temps (grammaire pas encore au point du cuirassé potemkine mais pas loin, effets de montage dans les climax, jeu sur les points de vue, travellings...), mais là où il me paraît le plus moderne est dans sa manière même de considérer le cinéma comme un outil d'images, de symboles et d'archétypes qui viennent enrichir une réflexion de manière émotionnelle. Là-dessus, le film me semble précurseur de tout un pan du cinéma hollywoodien, jouant sur le pouvoir des images pour représenter l'inconscient du spectateur, et dans le même temps l'embarquer dans une expérience à la fois intime et épique. Aidé par ce regard à mi-chemin entre l'expressionnisme à l'allemande et le naturalisme à la française (les gueules noircies par le charbon, les intérieurs détaillés, les rapports entre différentes classes sociales...). À ce titre, la représentation de la machine-locomotive est représentative, à la fois présentée dans un grand souci de détail, et rendue vivante par le point de vue, la machine respirant presque, battant du cœur, s'énervant et se calmant en fonction des situations.
Et puis la roue comme image faisant le point de départ et le point final du film, comme image d'un destin qui écrase, pour finalement voir la rose du rail s'épanouir dans cette roue des hauteurs montagneuses. Bref, le cinéma comme rêve éveillé, ou comme mythe contemporain.

Annotation :

Assez surpris par la proposition du film. De ce que j'en attendais, le rapport à la foule était bien plus concret, avec un traitement du monde du travail bien plus analytique. Mais finalement, La Foule traite tout ça de manière bien plus abstraite en se concentrant sur l'histoire du couple d'un homme. Dès lors, le rapport du spectateur aux thématiques exposées est bien moins dans le vertige que dans l'émotion, avec en exception le plan final d'une ambiguïté exceptionnelle sur l'utilité de se fondre dans la masse. La mise en scène est d'une grande fluidité, et offre quelques belles idées (les plongées pour se donner l'impression que nous sommes au-dessus de la masse lorsqu'elles se font point de vue d'un personnage, ou au contraire pour nous rappeler à notre condition d'individu parmi d'autres lorsqu'il s'agit d'un point de vue plus omniscient, des travellings avant pour lentement faire réaliser au personnage l'événement qui vient de se dérouler, mort du père, naissance du fils...). Le film a également un grand éventail d'émotion à proposer : drame, comédie, romance... Tout y passe avec un équilibre qui force le respect.

Annotation :

Comme l'impression de voir un jalon de toute une idée du cinéma hollywoodien. La rencontre de l'intime et de l'épique, la caméra qui sait se faire invisible, un Paris fantasmé, voire même les embryons de l'idée de self made man avec cette image de l'échelle sensée nous extirper autant de notre misère émotionnelle que sociale... Et une échelle qui marche au courage, bien entendu, à la seule force de la volonté de l'individu. Mais Seventh Heaven parle sans doute plus de spiritualité que de matérialité.
Au-delà de ça, si la seconde partie épique m'a moins touchée (partie la plus apte à vieillir forcément), la première moitié du film est ce que le muet peut faire de mieux : une histoire d'amour dans sa plus simple sensibilité, des personnages opposés qui se nourrissent de ce qui manque à l'autre, et puis en fin de film l'idée de mieux voir l'existence par l'amour. Un grand film américain, apte à combattre le cynisme le plus inébranlable.

Annotation :

Un travail sur l'expressionnisme moins débridé que chez les allemands mais tout aussi efficace, avec des trouvailles visuelles qui se succèdent à chaque instant. La plongée du personnage dans la folie représentée dans l'image est particulièrement prenante par le soin apporté aux objets et décors, et tous les mouvements de caméra pour donner à tout ça une présence fantomatique des plus réussies.