SensCritique

Les meilleurs films de 2024 selon cinelolo

24 films pour se souvenir de 2024, plus précisément des films sortis en salle en France entre le 1er janvier 2024 et le 31 décembre 2024 (cette sélection restera évolutive au moins jusqu'en janvier 2025)

Liste de

24 films

créée il y a 16 jours · modifiée il y a 11 jours
Les Graines du figuier sauvage
7.6
1.

Les Graines du figuier sauvage (2024)

Daneh Anjeer Moghadas

2 h 46 min. Sortie : 18 septembre 2024 (France). Drame

Film de Mohammad Rasoulof

cinelolo a mis 9/10.

Annotation :

Ce long métrage fait d'emblée événement, puisqu'il s'agit du dernier film réalisé clandestinement en Iran par Mohammad Rasoulof avant son exil. Il peut donc se prêter à des commentaires qui font fi de ses qualités cinématographiques, ce qui est très injuste, tant le film possède une force remarquable (ce qui était déjà le cas du "Diable n'existe pas", Ours d'or en 2020). Iman, fonctionnaire, vient d'être nommé enquêteur au tribunal révolutionnaire. Il se veut intègre, mais doit accepter des ordres sans possibilité d'étudier les dossiers. Pendant ce temps, des émeutes éclatent. Pour assurer leur sécurité, Iman demande à sa femme et à ses deux filles d'être discrètes, tandis qu'on lui confie une arme de service. Les deux adolescentes suivent la révolte des femmes sur leurs téléphones... La première grande force du film réside dans le fait que la famille constitue une allégorie de la situation politique du pays entier, tout en constituant des personnages réalistes à part entière. La grandeur de la mise en scène accentue cette impression : si le film est d'abord un huis clos tendu dans l'appartement familial, il convoque ensuite des genres cinématographiques qu'on attendait pas forcément et qui lui donnent une ampleur peu commune. Un des meilleurs films de l'année, qui aurait dû recevoir à Cannes un prix bien plus élevé que l'accessit (prix spécial) créé pour l'occasion.

Le Roman de Jim
6.8
2.

Le Roman de Jim (2024)

1 h 41 min. Sortie : 14 août 2024. Comédie dramatique

Film de Arnaud Larrieu et Jean-Marie Larrieu

cinelolo a mis 9/10.

Annotation :

Jim est l'enfant de Florence, une femme aussi précaire socialement que libre intimement. Il est élevé dès sa naissance par sa mère et par Aymeric, une bonne pâte qu'elle a abordée alors qu'elle était déjà enceinte. Des années plus tard, le père biologique de Jim, devant surmonter un drame personnel inattendu, débarque à nouveau dans la vie de Florence... Les frères Larrieu changent de genre cinématographique à chaque film, tout en continuant à ne pas faire comme tout le monde. Mais les provocations plus ou moins pertinentes des débuts ont laissé la place à une prenante maturité. Après avoir agréablement surpris avec une comédie musicale ("Tralala"), ils réussissent parfaitement un mélodrame qui joue très habilement des ellipses et de la rétention d'effets. Ils ont fait une petite infidélité à leurs Pyrénées pour inscrire l'action au coeur du Jura, comme dans le roman de Pierric Bailly, qu'ils transposent à l'écran. Le film est assez renoirien, dans le sens ou chacun a ses raisons (au départ, jusqu'à un certain point), mais savent inscrire leurs personnages singuliers (formidablement incarnés par Karim Leklou, Laetitia Dosch, Sara Giraudeau ou le chanteur Bertrand Belin) dans des paysages qui ne sont pas de simples décors.

Los Delincuentes
7
3.

Los Delincuentes (2023)

3 h 09 min. Sortie : 27 mars 2024 (France). Comédie dramatique

Film de Rodrigo Moreno

cinelolo a mis 8/10.

Annotation :

Moran, le trésorier d'une banque de Buenos Aires, s'arrange pour voler 650000 dollars à son travail. Il confie l'argent à un collègue, Roman. Le plan est le suivant : Moran se rend quelques jours plus tard, purge sa peine, et à la sortie de prison, les deux comparses récupèrent le magot, et n'auraient plus besoin de travailler. Le but du casse ne serait donc pas de faire fortune, mais de gagner du temps libre. Mais tout n'est pas si simple... Il ne faut pas avoir peur de la durée du film (environ 3h), scindé en deux parties, et qui mêle plusieurs genres. On se plonge avec délice dans le romanesque des situations et les caractères haut en couleur de tous les personnages. La plupart des interprètes sont inconnus chez nous, à part Laura Paredes qui joue la cadre des assurances qui conduit l'enquête interne à la banque, et qui était déjà au coeur des remarquables "La Flor" et "Trenque Lauquen", du collectif El Pampero Cine (dont Rodrigo Moreno ne fait pas partie). Au fil de tous les développements, on découvre un film d'inspiration plutôt libertaire (mais au sens antilibéral du terme).

L’Affaire Nevenka
7.1
4.

L’Affaire Nevenka (2024)

Soy Nevenka

1 h 57 min. Sortie : 6 novembre 2024 (France). Biopic, Drame

Film de Icíar Bollaín

cinelolo a mis 8/10.

Annotation :

Iciar Bollain, une cinéaste toujours passionnante, reconstitue ce qui a abouti à la première condamnation d'un homme politique espagnol pour harcèlement sexuel, au début des années 2000. Si l'on ne s'en tient pas aux apparences classiques, et qu'on regarde de près les choix effectués, dans la forme et dans le fond, par la cinéaste, on sera frappé par l'acuité contemporaine de son regard. Sur le fond, peu de scènes sont consacrées au procès lui-même, car l'essentiel réside dans la description de toutes les étapes (et épreuves) qui le précèdent, dans une pédagogie encore nécessaire. Par exemple, le film ne fait pas l'impasse sur les inversions de culpabilité qui pèsent sur la protagoniste, une jeune femme de 25 ans, conseillère municipale sur la liste du maire charismatique qui lui a fait rapidement gravir les échelons. Dans le cinéma d'Iciar Bollain ("Même la pluie", "Les Repentis"), ce sont des actes qui peuvent être classés comme bien ou mal : les personnages, eux, ne sont pas manichéens. C'est encore le cas ici, grâce aux interprétations millimétrées de Mireia Oriol dans le rôle titre et de Urko Olazabal dans celui du potentat local, mais tous les personnages secondaires bénéficient d'une grande finesse d'écriture. Quant à la forme, la représentation des scènes cruciales doit tout à une réflexion extrêmement précise, qui renouvelle le regard bien plus que d'autres qui le claironnent davantage.

Averroès & Rosa Parks
7.8
5.

Averroès & Rosa Parks (2024)

2 h 24 min. Sortie : 20 mars 2024. Société

Documentaire de Nicolas Philibert

cinelolo a mis 8/10.

Annotation :

Avec ce film, Nicolas Philibert prolonge le travail entrepris avec "Sur l'Adamant". Les lieux sont plus austères, mais le documentaire est surtout composé de séances d'entretien entre soigneurs et soignés. Même si la question est un peu abordée lors d'une réunion, le cinéaste ne tranche pas le débat sur l'utilité des institutions psychiatriques et de leurs formes. En revanche, il continue à réintégrer dans une pleine humanité les patients (dont quelques figures déjà croisées sur l'Adamant) qui constituent l'âme du film. Et par suite on peut s'interroger, dans le prolongement des réflexions des militants et militantes intersectionnelles actuelles, sur le caractère "validiste" de nos sociétés contemporaines, en voyant ces êtres si humains mais qui ne pourraient pas satisfaire les exigences capitalistes et s'insérer dans une compétition économique toujours plus rapide et intense (au grand dam des rapports sociaux et des milieux naturels).

Guérilla des Farc - L'avenir a une histoire
7.3
6.

Guérilla des Farc - L'avenir a une histoire (2024)

2 h 22 min. Sortie : 11 décembre 2024. Historique, Société

Documentaire de Pierre Carles

cinelolo a mis 8/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Pierre Carles réalise peut-être son film le plus ample. S'il remonte aux origines du conflit, à l'aide d'archives, mais aussi d'extraits de fiction de l'ex-compagnon de la mère de Carles, Dunav Kuzmanich, réalisateur chilien exilé en Colombie après la prise de pouvoir de Pinochet, le documentaire bénéficie surtout d'un tournage effectué sur près de dix ans, des prémisses du processus de paix à ses premiers bilans. Le temps long, luxe accordé par la productrice Annie Gonzalez, permet ainsi de mesurer l'évolution des analyses des protagonistes. Le film est assez long (2h20). Alors certes il n'épuise pas pour autant les angles possibles, mais donne un éclairage essentiel qui comble les lacunes et les partis pris des médias occidentaux dominants (Pierre Carles, par ailleurs travaillé par la question médiatique, de "Pas vu, pas pris" à "Fin de concession", livre un matériau qui s'inscrit dans une sorte d'alternative à ces traitements, par une démarche située, mais qui n'assène pas une doxa clé en mains et qui inclut des éléments réflexifs sur le film en train de se fabriquer).

Miséricorde
7.1
7.

Miséricorde (2024)

1 h 42 min. Sortie : 16 octobre 2024. Comédie, Policier

Film de Alain Guiraudie

cinelolo a mis 8/10.

Annotation :

Depuis Toulouse où il est installé, Jérémie se rend dans le village de son enfance pour aller à l'enterrement de son ancien patron boulanger. Il est hébergé par la veuve de ce dernier, et il y reste quelques jours... Il serait sacrilège de dire plus de l'intrigue. En effet, le film n'arrête pas de se réinventer en chemin. Et pourtant, pour ce faire, il n'use en rien de coups de théâtres scénaristiques spectaculaires (les fameux "twists"). Bien qu'on ne doute jamais d'être face à un nouveau Guiraudie, on y avance sans anticiper où est-ce qu'il va nous emmener. Cela tient en grande partie à sa mise en scène, non pas par des effets formalistes ostentatoires, mais au contraire par un travail virtuose de tous les instants mais en apparence invisible sur la lumière (y compris lorsqu'elle est faible dans certaines séquences nocturnes), les sons (aussi importants que les images pour restituer les paysages), et une certaine perversité amorale dans l'écriture des personnages. Le tout est une réjouissante parenthèse loin des conventions et à l'opposé des films trop programmatiques.

La Grâce
6.4
8.

La Grâce (2022)

Blazh

1 h 59 min. Sortie : 24 janvier 2024 (France). Drame

Film de Ilya Povolotsky

cinelolo a mis 7/10.

Annotation :

Au moyen d'un van aménagé, un père et sa fille de quinze ans sillonnent la Russie occidentale, du sud au nord. Pourquoi ? On n'éventera pas les secrets ici, le récit étant plus ou moins bâti sur la rétention d'informations, distillant les éléments au compte-gouttes. On découvrira ainsi comment ils gagnent leur vie, ou quel est l'objet de leur périple. Mais la grande force du film, c'est sa mise en scène. Elle est à la fois naturaliste, concrète, mais aussi teintée de mélancolie ou même de métaphysique. A plusieurs reprises, des panoramiques abandonnent les personnages, avant que ceux-ci ne réapparaissent dans le champ, à la fin du mouvement d'appareil. C'est emblématique du grand sens de l'espace et du cadre avec lequel le cinéaste laisse surgir les coins reculés traversés, tout en s'intéressant à la vérité intérieure de nos deux itinérants.

Ernest Cole, photographe
6.4
9.

Ernest Cole, photographe (2024)

Ernest Cole: Lost and Found

1 h 46 min. Sortie : 25 décembre 2024. Portrait, Photographie

Documentaire de Raoul Peck

cinelolo a mis 7/10.

Annotation :

Raoul Peck alterne fictions documentées et documentaires très narratifs. Ce film-ci, Œil d'or au dernier festival de Cannes, fait partie des seconds. Ernest Cole est le premier photographe sud-africain à avoir montré au monde entier la réalité de l'apartheid. Raoul Peck livre en voix off le point de vue de Cole, en se basant sur son livre "House of Bondage", publié en 1967, et qui lui vaut son exil aux Etats-Unis, mais aussi aux propos rapportés par ses proches. La plupart des images, parfois analysées avec précision, proviennent de dizaines de milliers de négatifs pris par Cole lui-même, et découverts en 2017 dans le coffre d'une banque suédoise. Méditation puissante, et nécessaire par les temps qui courent, sur l'apartheid, le racisme colonial, et l'exil.

They Shot the Piano Player
6.3
10.

They Shot the Piano Player (2023)

1 h 40 min. Sortie : 31 janvier 2024 (France). Animation, Drame, Historique

Long-métrage d'animation de Fernando Trueba et Javier Mariscal

cinelolo a mis 7/10.

Annotation :

Il s'agit d'un documentaire animé, hybridation de genre dont "Valse avec Bachir" (Ari Folman) a été un précurseur. Il fait revivre les années 1960, lorsque la bossa nova naissante faisait la noce avec le jazz. C'est aussi une enquête contemporaine du journaliste américain Jeff Harris autour de la disparition de Tenorio Junior, un pianiste brésilien, instrumentiste et compositeur surdoué, à Buenos Aires en 1976. Il rencontre du beau monde (Gilberto Gil, Caetano Veloso et autres orfèvres), ainsi que des proches ou des membres de la famille du disparu. La petite histoire, qui rejoint la grande (celle, tragique, de l'Amérique latine), émeut, bien servie il est vrai par le style très roman graphique des dessins, particulièrement bien adapté, tandis que les sessions musicales, un régal pour les oreilles, enthousiasment.

Les Fantômes
6.8
11.

Les Fantômes (2024)

1 h 46 min. Sortie : 3 juillet 2024. Drame, Thriller

Film de Jonathan Millet

cinelolo a mis 7/10.

Annotation :

Deux ans après avoir été relâché en plein désert de la prison de Saidnaya, on retrouve Hamid en 2016, en train de travailler sur un chantier. Mais il consacre son temps libre à retrouver la trace d'un de ses tortionnaires, dont il n'a qu'une photo floue. Il ne peut d'ailleurs pas s'en remettre à la seule vue, lui qui avait la tête emprisonnée dans un sac lors des sévices. Jonathan Millet, venu du documentaire, connaît bien son sujet, mais a choisi la fiction pour rendre compte du traumatisme d'Hamid. Il emprunte de surcroît la forme du film à suspense plutôt que de la chronique. La tension et le trouble sensoriel qui traversent peu à peu les séquences proviennent de l'interprétation puissante mais singulière d'Adam Bessa, de presque tous les plans, mais aussi et surtout du travail sonore, toute la bande son, qui ne se réduit pas à la musique originale, inspirée, de Yuksek.

En fanfare
6.8
12.

En fanfare (2024)

1 h 43 min. Sortie : 27 novembre 2024. Comédie

Film de Emmanuel Courcol

cinelolo a mis 7/10.

Annotation :

Thibaut, chef d'orchestre de renommée internationale, apprend qu'il est atteint d'une maladie grave, et que seule une greffe pourrait le sauver. En cherchant un donateur, il se rend compte qu'il a été adopté, et retrouve l'identité d'un frère biologique, Jimmy, cantinier à Walincourt. Thibaut découvre que Jimmy joue du trombone dans la fanfare locale, et qu'il a l'oreille absolue... Devant ce film, peut-être que le jeune Truffaut aurait parlé de "qualité France", puisque le réalisateur semble appréhender le cinéma comme s'il était un (demi) frère du théâtre. Le film est écrit aussi précisément qu'une portée musicale, avec des accents toniques légèrement appuyés pour créer une ligne claire nullement démagogique qui n'abêtit ni les personnages ni les spectateurs-trices. Quand bien même on a un peu d'avance sur certaines scènes, cette conception du travail bien fait est raccord avec la dimension sociale du film, qui se déplace d'une chronique attendue des déterminismes sociologiques vers celle d'une lutte contre une délocalisation. L'amour de la musique fait office de recherche d'harmonie et de fraternité, Pierre Lottin, Benjamin Lavernhe et Sarah Suco sont des stradivarius, et le sens constant de la mesure aboutit paradoxalement à un crescendo superbe. Devant ce film, chacun pourra se dire : j'ai fréquenté la beauté (du geste, c'est tout ce qu'il nous reste).

Le Procès du chien
5.9
13.

Le Procès du chien (2024)

1 h 23 min. Sortie : 11 septembre 2024. Comédie

Film de Laetitia Dosch

cinelolo a mis 7/10.

Annotation :

Quelques semaines seulement après le "Roman de Jim" des Larrieu, Laetitia Dosch est à nouveau à l'affiche d'un des films les plus réussis de l'année, avec un personnage plus proche de ce qu'on croit savoir de sa personnalité. Le film est d'ailleurs le premier long métrage qu'elle écrit et réalise elle-même. Le chien du titre, habituel compagnon d'un malvoyant, est accusé d'avoir mordu au visage une femme. L'humour n'est jamais mécanique, mais est traversé par des sujets de société abordés de façon brillante et décalée : antispécisme (un chien est-il un objet ou une personne que l'on peut juger ?), féminisme (pourquoi ne s'attaque-t-il qu'aux femmes ?). La réalisatrice s'attribue le rôle d'une avocate des causes perdues qui devient celle de l'animal, et sait s'entourer : de François Damiens (le maître) à Jean-Pascal Zadi (comportementaliste animalier) en passant par Anne Dorval, procureure d'extrême droite qui réclame la peine de mort pour le canin tout en affichant une proximité avec ses chats...

Sauvages
6.8
14.

Sauvages (2024)

1 h 27 min. Sortie : 16 octobre 2024. Animation, Aventure, Jeunesse

Long-métrage d'animation de Claude Barras

cinelolo a mis 7/10.

Annotation :

Des films qui veulent sensibiliser le jeune public aux questions écologiques, ce n'est plus ça qui manque. Ce nouveau long métrage de Claude Barras se distingue néanmoins, à la fois sur le fond et sur la forme. Sur le fond, au lieu de nous ressortir la fable du même bateau dans lequel on serait tous un peu responsable, l'histoire montre la forêt tropicale de Bornéo menacée de destruction par l'expansion de plantation de palmiers à huile destinée à l'agro-industrie mondiale. Et montre la résistance du peuple autochtone. On remarque aussi le slogan "Nous sommes la nature qui se défend" popularisé chez nous par les Soulèvements de la Terre. Mais le film n'est pas un tract, et l'intrigue avance cahin-caha via deux personnages de collégiens et un bébé orang-outan orphelin qu'ils ont recueilli. Sur la forme, Claude Barras, après le succès de "Ma vie de Courgette", utilise à nouveau la technique du stop motion avec des marionnettes très expressives. Comme le montrait déjà le récent "Interdit aux chiens et aux italiens" de Alain Ughetto, cette technique est assez idéale pour créer de vrais personnages et traiter de sujets qui demandent de la profondeur.

Vivre, mourir, renaître
6.4
15.

Vivre, mourir, renaître (2024)

1 h 49 min. Sortie : 25 septembre 2024. Drame

Film de Gaël Morel

cinelolo a mis 7/10.

Annotation :

Je n'avais jusque là pas suivi la carrière de réalisateur de Gaël Morel, acteur découvert chez Téchiné. Ce film est assez remarquable, et se situe en France dans les années 1990, environ une décennie après l'action des "Témoins" de Téchiné (dans lequel il ne jouait pas, contrairement au regretté Michel Blanc). Le VIH continuait de briser des vies et des liens. Le titre dialogue de façon non fortuite avec "Plaire, aimer, courir vite" de Christophe Honoré (remercié au générique), mais les personnages sont plus jeunes, très incarnés. Chaque infinitif pourrait être relié à l'un des sommets de ce triangle de roseaux sauvages qui n'est pas exactement un trouple pour autant. L'histoire émeut moins par le scénario que par le soin de son exécution : au lieu de viser la pure modernité (comme Rebotini pour "120 battements par minute") ou les grands violons, la musique accompagne les protagonistes par des notes essentiellement pianistiques classiques (Debussy entre autres), à l'image de ce film où l'intensité et la fougue se conjuguent avec une forme de pudeur...

Borgo
7
16.

Borgo (2023)

1 h 57 min. Sortie : 17 avril 2024. Drame

Film de Stéphane Demoustier

cinelolo a mis 7/10.

Annotation :

De film en film, la manière de Stéphane Demoustier ("Terre battue", "La Fille au bracelet") prend de l'ampleur. Deux trames narratives sont ici montées en parallèle : d'un côté une enquête sur un probable règlement de comptes entre bandes rivales en Corse, de l'autre côté l'arrivée depuis le continent d'une surveillante au centre pénitentiaire de Borgo. Bien que l'atmosphère puisse faire penser à "Un prophète" de Jacques Audiard, le film n'en pâtit pas. La maîtrise formelle est indéniable tout en ne s'interdisant pas des surprises (une reprise d'un tube de Julien Clerc à l'intérieur d'une scène d'une belle intensité, par exemple). Et bien sûr, au centre de l'enchaînement des faits, il y a le jeu de Hafsia Herzi, tour à tour (ou parfois simultanément dans le même plan) lumineuse et opaque à souhait...

All We Imagine As Light
6.6
17.

All We Imagine As Light (2024)

1 h 55 min. Sortie : 2 octobre 2024 (France). Drame

Film de Payal Kapadia

cinelolo a mis 7/10.

Annotation :

Mumbai de nos jours. Prabha, dont le mari est parti travailler en Allemagne, est infirmière dans le même hôpital que la jeune Ana, sa colocataire, qui vit une relation en cachette avec un garçon musulman. Sur son lieu de travail, Prabha tente de soutenir également Parvaty, une femme veuve plus âgée et menacée d'expulsion... Une des grandes forces du film (Grand-Prix à Cannes), qui peut toutefois constituer aussi une limite, tient dans le fait qu'une seconde vision décuple son intérêt. La mise en scène est très travaillée et moderne, mais peut se comprendre avec retard : aucun détail n'est laissé au hasard, mais Payal Kapadia n'est pas une cinéaste démiurge qui dirige le regard. Par moments, et dès le prologue qui prend le pouls de la grande ville, on entend les voix de personnages qui à l'écran n'ouvrent pas leurs lèvres. Alors que dans la dernière partie, dans un village de bord de mer, un mystérieux personnage échoué finit par prononcer certaines paroles : on le voit bien parler, et pourtant, dans un subtil halo, il pourrait bien s'agir d'une projection mentale d'une des héroïnes...

Trois Amies
6.7
18.

Trois Amies (2024)

1 h 57 min. Sortie : 6 novembre 2024. Comédie dramatique, Romance

Film de Emmanuel Mouret

cinelolo a mis 7/10.

Annotation :

Si c'est bien l'amitié qui relie Joan, Rebecca et Alice, les trois amies du titre (India Hair, Sara Forestier, Camille Cottin, toutes à l'aise dans des rôles funambules), Emmanuel Mouret ausculte plutôt d'autres sentiments humains, leurs paradoxes, leurs apparentes inconstances. Sur le papier, certains éléments pourraient relever d'un vaudeville, or ce nouvel opus se révèle d'une profondeur inattendue. Comme dans "Les Choses qu'on dit, les choses qu'on fait", il tisse avec virtuosité un faisceau d'intrigues, mais cette fois-ci en restant dans le présent, sans entremêler des temporalités différentes. Comme chez Rohmer ou Allen c'est un cinéma très parlant, dans lequel on suit les questions existentielles des personnages. Mais une grande attention a été portée à la forme, par exemple avec une voix off qui n'est nullement un narrateur abstrait et surplombant, mais ici celle d'un des personnages masculins qui, par la force des choses, peut tout observer. On notera la pincée d'utopie de cet univers, où les protagonistes ne sont confrontés ni à des questions matérielles ni à des relations toxiques.

Les Carnets de Siegfried
6.1
19.

Les Carnets de Siegfried (2021)

Benediction

2 h 17 min. Sortie : 6 mars 2024 (France). Biopic, Drame, Guerre

Film de Terence Davies

cinelolo a mis 7/10.

Annotation :

Le style de Terence Davies, éloigné de toute emphase, pourra être jugé froid par certains néophytes, il n'en reste pas moins que le film est émouvant, à sa façon. Inutile d'être un spécialiste de Siegfried Sassoon pour apprécier ce film. Il s'agit de l'histoire de ce poète qui a traversé le XXè siècle. Son expérience de la Première guerre mondiale le rend résolument pacifiste, alors qu'il s'exprime déjà d'une position minoritaire du fait de son identité sexuelle (homosexuelle). On peut aussi le voir comme une autobiographie déguisée du cinéaste lui-même qui s'autorise, avec son grand âge, des effets détonants comme le morphing, avec un résultat pour une fois convaincant. Un privilège de l'âge qu'on a déjà remarqué chez Oliveira ou Erice. Le film dépasse cependant son sujet, en tirant le portrait complexe d'un artiste doué, mais jaloux du (et hanté par le) talent d'un autre poète, fauché prématurément.

Une famille
7
20.

Une famille (2024)

1 h 22 min. Sortie : 20 mars 2024. Société, Littérature

Documentaire de Christine Angot

cinelolo a mis 7/10.

Annotation :

Je n'ai jamais été un grand admirateur du personnage public, mais en revanche l'histoire personnelle de Christine Angot m'a toujours touchée, particulièrement depuis "Un amour impossible", l'adaptation du roman éponyme d'Angot par Catherine Corsini. Désormais, l'écrivaine a décidé que les mots écrits ne suffisaient plus. Avec la complicité de la chef opératrice Caroline Champetier, elle a décidé de se confronter à divers membres de sa famille, afin de faire voler les non-dits. Elle commence par imposer à la veuve de son père incestueux (qui n'est pas sa mère biologique) une discussion à bâtons rompus. Si l'expression orale constitue une thérapie pour Christine Angot, sa démarche cinématographique se veut utile pour elle-même mais aussi pour tous et toutes les autres, à l'instar des ondes de choc provoquées par les livres de Camille Kouchner ou Vanessa Springora, et montre également les conséquences des crimes de son père sur les autres membres de la famille.

L'Homme d'argile
6.7
21.

L'Homme d'argile (2023)

1 h 34 min. Sortie : 24 janvier 2024. Drame, Romance

Film de Anaïs Tellenne

cinelolo a mis 7/10.

Annotation :

Raphaël (Raphaël Thiéry), la cinquantaine bien tassée, vit avec sa mère dans un petit pavillon à l'entrée d'un domaine dont il est le gardien. Il est aussi l'ami de la factrice du coin (Marie-Christine Orry, formidable second rôle). La vie de ce colosse rustique, qui a perdu l'usage d'un oeil, va changer lorsque Garance (Emmanuelle Devos), l'héritière du château et artiste contemporaine reconnue, débarque lors d'une nuit d'orage... On est frappé par la singularité de ce conte, paradoxalement lyrique et sobre à la fois. Il échange sans ostentation les rôles genrés d'artiste et de muse. L'étrangeté discrète de ce premier long métrage, maîtrisé au niveau de l'image comme du son, et qui avance sans enfiler les points de passage obligés, rend d'autant plus fascinantes les paroxystiques vingt dernières minutes.

Marcello Mio
5.4
22.

Marcello Mio (2024)

2 h. Sortie : 21 mai 2024. Comédie

Film de Christophe Honoré

cinelolo a mis 7/10.

Annotation :

Les films où les interprètes "jouent leur propre rôle" (selon l'expression consacrée et réductrice) ne sont pas toujours des réussites. Mais, dans le cas du dernier Honoré, le résultat est bien plus qu'honorable. Racontant l'histoire d'une Chiara Mastroianni se faisant la tête et l'allure de son père Marcello, il aurait pu prétendre à la Queer Palm, tout en se gardant bien de cocher quelque case que ce soit. Moins roublard et plus profond que le dernier Dupieux, le film s'enrichit constamment au fil des séquences sans jamais s'alourdir. Il y a de l'inventivité et de l'inattendu dans chaque plan (le film ne cesse de se déplacer subtilement). L'ensemble n'est pas nombriliste, car le cinéaste a la générosité de convoquer des personnalités très éloignées de son propre univers (Fabrice Luchini, Nicole Garcia). Et il régale les oreilles par une utilisation non clichetonneuse et très élaborée de la musique (comme dans une séquence de reprise de Daho).

The Summer With Carmen
6.3
23.

The Summer With Carmen (2023)

To kalokairi tis Karmen

1 h 46 min. Sortie : 19 juin 2024 (France). Comédie

Film de Zacharias Mavroeidis

cinelolo a mis 7/10.

Annotation :

En vacances sur une plage, Nikitas, aspirant réalisateur, demande à Démosthène, un ancien acteur devenu fonctionnaire, des idées pour un prochain scénario, un film gay à petit budget selon les desiderata de son producteur. En voyant une femme passer avec un chihuahua ressemblant à Carmen, l'ancienne chienne de Démosthène, les deux amis envisagent de raconter les amours tumultueuses de ce dernier. En choisissant de ne pas montrer de LGBT-phobies, ce qui laisse aux personnages le loisir de s'occuper d'eux-mêmes, Zacharias Mauroeidis livre, dans la forme comme dans le fond, un film solaire, grâce également aux interprétations hautes en couleur mais nuancées de Torgos Tsiantoulas et Andreas Labropoulos. Même le dispositif "méta" (film dans le film) est utilisé de façon futée et léger. Une sorte de feel good movie par temps pourtant obscurs...

A Man
6.6
24.

A Man (2022)

Aru Otoko

2 h 01 min. Sortie : 31 janvier 2024 (France). Drame, Thriller

Film de Kei Ishikawa

cinelolo a mis 7/10.

Annotation :

Rie, mère célibataire d'un petit garçon, est propriétaire d'une petite papeterie. Elle y rencontre Daisuke, un client venu lui acheter de quoi dessiner. Ils nouent une relation. Ellipse. On les retrouve mariés quelques années plus tard. Daisuke est bûcheron, et trouve la mort dans l'exercice de ses fonctions. Plus tard, Rie s'aperçoit qu'il n'était pas celui qu'il prétendait être, et engage un ami avocat, Kido, pour en savoir plus. Il s'agit d'un drame profond et trouble autour de la notion d'identité et de quête de soi, au sein d'une société pas forcément très ouverte. Les interprètes (dont Sakura Andô, déjà appréciée dans "L'Innocence" de Kore-Eda) sont dirigés avec finesse à l'intérieur d'une mise en scène posée, dont le regard évolue au fil de mini-coups de théâtre (la toute fin étant davantage un clin d'oeil psychologique qu'un twist de dernière minute).

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