Étant déjà le pilier des Public Announcement et le principal protagoniste de Born Into The 90's, il était tout bonnement naturel que la carrière du jeune R Kelly se dessine en solitaire. Celle-ci prend forme dès l'année suivante, en 1993, avec son tout premier opus 12 Play. Pressé de confirmer à la gente féminine son bon savoir faire, celui qui se fait également appeler Kells, décide de dévoiler son romantisme et la (sex) lover attitude d'un jeune de Chicago à travers douze pistes, douze morceaux imparables semblables au charme et à la symbolique des douze coups minuit. Dans cette même période il travaille sur l'ensemble des paroles des futures chansons de la nièce de Barry Hankerson, suite à la demande de celui-ci. L'album de cette chanteuse au fort potentiel appelée Aaliyah verra le jour en 1994 et s'intitulera Age Ain't Nothing But A Humber. Une collaboration et une alchimie qui ne se fera pas seulement au niveau artistique puisque les deux artistes décident de se marier l'année d'après. Oui mais voila, 12 c'est également l'âge qui les sépare, et malgré les démentis des proches, la presse a trouvé la confirmation de l'union secrète de la jeune prodige de 15 ans avec le gentleman Kelly, qui lui en a déjà 27. Un mariage qui sera vite annulé au vu des nombreuses critiques et de la polémique que cela a créé.
Mais revenons en à 12 Play. Intégralement écrit, composé et arrangé par lui-même, ce disque est le reflet de son immense talent, qui ne cesse de s'accroître. Et le public qui découvre ce prodige, l'accepte tout de suite, car l'album devient rapidement disque de Platine (de nos jours il est 5 fois platines). Notamment avec ces langoureuses ballades qui dévergondent les jeunes demoiselles par son style de séducteur mais en parlant aussi souvent de sexe. A l'image de « Sex Me », piste d'une durée d'environ 12 minutes, le temps selon lui de faire quelques actes intimes sous le couette. Une ambiance slow dance qui amène des singles comme « Bump N' Grind », « Your Body's Callin' », ou encore le festif « Summer Bunnies » dans le haut des charts US. 12 Play est l'album de lover par excellence, les douces mélodies à base de piano, de synthé ou de quelques riffs de guitares amènent une émotion propre aux démarches de séduction, d'amour et d'actes sexuels que R Kelly ressasse inlassablement dans ses morceaux. Si cet album est rempli d'amour c'est aussi et sûrement parce qu'il le dédicace à sa mère récemment décédée, principalement sur « Sadie » avec laquelle il lui rend un hommage très touchant, mené par les flamboyants chœurs d'Yvonne Gage et Robin Robinson. Il extériorise sa rage en déployant toute sa puissance vocale, celle-là même en laquelle croyait sa mère et dont sa prof de chant (Lena McLin) lui en a appris les bases fondamentales.
Bien que la majorité du disque soit dans cette ambiance slow, il n'en est pas moins imprégné par la puissance du New-Jack qui reste encore dans ces années-là un courant très en vogue. Les swingbeats et couplets rappés des « Homie Lover Friend », « Freak Dat Body », « I like The Crotch On You » ou de « Back To The Hood of Thing » samplant le 'Rat-tat-tat-tat' de Dr Dre, toutes apportent leur lot d'énergie à ce 12 Play. Démontrant avec ce premier solo ses multiples facettes d'artiste, de producteur à parolier, R Kelly offre un opus frais et convaincant. Et le génialissime talent du garçon ne vient qu'à peine d'être exploité...