Les courants d'air défilent dans sa tête parfois ponctués par les assauts, courriels délétères d'un voyage biologique, divagations brumeuses d'alcool frelaté, courts circuits neuronaux d'essences rances, de médicaments impuissants à laver l'affront du temps qui amalgame tout en une pourriture poussiéreuse. La folie est une merveille inaccessible au commun, elle bouscule tout, détruit pour refaire immédiatement dans une démesure sans pareil. Il est des hommes qui sont fous comme on a les cheveux blonds, comme on se tient debout affrontant un vent violent qui te pousse irrémédiablement vers un puits. La chute est inéluctable mais tu luttes maigrement tout en connaissant l'issue. L'aliéné lui saute sans se poser de questions. "Il est fou" disent les hommes sérieux. Alors il tombe, tombe sans fin et le vent lustral rempli sa cervelle, la comble de ses manques et la vide de tout ce qui est inutile : intelligence et réflexion. Libéré de ces entraves il laisse l'intuition, forme supérieure de discernement, le guider. L'instinct prend le pas et le fou, ou plutôt qualifions le de bouffon se met à chanter, à hurler des comptines sans suite, sans queue ni tête. Il change sans cesse, se métamorphose, perd sa tête, normal pour un fou puis la recompose, devient bicéphale dédoublant ainsi sa puissance anormale. Il continue ainsi et devient une hydre dodécacéphale. Il est un monstre, une aberration. Il fait peur et tous fuient effrayés et affolés par ce personnage si différent mais pourtant si beau. Le génie de la folie le transfigure améliore ce qu'il était car c'est l'art qui le guide et lui seul peut s'ériger en face de la mort.
Pris d'une lubie créatrice il nomme chaque mélopée et ses douze bouches entament alors une chanson différente. Douze mélodies affolantes entrecoupées de divagations sonores futiles. La première est puissante (Head Horse) puis d'autres sensations ou sentiments s'installent. Violence (Envers et contre tête), Prêche Satanique (Teo tertem), Délire industriel (Washing Head repris par Christian Death dans son album Pornographic Messiah "Washing Machine"), Liturgie métallique (Têtes, fards et lombrics), Hurleries bizarroïdes (Head is a killer), Déprime religieuse (Tête préparée), Guerre sanglante (Eaten head), Punkerie électro morbide (Empire head building), Prémonition (Tête abiotique), Démence acoustique (Tête molle), Névrose profonde (Sang, tête ni but).
Petit à petit le cluster dodécaphonique monte en puissance jusqu'au paroxysme et une à une les têtes explosent. La baudruche pitoyable s'affaisse alors lentement. Il ne reste plus au sol qu'un pauvre corps vidé et 12 têtes...Mortes !