Cet album, peut-être un des plus étranges et déroutants de l’artiste, se présente comme des ponts qu’il aurait voulu bâtir entre le rock, la pop et l’électro. Il poursuit en cela son travail de toujours, celui d’un génie scientifique de la musique qui considère les mouvements et genres musicaux comme des ingrédients que l’on mélange par différents dosages dans le but d’en créer de nouveaux. Bien sûr que beaucoup considèrent cette période de sa carrière comme un repoussoir, mais il faut tout de même lui reconnaître le courage de la perpétuelle remise en question et le talent du recyclage musical permanent.
C’est peut-être avec Outside qu’il va le plus loin dans le détricotage systématique de nos codes et repères musicaux, certains morceaux s’éloignant définitivement du format de la chanson traditionnelle. Pas de refrain, pas de couplet, pas même de mélodie parfois, voir pas d’instrument de musique. Certains morceaux sont purement synthétiques jusqu’à proposer une voix totalement distordue et méconnaissable. Cela n’empêche en rien la découverte de nouveaux sons passionnants qui empêchent cependant de faire de cet album en coup de cœur dès la première écoute. On reste très éloigné de l’easy listening, on est plutôt dans l’exploration de nouveaux univers situés au-délà des frontières musicales connues.
Les plus frileux des mélomanes trouveront quelques possibilités de se réconcilier avec cet album et avec David Bowie. L’ouverture de l’album, bien que faite de sons électroniques, rappellera les créations qu’ont pu donner en leur temps les Pink Floyds où telle une symphonie, un album se devait d’avoir une structure et un concept. Les amateurs de dancefloors n’auront aucun mal à s’emballer sur Hallo Spaceboy et son rythme implacable terriblement appuyé.
Outside n’est peut-être pas l’album le plus mémorable de David Bowie, il restera par contre comme celui qui sera allé le plus loin dans sa démarche de création absolue et sans concession commerciale. Il faut toujours retenir que, même s’il a connu le succès, David Bowie a toujours cherché à prendre des risques, à se réinventer sans jamais céder à l’aspect commercial de l’industrie du disque qui aurait pu le submerger de médiocrité. Cela lui a réussi puisque son succès est mondial, on appelle ça le génie.