Le post-rock ? Une recette qui tourne en rond depuis trop longtemps.
En tout cas, les déclinaisons médiocres de groupes comme Godspeed You! Black Emperor, Mogwai (Explosions in the Sky et God Is an Astronaut) ou encore Bark Psychosis (Sigur Rós) me fatiguent. Des héritiers hélas, loin d'être à la hauteur et qui se contentent de rallonger la sauce avec des montées en puissances sans saveur car prévisibles ou des climats introspectifs bien plus proches de l'ennui que de l'hypnose.
C'est pour cette raison que Southpacific est un vrai miracle, cet album en particulier.
Le premier contact ne s'est pourtant pas montré concluant au départ. Je n'y décelais qu'un disque de post-rock (enrobé de guitares shoegaze certes) agréable mais banal comme j'en ai entendu tant d'autres. Autre détail qui m'a de suite sauté aux oreilles: une forte capacité à ressembler à ce post-rock aux allures de musique d'ascenseur qui ne me plait guère. Comme par exemple, celui de God is an Astronaut ou Explosions in the Sky. Agréable mais inconséquent pour l'un, épique mais rapidement barbant pour l'autre.
Quelques écoutes supplémentaires m'ont vite données tort : Southpacific est bien plus que ça. Déjà ils sont en avance sur toute cette vague de formations jouant un rock instrumental à la fois rêveur et mélancolique à coup d'arpèges noyés dans une reverb de luxe. Mais surtout, ils ont ce quelque chose que les deux tâcherons cités plus haut rêvent de posséder dans leurs fantasmes les plus fous: de la finesse et du talent.
Déjà, pas de pathos exacerbé comme on en entend trop dans le genre. Mais surtout (et c'est bien là où pêche la grand majorité des groupes post-rock depuis au moins une dizaine d'années), on y découvre des mélodies. Belles, subtiles, capable de générer non seulement des émotions mais aussi des ambiances.
Cette hybridation entre shoegaze, space rock et post-rock aboutit à une fusion mémorable où la tête et le cœur sont mis à disposition. Que ce soit avec les arpèges évocateurs de "Interconnect", les effets flanger absolument magnifiques de "Soundbarrier", tout dans ce disque est fait pour faire rêver et uniquement rêver, sans laisser une seule occasion à son auditeur de poser ne serais-ce, qu'un pied sur terre avant la fin du disque.
Les (rares) amateurs du groupe diront que j'exagère peut être avec ma note et affirmeront que Constance est encore meilleur puisqu'il va plus loin. C'est vrai, ce dernier est plus varié et pose des axes qui aboutissent tous vers quelque chose d'intéressant. Mais en même temps, Southpacific n'a jamais autant atteint un tel degré de perfection que sur ce premier album. Car je vais vous le dire, il n'est pas seulement addictif parce qu'il est court, mais tout simplement parce qu'il est parcouru d'un onirisme que vous ne retrouverez jamais dans les albums post-rock les plus populaires des années 2000.
Un chef d’œuvre méconnu.
Chronique consultable sur Forces Parallèles.