Carrier
7.1
Carrier

Album de The Dodos (2013)

Quel disque somptueux.


J'ai découvert ce groupe relativement récemment par l'intermédiaire de mon meilleur ami, et "Visiter" reste un disque incroyable. J'attendais donc un nouveau Dodos avec impatience, bien que n'ayant peu écouté les autres albums ("No Colors" est chouette aussi). A la sortie de "Carrier", je saute dessus et l'écoute immédiatement - dans le désordre sans le savoir.

L'ambiance est plutôt feutrée, calme. On est loin du folk-pop volontiers agressif ou cradingue de "Visiter", ici toutes les chansons sont relativement posées et les ruptures de ton comme sur "Substance" et ses cuivres ne sont pas légion. Il faut dire que le groupe a perdu un de ses membres récemment. D'ordinaire je considère que connaître le contexte de création d'un disque n'est pas nécessaire pour l'apprécier : si un disque est vraiment bon, la musique doit parler d'elle-même, peu importe ce qui a présidé à sa création. Mais ici, il y a quelque chose de terriblement émouvant qui se dégage de la musique, qui nous serre le cœur et nous intrigue, et avoir cette information délivre en quelque sorte le secret du disque, qui par bien des aspects est un recueillement à la mémoire d'un ami disparu. La plus grosse surprise ici étant la prévalence de la guitare acoustique par rapport aux précédents disques et le paradoxal calme qui s'ne dégage : que l'on songe seulement au délire furibarde "Joe's Waltz" et de ses sonorités acoustiques agressives et percutantes. Ici, le tout électrique ou presque est signe d'apaisement, de solennité. On change donc subtilement de registre vers une pop plutôt éthérée, rêveuse, méditative.

La sobriété suinte de cet album : on connaît la propension du groupe à choisir des noms de chanson à un mot, mais ici il n'y a que ça, l'article "The" étant là par deux fois pour préciser un peu l'objet du titre. Et quels mots... "Relief", "Death", "Substance", il y a quelque chose d'organique et de spirituel, d'élémentaire*("The Ocean", la superbe dernière chanson du disque). On peut ne pas être séduit ou touché par le disque, mais les intentions sont louables. Et pour ma part tout fonctionne. Les morceaux sont faussement simplistes et les trois premiers titres sont absolument merveilleux et retors. Le son est précis, par moment presque liquide, très chamber folk intimiste. Le groupe se resserre sur des compositions moins nombreuses et plus courtes que par le passé, il vise l'économie et la concision et ça fait mouche. On écoute le disque et on ne voit plus trop le temps passer,les chansons défilent sans même que l'on s'en aperçoive, il y a une belle uniformité qui en lassera peut-être certains.

J'ai néanmoins une nette préférence pour les premiers morceaux qui montrent plus de variété et aussi d'agressivité que la suite qui relève plus de l'enchaînement fluide et inéluctable de chansons belles, tristes et agréables mais dont aucune pour le moment ne se détache vraiment. Il me faudra surement de nombreuses écoutes supplémentaires pour maîtriser un peu mieux l'album, ses secrets, ses détours, ses trésors cachés. On a là un album qui semble se dérober à notre intellect en étant faussement sobre, faussement simple et banal. Il faut donc creuser un peu pour voir la face cachée du disque, à l'image de l'énigmatique pochette qui évoque l'absence et la mort et me rappelle un plan célèbre de "l'Avventura".

Bref, j'ai un coup de cœur que j'ai décidément du mal à mettre en paroles pour ce disque intimiste et un peu déprimant, à écouter les après-midis pluvieuses d'une fin d'été par exemple. Et rêver un peu.

Créée

le 3 sept. 2013

Modifiée

le 3 sept. 2013

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Krokodebil

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