Drones
5.3
Drones

Album de Muse (2015)

Drones n'est pas encore officiellement sorti que tout a déjà plus ou moins été dit dessus.Comme on pouvait s'y attendre, il divise plus que jamais, entre enthousiasme devant ce "nouveau" Muse qui s'affirme lentement mais sûrement et nostalgie des premières galettes. Je me trouve sans conteste dans cette deuxième catégorie et suis par conséquent extrêmement déçu par cet album ; mais plutôt que de répéter ce qui a déjà été relevé dans les critiques de paulr94 ou encore MathieuCan, qui résument assez bien mon ressenti, j'aimerais aborder deux points qui, me semble-t-il, ne l'ont pas encore suffisamment été.


J'ai la désagréable impression que Muse, et Bellamy en tête, se complaît dans un statut de géant pop-rock dûment acquis au gré de quatre splendides premiers albums et au détour des plus grands stades d'Europe et maintenant du monde. Et qu'ils se permettent par là de nous servir une soupe de plus en plus indigeste. Je ne dis pas là qu'un artiste "doit" quoi que ce soit à ses fans ; après tout libre à chacun d'écouter ou non ce qu'on lui propose. Mais dans le cas de Drones, et devant un travail d'écriture et de composition qui, en dépit d'une production proche du sans-faute, me semble tout simplement bâclé et décadent, je me demande si Muse se foutrait pas un peu de ma gueule.
C'est mon premier point: je trouve tout bonnement honteux de servir, au bout du 7e album, des textes aussi pauvres et expédiés. Bellamy n'a jamais été un poète notoire, mais il avait par le passé au moins la décence d'écrire des paroles plus implicites, moins naïves, et que chacun pouvait s'approprier à sa guise. Dans Drones, il nous fait la totale. De la faute de goût ("Your blood is blue and your mind turned green / And your belly is all yellow" - Defector) aux lieux communs naïfs ("Our freedom’s just a loan / Run by machines and drones" - Revolt), le tout canonisé dans l'atroce Psycho, caricature du genre. Certains passages semblent tout droit issus d'une sous-prod R'n'Bouse bonne à garnir les programmations de Virgin : "Feel me now, hold me please / I need you to see who I am / Open up to me, stop hiding from me / It's hurting, babe" (Dead Inside) ou encore "You’ve got strength, you’ve got soul / You’ve felt pain, you’ve felt love" (Revolt). Mais le plus inquiétant à mon sens, c'est encore de constater les erreurs de rythme manifestes que Bellamy peut commettre dans son écriture, à l'image du 2e couplet de Reapers : "I’m just a pawn / And we’re all expendable / Incidentally, electronically erased". Comme si le texte avait été pondu sans prêter attention à l'instrumental. Sidérant.


Alors non, Muse, il ne suffit pas de plaquer des lyrics de seconde zone sur une composition déjà en panne d'inspiration en espérant que les gentils fans acquiesceront sans broncher, parce qu' "au pire, le texte on s'en fout". On s'en fout pas du tout. Ça marche peut-être dans votre fantasme d'univers dystopique manichéen où les pauvres pions de l'état sont contrôlés par les méchants drones de Satan, mais moi je vis en 2015 et j'aimerais écouter un album qui me prend pas pour un jambon.
C'est mon deuxième point, et sans doute celui qui m'énerve le plus : c'est quoi votre p*tain de délire Big Brother illuminati depuis Resistance les gars? Je sais pas ce qui me court le plus sur le haricot dans l'histoire, la thématique faussement subversive et terriblement naïve en elle-même, ou le fait que ce soit justement un groupe tout sauf subversif, et si profondément incompétent sur le sujet que ça en devient drôle, qui se l'approprie. Quand Zack de la Rocha et ses potes, que Bellamy semble vouloir désespérément singer, faisaient fermer Wall Street et gueulaient des discours anti-Bush à Coachella, là c'était subversif. Claquer des injonctions de JFK en interludes et sortir des lyric videos dignes d'une cinématique de Counter Strike (Reapers), c'est ridicule. Encore une fois, il ne suffit pas de suivre un (mauvais) concept pour que la thématique d'un album se suffise à elle-même, et tant pis pour la musique qui lui sert de support.
Et maintenant qu'on a parlé de 1984 et des méchants drones de l'état-pieuvre, ça va être quoi le thème du prochain concept-album-de-la-mort les gars? Le nucléaire? La radioactivité? Histoire d'épuiser tous les chapitres du programme d'anglais LV2 de première. Nan parce que la radioactivité c'est un truc de méchants aussi, comme les ondes. Bouh, caca.


J'attendais beaucoup de Drones, surtout après examen des dernières setlists de Muse qui semblait chercher un retour aux sources dans des titres heavy comme Dead Star ou Futurism. On retrouve cette veine dans les trop esseulées The Handler, Reapers ou la promesse ratée The Globalist, mais ça ne suffit pas à faire oublier les brûlots que sont Mercy ou Revolt par exemple, d'ores et déjà les pires chansons de Muse à mon sens.
C'est finalement le pire à propos de ce nouvel album : les gars en ont encore sous la pédale, mais se perdent complètement dans un délire impertinent duquel ils semblent ne plus pouvoir sortir. Et pourtant, il va bien falloir changer de recette. Parce que là, je suis désolé, mais ça ne suffit pas.

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le 6 juin 2015

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Jambond

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